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Le Vorace, des saveurs en vrac

Antoine Pochon, un des initiants du projet, et deux coopératrices.
© Thierry Porchet

Antoine Pochon, un des initiants du projet, entouré de deux coopératrices. Pour le jeune homme qui effectue un master en fondements et pratiques de la durabilité à la Faculté de géoscience de l’université, l’épicerie lui permet d’allier la théorie à la réalité du terrain.

L’épicerie coopérative Le Vorace a ouvert ses portes début janvier à l’Université de Lausanne. En rayons, des produits issus de l’agriculture locale et respectueuse de l’environnement. Reportage

En ce 8 janvier hivernal, devant le récent bâtiment du Vortex sur le campus de l’Université de Lausanne, se dresse une grande baie vitrée. Quelques rayons de soleil – venus égayer cette journée pluvieuse – s’y glissent et dévoilent une épicerie à l’allure chaleureuse. Un marteau ou une scie à la main, les coopérateurs nous accueillent amicalement. Antoine Pochon, un des initiants du projet, se propose de nous faire visiter le lieu en cours d’aménagement. Ses yeux pétillent lorsqu’il présente une bibliothèque, à l’entrée, destinée à devenir une boîte à livres: «Ici, on aimerait mettre les flyers de tous nos fournisseurs ainsi que plusieurs cahiers dans lesquels on expliquerait nos valeurs. Tous nos produits sont issus d’une agriculture locale et respectueuse de l’environnement.» Il continue en désignant un présentoir où trônent plusieurs bières artisanales de la Brasserie de la Concorde. Plus loin, un meuble à pain «conçu par un ami boulanger», un étalage pour les produits de saison et le comptoir – fabriqué avec le parquet d’une vieille maison. Plusieurs silos en verre contenant céréales et graines en vrac s’alignent le long de la boutique, dessinant un arc-en-ciel de couleurs. A l’arrière du magasin se trouvent encore quelques articles transformés comme un miel conçu sur le campus même de l’université, plusieurs produits d’hygiène tels que du liquide vaisselle écologique ou des brosses à dent en bambou, puis finalement un espace pour les aliments d’ailleurs: «On s’est rendu compte que certains produits étaient introuvables chez nous et on a donc décidé d’en commander chez des commerçants équitables avec qui on a eu plusieurs contacts. En parallèle, on aimerait aussi amener une discussion quant à la nécessité d’importer certaines denrées.»

Gestion horizontale

Deux participantes s'attellent aux dernières finitions.

A la base constituée d’une trentaine d’individus, principalement étudiants en géosciences, l’entreprise compte aujourd’hui une septantaine de collaborateurs. Ne souhaitant pas dépasser les 300 membres, la coopérative entend rester à «taille humaine» afin de favoriser les circuits courts. L’établissement est ouvert aux étudiants mais aussi à d’autres personnes externes au milieu académique. Comme il est géré sous la forme d’une coopérative en propriété collective, chaque membre qui souhaite l’intégrer doit tout d’abord adhérer aux valeurs de l’association, puis signer la charte des membres. Chacun doit également payer une cotisation annuelle de 60 francs, une part sociale et s’engager trois heures par mois pour l’organisation. Il devient ensuite copropriétaire et cogestionnaire, au même titre que les autres coopérateurs et bénéficie d’un rabais de 15% sur les produits. On peut aussi devenir bénévole, un statut ne requérant pas d’engagement particulier, et aider suivant ses disponibilités, complète Antoine Pochon. «Pour obtenir les fonds nécessaires à la concrétisation de notre idée, nous avons contacté U-Change – un programme d’encouragement qui finance des initiatives étudiantes axées sur le développement durable. En contrepartie, l’université devait investir la même somme. Par la suite, on a envoyé des demandes à la commune, à plusieurs mécènes potentiels, puis on a finalement lancé un crowdfunding qui nous a rapporté 48000 francs», explique Antoine Pochon. L’organisation se divise en plusieurs commissions indépendantes comme celles de la communication ou des produits.

Envies d’agir

«J’ai décidé de m’engager dans cette épicerie parce que je voulais allier la pratique à la théorie qu’on m’enseigne dans mes cours à l’université.» La voix d’Antoine Pochon s’anime lorsqu’il raconte pourquoi il a commencé à travailler au Vorace. «D’un point de vue plus personnel, mon investissement correspond à une réponse vis-à-vis de l’écoanxiété que je ressens en permanence. J’aimerais que ce projet permette de repenser notre quotidien, qu’il nous aide à sortir du système actuel.» En train d’effectuer un master en fondements et pratiques de la durabilité à la Faculté de géoscience de l’université, le jeune homme est convaincu que le changement adviendra de la pluralité des luttes. Citant en exemple la zone à défendre (ZAD) de la colline du Mormont (VD) – un groupe de militants qui occupent le site d’une carrière pour empêcher son extension – il explique que l’objectif de l’épicerie serait, à long terme, de faire le pont entre les idées et les valeurs véhiculées sur le campus et la société.

En fin d’après-midi, Anne-Laure, une potentielle bénévole, vient s’informer sur les démarches à suivre pour s’engager dans la coopérative. «J’aime l’idée que tout soit local et j’aurais beaucoup de plaisir à y offrir mon temps. Je pense qu’il s’agit d’une vision d’avenir. Ça serait chouette que plus de projets similaires voient le jour!» s’exclame la jeune femme qui a entendu parler du lieu à travers une amie déjà active dans l’épicerie. «Le fait de ne pas être payée apporte également un autre aspect. On ne fait pas ça pour l’argent», ajoute-t-elle en souriant.