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Hilcona: les salariés attendent toujours

Le 16 décembre, des travailleurs d’Hilcona ont manifesté devant le siège de la fondation Promotion Santé Suisse, afin de dénoncer une nouvelle fois des conditions de travail catastrophiques et exiger le retrait du label «Friendly Work Space» (espace de travail convivial).
© Neil Labrador

Le 16 décembre, des travailleurs d’Hilcona ont manifesté devant le siège de la fondation Promotion Santé Suisse, afin de dénoncer une nouvelle fois des conditions de travail catastrophiques et exiger le retrait du label «Friendly Work Space» (espace de travail convivial).

Ils avaient exigé en décembre le retrait du label «Friendly Work Space» attribué par une fondation destinée à promouvoir la santé alors que leurs conditions de travail sont inacceptables

Plus d’un mois et demi après leur action symbolique devant Promotion Santé Suisse à Lausanne, les salariés d’Hilcona Gourmet n’ont toujours pas reçu de réponse à leurs demandes. Le 16 décembre, ils manifestaient devant leur usine à Orbe, puis au siège de la fondation Promotion Santé Suisse, afin de dénoncer une nouvelle fois des conditions de travail catastrophiques et exiger de la fondation le retrait du label «Friendly Work Space» (espace de travail convivial) décerné en octobre à Hilcona. Symboliquement, ils avaient remis ce jour-là leur propre label «Harmful Work Space» (espace de travail nocif) à leur société (voir L’ES du 18 décembre 2019).

Alors que les travailleurs dénoncent depuis plus d’une année ce qu’ils vivent au quotidien dans cette entreprise de production de sandwichs, pizzas et autres casse-croûtes, la direction s’évertue à refuser de négocier avec une délégation syndicale pour améliorer les conditions de travail. Plannings modifiés à brève échéance, journées extensibles, planification des vacances unilatérale, salaires particulièrement bas, sous-enchère constatée par un tribunal, inégalités de traitement entre fixes et temporaires, mais aussi problèmes de sécurité, stress, pression et mobbing, sont au nombre des griefs exposés. Malgré ces faits, rendus publics en 2018 déjà, Promotion Santé Suisse, une fondation financée par un supplément sur les primes maladie, a octroyé le label «Friendly Work Space» à la société Hilcona. Cette dernière, appartenant à Bell et au groupe Coop, compte plus de 500 salariés à Orbe, dont une grande partie de temporaires, et 1350 au total en Suisse.

Rencontre prévue entre la fondation et Hilcona

Outre le retrait de ce label ignorant totalement la réalité vécue par les travailleurs, la délégation syndicale a également demandé, par l’intermédiaire d’Unia, à Promotion Santé Suisse de la recevoir rapidement afin d’expliquer les différentes problématiques présentes dans l’entreprise. «Nous avons été informés en début d’année par Promotion Santé Suisse qu’elle avait transmis notre courrier à la direction d’Hilcona et qu’elle allait rencontrer l’entreprise prochainement, de même que le Seco, et que nous aurions une réponse en février seulement», indique Noé Pelet, responsable de l’industrie à Unia Vaud, ajoutant que Promotion Santé Suisse a aussi refusé de recevoir la délégation des travailleurs.

Catherine Favre, cheffe des relations publiques de Promotion Santé Suisse, confirme: «Nous avons fait suivre la lettre d’Unia à Hilcona. Cette dernière s’est positionnée et nous souhaitons clarifier certains points, raison pour laquelle une séance est prévue avec la direction. Nous pourrons communiquer le résultat de ces démarches dans la seconde moitié de février.» Quant à la demande des travailleurs d’être entendus, la responsable souligne qu’il est d’abord nécessaire de connaître les mécanismes de discussion instaurés par la direction avec les employés. «Notre rôle n’est pas d’être des médiateurs entre employeurs et salariés, mais d’appuyer les entreprises dans la mise en place de processus qualité de la gestion de la santé en entreprise (GSE)», dit-elle.

Pour rappel, le label «Friendly Work Space» est attribué sur la base d’un engagement volontaire des sociétés à respecter des critères relevant des processus GSE. Le retrait du label est prévu par son règlement. Il pourrait l’être «en cas de violation grave et systématique de la Loi sur le travail», précise Catherine Favre. Mais à ce jour, aucune autre demande formelle de retrait n’a été déposée. «Les entreprises labellisées doivent se soumettre tous les trois ans à une réévaluation qui exige un investissement important de leur part. Le nombre d’entreprises labellisées fluctue, car après quelques années certaines considèrent que leur système GSE est bien en place et décident de ne pas faire une réévaluation», explique-t-elle, alors que le nombre d’entreprises labellisées est passé de 83 en octobre 2019 à 78 aujourd’hui.

«Nos primes financent-elles un label trompeur?»

Le 20 décembre, peu après les actions des travailleurs d’Hilcona, le socialiste vaudois Samuel Bendahan a déposé une interpellation au Conseil national. Rappelant les conditions de travail au sein de l’entreprise, la sous-enchère ou encore le refus de la direction de discuter avec les salariés, il interroge le Conseil fédéral: «Friendly Work Space à Hilcona: nos primes financent-elles un label trompeur attribué à une entreprise en peine avec le respect des lois?»

En tant que parlementaires, les élus ont un devoir de surveillance sur des institutions liées à l’Etat. Promotion Santé Suisse est une fondation créée par la Loi sur l’assurance maladie. Son conseil de fondation est composé de représentants de la Confédération, des cantons, des assureurs, des milieux scientifiques et médicaux, des pharmaciens et des consommateurs. Chaque année, un supplément de prime maladie de 4,80 francs est payé par chaque assuré pour financer cette fondation. Un montant correspondant à plus de 40 millions de francs. Promotion Santé Suisse est donc redevable à la population dans son ensemble. Et c’est là que les choses clochent.

Dans son interpellation, Samuel Bendahan décline sa question globale en demandant plus précisément au Conseil fédéral s’il estime pertinent qu’un tel label «puisse être attribué sans aucun contact préalable avec les principaux concernés que sont les salariés», s’il estime pertinent qu’un organisme financé par les assurés et dirigé par des représentants des pouvoirs publics «puisse octroyer un prix à une entreprise qui a été récemment condamnée, sanctionnée ou remise à l'ordre par des autorités judiciaires ou administratives», s’il estime pertinent qu’un tel label «puisse être utilisé par une entreprise qui cherche à redorer son blason tout en refusant tout partenariat social pour la résolution des problèmes concrets qui lui sont soumis». Il demande encore au gouvernement s’il considère comme «normal que des problèmes rendus publics ne soient pas examinés avant l'attribution d'un tel label afin de prendre de la distance par rapport aux informations données par la direction», et enfin quelles sont les mesures que le Conseil fédéral pourrait mettre en place pour que de tels renseignements puissent peser dans l’attribution ou non du label.

«Décerner un tel prix à une entreprise décriée, où le personnel souffre, est une insulte aux travailleurs. L’objectif de cette interpellation est de dénoncer une telle pratique et de savoir s’il s’agit d’une erreur. Selon la réponse du Conseil fédéral, il est possible que cela débouche sur une autre démarche», explique Samuel Bendahan. Il informe que la réponse du gouvernement devrait être connue durant la session de printemps qui se déroulera du 2 au 20 mars, le délai imparti étant de trois mois après le dépôt de l’interpellation.

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