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Face à l’horreur, la solidarité

Réfugiés à pied chargés de bagages.
© Andrei Pungovschi/Fairpicture

Des réfugiés arrivent à pied à Siret, à la frontière entre l’Ukraine et la Roumanie.

De nombreuses ONG travaillent avec des organisations locales pour venir en aide aux millions de réfugiés ukrainiens. Solidar Suisse est l’une d’elles

Plus de 2 millions de personnes, majoritairement des femmes et des enfants, ont fui les bombardements russes qui plongent l’Ukraine dans une guerre dont on ne peut prévoir l’issue. Partout en Europe, les appels aux dons et les hébergements mis à la disposition par des citoyens engagés sont exemplaires. Dans les Etats voisins du pays assiégé, les ONG se mobilisent pour venir en aide aux réfugiés toujours plus nombreux. Solidar Suisse, issue de l’Œuvre suisse d’entraide ouvrière (OSEO), soutient deux organisations partenaires en Roumanie, LOGS à Timisoara et le Migrant Integration Center à Brasov. Elles fournissent nourriture, hébergements, premiers secours et conseils aux personnes en fuite. Le point avec les porte-paroles de Solidar, Lionel Frei en Suisse et Melanie Wirz en Roumanie.


Que fait Solidar Suisse pour venir en aide aux réfugiés?

Lionel Frei: Nous avions déjà travaillé par le passé en Roumanie. C’est pourquoi, dès le début de la crise, nous avons activé notre réseau sur place et choisi de travailler avec deux organisations, spécialisées dans les questions migratoires. Nous fournissons de l’aide d’urgence, du matériel médical, des repas chauds, un lieu pour dormir, un soutien psycho-social, car les personnes qui arrivent sont traumatisées. Elles ont aussi besoin de conseils, car elles ne savent pas toujours où aller ni que faire. La migration, comme toujours, comporte un milliard d’inconnues.

La plupart continuent leur route vers l’ouest…

Melanie Wirz: Rien que mercredi, 30000 personnes sont entrées en Roumanie, alors que 25000 autres quittaient le territoire vers l’ouest. La plupart veulent rejoindre des membres de leur famille. Et entrer dans l’espace Schengen permet de voyager plus facilement. Sans compter que la Roumanie est le deuxième pays le plus pauvre d’Europe, après la Moldavie.

Ce sont surtout des femmes et des enfants qui fuient la guerre…

M.W: L’Unicef estime que la moitié des exilés sont des enfants. Les hommes restent dans leur pays pour combattre. J’ai rencontré trois jeunes femmes ayant laissé leur mari en Ukraine qui m’ont dit être très fières d’eux. Entre 18 et 60 ans, les hommes n’ont pas le droit de sortir, sauf s’ils ont un handicap et ne peuvent donc pas servir dans l’armée ou s’ils ont plus de trois enfants. C’est ce que j’ai entendu, mais je n’ai pas pu vérifier sur place à la frontière.

Qu’est-ce qui vous a le plus surprise en Roumanie?

M.W: La solidarité des Roumains, qui n’ont déjà pas grand-chose mais qui donnent énormément. Dans un des centres d’accueil que j’ai visités, il y a des piles de vêtements chauds et de chaussures, car il fait très froid en ce moment et des personnes ont quitté l’Ukraine en pantoufles! Les personnes qui arrivent directement de Roumanie sont en voiture ou à pied. Durant leur fuite, certains délaissent leur véhicule faute de benzine ou parce que les files d’attente à la frontière sont trop longues.

La Chaîne du bonheur a récolté 50 millions de francs en une journée. Du jamais-vu?

L.F: A ce jour, la Chaîne du bonheur a reçu plus de 80 millions de francs de dons. De notre côté, nous n’avons jamais assisté à un tel élan de solidarité: 1 million de francs en deux semaines. Ces dons proviennent essentiellement de citoyens, mais aussi d’organisations dont nous sommes proches telles que les syndicats et le Parti socialiste. Grâce à l’appui de la Chaîne du bonheur, nous allons probablement pouvoir encore élargir notre soutien. On ne peut que se réjouir de cette solidarité.

Récoltez-vous des dons en nature?

L.F: Non, comme la plupart des grandes ONG, nous achetons sur place ce qui est nécessaire. Cela permet d’être plus flexible. Il se pourrait aussi que nous mettions en place une aide en cash, car les personnes qui ont besoin d’un soutien savent souvent bien mieux que quiconque ce dont elles ont besoin. Notre programme auprès de réfugiés au Liban a montré l’efficacité de ce type d’aide directe qui, de surcroît, a le mérite d’être plus respectueux des bénéficiaires.

M.W: Les réfugiés ont besoin de se sentir en sécurité et en confiance. Ils ont besoin de paix, qui ne peut s’acheter bien sûr…

Comment voyez-vous la suite?

L.F: C’est impossible de faire des plans sur la comète. On s’adapte au jour le jour. Tout change très vite. Et même si la guerre s’arrête demain, ses répercussions vont durer longtemps.

«Nous prions pour que cette guerre se termine rapidement»

Melanie Wirz, porte-parole de Solidar, est en Roumanie, où elle récolte des témoignages de réfugiées. Extraits

Lorsque les sirènes de Kiev se sont mises à hurler, elle a su: «Je dois partir d’ici.» Yuliia Temchenko a passé la nuit suivant son anniversaire dans les rues de Kiev. Comme des milliers d’autres, elle a cherché refuge avec ses enfants dans la station de métro Vurlucya, par des températures négatives. «J’ai habillé les enfants dans des vêtements d’hiver, j’ai pris des oreillers, des couvertures et de la nourriture, et nous avons cherché une place dans les souterrains. Je n’ai pas fermé l’œil, mais au moins mes enfants allaient bien. Ils pensaient que nous allions camper ici pour nous amuser.» Le lendemain matin, elle a voulu retourner à l’appartement avec ses enfants, élaborer un plan pour la suite. «J’étais toujours convaincue que nous ne quitterions pas Kiev.» Mais déjà, alors qu’elle se trouvait sur les marches de la station de métro, les sirènes se sont mises à retentir. «C’est à ce moment-là que j’ai réalisé : nous devons partir d’ici.»


Maya Khromkh et son mari sont en route depuis quatre jours. Quelques heures avant que les bombes ne tombent sur leur maison à Odessa, ils avaient fait leurs valises. «Nous voulons rejoindre une amie en Allemagne, explique la femme de 62 ans. Nous avons dû laisser mon fils et sa femme enceinte derrière nous.» Il n’a pas le droit de partir, car les hommes astreints au service militaire n’ont pas le droit de quitter l’Ukraine. «Nous prions pour que cette guerre se termine rapidement, pour que Poutine retire ses troupes. L’Ukraine est notre maison et nous voulons y retourner», dit-elle en larmes.

L’intégralité des témoignages sur: solidar.ch

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