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Un congrès face aux défis de l’inflation, des retraites et du climat

Scène du congrès avec le président et vices-présidentes.
© Olivier Vogelsang

Après un retour sur les quatre années écoulées, marquées par la pandémie et les conséquences de la guerre en Ukraine, les délégués au 57e Congrès ont décidé des grandes orientations pour l’avenir.

L’Union syndicale suisse a tenu son 57e Congrès les 25 et 26 novembre à Interlaken. Plus de 200 délégués des fédérations affiliées et des unions locales ont pris part aux débats, marqués par des moments forts

«Notre union est notre force.» «Syndicats forts, travailleurs forts.» Ces devises s’affichaient sur la tribune du 57e congrès de l’Union syndicale suisse (USS), réuni les 25 et 26 novembre dernier. Plus de 200 déléguées et délégués des fédérations membres et des unions cantonales se sont retrouvés au Kursaal d’Interlaken pour déterminer les orientations syndicales pour les quatre années à venir. Au menu: pouvoir d’achat, prévoyance vieillesse et tournant climatique. Mais aussi grève féministe, solidarité internationale, droit des migrants ou encore formation.   

Elu lors du 56e Congrès en 2018, Pierre-Yves Maillard a lancé les débats par un regard dans le rétroviseur sur ces quatre dernières années. Des années marquées par la pandémie de Covid-19, puis par les conséquences de la guerre et de la forte inflation. «Jamais nous n’aurions pensé vivre une situation où 1,5 million de personnes devraient avoir recours au chômage technique. Jamais nous n’aurions pensé devoir inventer une assurance sociale pour les indépendants en quelques jours afin d’assurer un revenu à des dizaines de milliers de personnes. Jamais nous n’aurions pensé voir la vie sociale, les écoles, la culture s’arrêter», a-t-il rappelé, avant d’indiquer la place prise par l’USS dès les premières heures en demandant au Conseil fédéral de réunir les partenaires sociaux et en proposant un plan d’action. Le président a souligné le fort engagement des syndicats sur le terrain, pour aider les membres et le personnel en première ligne. Le défi européen est le second sujet phare ayant occupé l’USS durant ces quatre ans. Avec les questions de la guerre en Ukraine, de l’accord-cadre et la lutte contre la baisse des protections salariales. Un troisième thème est la lutte sociale autour des rentes, des salaires, et de «notre vision féministe de cette lutte». Un combat qui s’est décliné lors de la grève féministe du 14 juin 2019, dans les revendications en matière de violence ou d’émancipation et dans la votation sur AVS 21 qui «laissera des traces profondes et douloureuses». Pour Pierre-Yves Maillard, la campagne pour une AVS forte vient de commencer, «avec l’initiative pour une 13e rente qui doit permettre de compenser la baisse des rentes du 2e pilier». «Nous lançons aussi notre offensive pour des salaires minimums de 4500 francs et 5000 francs avec un CFC. Nous terminons cette période 2018-2022 avec des propositions et des actions fortes. Les maçons ont fait grève, ils nous montrent la voie, comme les soignantes qui vont manifester demain à Berne pour leurs conditions de travail.»

Plus de 230 nouveaux membres aux TL

Avant d’entamer le débat sur les textes proposés, le président a fait monter à la tribune le président de la section SEV des Transports publics lausannois et quatre membres du comité. Ils ont témoigné de l’immense travail syndical réalisé dans l’entreprise: «Nous sommes plus de 900 membres dans notre section. Cette année, nous comptons plus de 230 nouveaux affiliés et ce n’est que le début! Notre objectif est de dépasser les 1000», a expliqué Toni, racontant les trois victoires remportées durant une année très intense: contre les horaires de travail fluctuants, pour le renchérissement avec l’obtention d’une hausse de 5,05% pour 2023, et contre une dégradation des horaires dans les ateliers. «Durant six jours, nous avons fait un service minimal de cinq heures par jour. Notre action a permis de créer un rapport de force qui a obligé la direction à négocier des mesures de compensation. La mobilisation, ça paie!» a souligné le militant qui, avec ses collègues, ont reçu une salve d’applaudissements. «Ce témoignage vaut mille colloques sur comment faire des membres!» a félicité Pierre-Yves Maillard.

D’autres invités se sont exprimés durant le congrès, dont Wolfgang Katzian, président de la Confédération des syndicats autrichiens (ÖGB). Venu en ami de l’USS, qu’il a soutenue dans sa lutte pour le maintien des mesures d’accompagnement, il a informé sur les mouvements en cours en Autriche, où nombre de personnes n’arrivent plus à payer leurs factures: grandes manifestations dans tous les Länder et grèves en préparation chez les cheminots, les brasseurs, dans les commerces. Vice-président de la Fédération des syndicats d’Ukraine, Oleksandr Shubin a parlé de la situation des travailleurs dans son pays, où 55% d’entre eux ont perdu leur emploi. Et des difficultés rencontrées par les syndicats face aux limitations des droits des salariés.

Parmelin et le partenariat social

Autre hôte de marque: le conseiller fédéral Guy Parmelin, responsable de l’économie. Malgré la sortie discrète de déléguées femmes et de Romands de la salle pour contester sa présence, le Vaudois s’est adressé aux congressistes pour dire sa confiance en l’économie suisse malgré la situation précaire en matière d’énergie, et saluer la longue tradition du partenariat social helvétique. «Je ne suis pas venu vous dire que tout allait bien, ni qu’on allait marcher main dans la main, mais je remercie l’USS d’avoir joué une note au service de la politique sociale et de l’amélioration des conditions de travail», a-t-il déclaré, avant d’être interpellé par des délégués sur… les canons à neige, puis sur la motion Ettlin et sur le personnel de santé. «Vous dites que nous sommes dans le même bateau. A partir de quand le Conseil fédéral sera-t-il prêt à ramer avec nous pour améliorer les conditions de travail du personnel soignant?» a lancé un syndicaliste du SSP. A qui le conseiller fédéral a répondu que la question préoccupait le gouvernement qui entend, avec les partenaires sociaux, intéresser les gens à rester dans la profession. Quant aux salaires, il devrait en être question ultérieurement, lors de la mise en œuvre de la deuxième partie de l’initiative des soins.

Durant la journée et demie du congrès, les militants ont débattu, amendé et accepté trois textes d’orientation (voir ici), ainsi que de nombreuses résolutions et propositions. Des moments forts ont jalonné ce congrès, comme le lancement de la grève féministe du 14 juin 2023 (voir ici), et le témoignage poignant d’une artiste iranienne (voir ici).

Le Congrès a également réélu les instances dirigeantes, avec Pierre-Yves Maillard à la présidence et Vania Alleva d’Unia et Natascha Wey du SSP à la vice-présidence. Le comité présidentiel sera constitué de Matthias Hartwich et Valérie Solano du SEV, Nico Lutz et Véronique Polito d’Unia, Daniel Münger et Stephanie Vonarburg de Syndicom, et de Katharina Prelicz-Huber du SSP.

L’USS a encore décerné son traditionnel prix culturel à l’artiste Sandra Künzi, slam-poète et auteure, qui s’est fortement engagée en défense de la culture lors de la pandémie.

Protection contre le licenciement: un signal fort du congrès

«C’est une très bonne nouvelle, pour la région Genève dont c’était une priorité, pour Unia qui l’avait décidé lors de son congrès en février, pour l’USS tout entière et pour tous les salariés.» Anna Gabriel Sabate, secrétaire régionale d’Unia Genève, dit sa satisfaction après l’adoption, à une très large majorité, de la proposition d’élaborer une initiative fédérale pour une protection étendue contre le licenciement. Une demande soutenue non seulement par Unia et la Communauté genevoise d’action syndicale (CGAS), mais également par l’Union syndicale tessinoise, le groupe d’intérêts femmes d’Unia et d’autres militants qui ont pris la parole lors du deuxième jour du Congrès de l’USS.

Le comité de l’USS recommandait d’accepter pour examen les propositions d’Unia et de la CGAS, en attendant de connaître le résultat de la médiation entre partenaires sociaux, qui devrait aboutir en décembre. Or, les délégués ont décidé d’aller de l’avant sans attendre.

«La demande des salariés de renforcer la protection contre les licenciements date d’il y a très longtemps et les gens constatent que rien ne bouge, souligne Anna Gabriel Sabate. Il fallait que l’on sorte de ce congrès avec un signal fort et la volonté de lancer cette initiative, ce qui peut aussi être un point d’appui pour l’USS dans la médiation en cours. La protection contre le licenciement ne concerne pas uniquement les militants ou les délégués syndicaux, mais l’ensemble des travailleuses et des travailleurs. Ils sont des milliers à ne pas oser revendiquer leurs droits parce que la peur les paralyse. C’est un problème très profond. Avec une initiative, nous pourrons sortir dans la rue, toucher beaucoup de personnes très concernées par cette réalité.»

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