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Qu’importe le poison...

Multinationales criminelles. BASF, Bayer Crop Science, Corteva Agriscience, FMC et Syngenta. Cinq géants de l’agrochimie – respectivement d’Allemagne pour les deux premiers, des Etats-Unis pour les deux seconds et le dernier de Suisse – qui partagent, outre une même activité, des points communs: celui de jouer avec la santé et la vie des agriculteurs utilisant leurs pesticides, celui de contaminer l’environnement et de détruire la biodiversité. Ces cinq entreprises engrangent en effet des milliards en vendant des produits cancérogènes pour les humains, ou mortels pour les abeilles. Les informations émanent de Public Eye. L’ONG, en collaboration avec une cellule d’enquête de Greenpeace, a mené une investigation fouillée sur la question. Conclusions de la recherche: les multinationales concernées ont réalisé ensemble 35% de leurs chiffres d’affaires en faisant commerce de substances particulièrement dangereuses et controversées, soit 4,8 milliards sur les 13,4 que représente le business des pesticides de ces sociétés.

Deux poids, deux mesures. Une grande partie de ces ventes ont été réalisées dans des pays en développement ou émergents – Brésil et Inde en tête – les multinationales profitant de réglementations moins strictes. Et dans l’incapacité d’écouler leur poison dans nombre d’Etats en raison des interdictions qui les frappent, notamment dans l’Union européenne et dans nos frontières. Pas de quoi freiner les mastodontes de l’agrochimie poursuivant leur juteux commerce avec des acteurs et sur des terrains de jeux moins regardants. Au mépris total des populations locales, d’autant plus exposées qu’elles vivent souvent dans la pauvreté. Sans aucun égard pour la nature. Et avec des dramatiques conséquences à la clef: risques de cancers, d’altération de la croissance des enfants, du système reproducteur. Sans oublier les intoxications et les décès liés à la commercialisation des substances les plus toxiques représentant 4% du marché de ces firmes: Public Eye chiffre à 25 millions le nombre annuel d’empoisonnements aigus d’agriculteurs et à 220000 celui des décès. Syngenta, à lui seul, est responsable des deux tiers de ces ventes mortifères. L’impact sur l’environnement est aussi catastrophique et de grande ampleur: selon cette même source, 10% du business des cinq entreprises incriminées portent sur des pesticides renfermant des néonicotinoïdes qui jouent un rôle majeur dans la disparition des insectes pollinisateurs.

Du vent... Pesant de tout leur poids au sein du puissant lobby de l’agrobusiness CropLife, BASF et consorts se présentent pourtant comme des entreprises responsables. Des firmes soi-disant innovantes et soucieuses de remplacer les produits les plus nuisibles par des alternatives moins toxiques. Du vent... Et une posture où le durable n’est rien de plus que de la communication, du marketing, à l’heure où l’environnement s’invite régulièrement dans le débat politique. Où la violation des droits humains est dénoncée de manière récurrente par les ONG. Seules des mesures contraignantes pourraient amener des changements. Une option qui se heurte toutefois à la pression exercée par d’influents groupes d’intérêts pour qui, qu’importe le poison, pourvu qu’on ait le profit. On rêve dès lors d’un pesticide qui permettrait d’éradiquer un autre type de mauvaise herbe...