Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

Pour un autre rapport au travail

Pénibilité du travail, salaires de misère, pertes d’acquis, gens qui quittent les métiers les plus durs, dans la construction, la vente, ou encore dans la santé. Relève qui n’est pas assurée. Tous ces éléments étaient au cœur des manifestations qui se sont déroulées dans plusieurs grandes villes de Suisse samedi dernier, à l’appel d’Unia et des autres syndicats.

Après de longs mois de pandémie, où les inégalités n’ont cessé de croître, où les conditions de travail se sont détériorées, où le personnel a risqué sa santé pour continuer à soigner, à bâtir, à vendre, où des salariés ont perdu une part importante de leur revenu, ne pouvant plus travailler, les consciences s’éveillent. Le ras-le-bol est tangible.

Samedi, des milliers de manifestants ont exprimé leur colère. Colère contre l’irrespect du patronat, comme de l’Etat pour les soignants, face à leur engagement durant ces longs mois de Covid. Colère face à des employeurs qui refusent des hausses substantielles de salaire permettant non seulement de combler le renchérissement, mais également de vivre mieux. De vivre tout court.

Inégalités salariales entre femmes et hommes, attaques contre les retraites, absence de reconnaissance de ceux qui, chaque jour, forgent la Suisse, étaient aussi au centre des doléances. Le travail doit être reconnu à sa juste valeur. Les richesses doivent cesser de s’accumuler dans les poches de quelques privilégiés. Il est temps de les redistribuer. Il est temps aussi de repenser notre lien avec notre activité professionnelle. Comme le confiait un jeune maçon se rendant à la manifestation, interrogé sur l’avenir: «Il faudrait prendre le temps de se poser, de réfléchir ensemble, et de trouver une bonne réforme de tout, du travail, du rôle de chacun.»

Samedi, dans la rue, les gars de la construction, les vendeuses, les nettoyeuses, les sommelières, les horlogères, les infirmières, ont exprimé leur exigence de hausses de salaire pour toutes et tous, mais également cette volonté de freiner la machine, d’arrêter de devoir mettre sa santé en danger pour l’économie et le profit. De pouvoir respirer et avoir une vie digne. Pour eux, pour leurs enfants.

Cette volonté d’un autre monde du travail est en train de surgir un peu partout sur la planète. Aux Etats-Unis, les grèves se multiplient. Les employés n’acceptent plus d’être pressurisés, non respectés. Des millions d’entre eux quittent leur emploi, dans ce que certains nomment «la grande démission». Vingt millions de personnes, dont de très nombreuses travailleuses de la vente, de l’hôtellerie-restauration, des soins à la personne ont donné leur congé depuis ce printemps.

Ce phénomène d’une ampleur sans précédent témoigne lui aussi de cette prise de conscience que, malgré tous les efforts fournis, tous les sacrifices, les salariés restent à la merci d’un patronat pour qui seule compte l’accumulation des bénéfices, même, ou surtout, en temps de crise. Pour les employeurs de partout, augmenter les salaires serait une menace pour les emplois, mettrait un frein à la compétitivité. Or une hausse des rémunérations et des effectifs pour diminuer la pénibilité ne ferait que freiner l’accaparement des richesses par quelques-uns au détriment de l’immense majorité de la population.

Oui, réfléchissons à l’avenir, à notre rapport au travail, au monde à l’heure où notre planète est à la peine, et à la possibilité d’organiser la société sur des bases nouvelles, faites de respect, de reconnaissance et de solidarité.