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Un mouvement qui monte de la base

Déjà presque 50 jours de grève! Des dizaines de journées d’action. Des centaines de manifestations. Des milliers et des milliers de salariées et de salariés français ont entamé un bras de fer avec le président Macron le 5 décembre. Si, dans quelques secteurs, certains commencent à s’essouffler, d’autres, dans des assemblées d’entreprises, d’écoles, d’hôpitaux, reconduisent jour après jour la grève pour le retrait du projet de réforme des retraites. Les danseuses de l’Opéra de Paris, comme son orchestre, fortement affectés par la disparition de leur régime spécial, ont donné des représentations sur le parvis de l’opéra Bastille. Des milliers d’avocats sont entrés dans la danse, certains n’hésitant pas à jeter leur robe aux pieds de la ministre de la Justice. 1200 médecins ont démissionné en bloc de leurs fonctions administratives, après déjà de longs mois de lutte pour la survie des hôpitaux. Si le métro parisien reprend peu à peu du service, le syndicat réformiste Unsa-RATP ayant appelé samedi à la suspension de la grève, d’autres services continuent le combat sans relâche. Les huit raffineries du pays sont touchées par le mouvement, faisant craindre une pénurie d’essence. Les dockers bloquent les sept grands ports du pays. Les syndicats appellent à des «journées mortes» les 22, 23 et 24 janvier. Le projet de loi sur les retraites sera présenté au Conseil des ministres ce 24 janvier. A cette date, l’Intersyndicale, réunissant les grandes organisations du pays et des syndicats étudiants et lycéens, appelle à une journée massive de grève et de manifestations.

Bien que présentant des signes d’essoufflement, ce mouvement social inédit, montant de la base et auquel participent aussi les Gilets jaunes, était toujours soutenu par 60% de la population la semaine dernière. L’enjeu est grand. Comme le disent les danseurs, choristes, musiciens ou techniciens de l’opéra: «Nous ne pouvons pas être la génération qui aura sacrifié les suivantes». Une prise de conscience collective de ce qui se cache derrière le système à points voulu par Macron émerge. Un régime qui fera le bonheur des fonds de pension, à l’image de BlackRock, dont le PDG France a été promu le 1er janvier officier de la Légion d’honneur...  

Grâce à son système actuel, la France est en tête des pays européens avec le plus bas taux de pauvreté parmi les retraités. Il manque de l’argent pour le maintenir? Les syndicats proposent des solutions: augmenter les salaires, appliquer immédiatement l'égalité salariale, développer l’emploi stable, mettre fin à la précarité, de la jeunesse en particulier, soumettre les plateformes numériques à cotisations, ou encore en finir avec les exonérations patronales.

Ce n’est bien évidemment pas l’avis de la ministre du Travail de Macron, la millionnaire Muriel Pénicaud, qui expliquait la semaine dernière sur Franceinfo que les syndicats pourront proposer des améliorations du système à points lors de la future Conférence de financement, mais à une condition: que cela ne renchérisse pas le coût du travail… Ce qui porterait préjudice à l’emploi. Chantage traditionnel. Les travailleurs grecs le savent mieux que personne, eux qui ont vu leurs salaires réduire comme peau de chagrin, et leurs postes de travail aussi. Les salariées et les salariés français ne sont pas dupes. Leur mouvement de défense de la retraite concentre également la colère contre des conditions de travail et d’existence qui ne cessent de se dégrader. Malgré les pertes de revenus immédiates, beaucoup sont prêts à ne rien lâcher.