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Les salariés du Casino du Lac ont de meilleures cartes en main

Unia est intervenu pour faire bénéficier le personnel de l'établissement genevois de la CCNT de l'hôtellerie-restauration

La Convention collective nationale de l'hôtellerie-restauration (CCNT) s'applique aux établissements de jeux, trois instances l'ont confirmé. Mandaté par des employés du Casino du Lac, Unia a obtenu gain de cause. Une commission du personnel a, en outre, été élue: une première en Suisse dans un casino.

«Rien ne va plus!», lancent les croupiers devant la roulette. Pour le personnel du Casino du Lac, au contraire, tout va de mieux en mieux. Il faut dire que les mises n'étaient pas très élevées. «J'ai été engagé en 2008 pour un travail de sept nuits par semaine avec un salaire de 2600 francs seulement», raconte Laurent, serveur-barman de l'établissement de jeux installé dans la banlieue genevoise. «Frontalier, je connaissais mal le droit suisse, alors, en 2013, j'ai alerté Unia.» Le syndicat a invité la direction du casino, appartenant au groupe français Partouche, à appliquer la Convention collective nationale de l'hôtellerie-restauration (CCNT), qui prévoit un minimum de 3407 francs par mois, un treizième salaire et cinq semaines de vacances par année. «Nous nous sommes heurtés à un refus total de dialoguer», assure Umberto Bandiera, secrétaire syndical d'Unia. Les jeux n'étaient pourtant pas faits. «Nous avons organisé deux actions de protestation devant le casino avec tracts et banderoles et la direction nous a menacés d'une plainte pénale. Nous avons saisi la Chambre des relations collectives de travail et la Commission paritaire de l'hôtellerie-restauration. De leur côté, les avocats du groupe Partouche ont consulté le Secrétariat d'Etat à l'économie. Les trois instances ont confirmé que la CCNT avait force obligatoire dans les casinos et qu'ils n'étaient pas soumis au seul Code des obligations. Après une année de négociations, nous avons réussi à la faire respecter, ainsi qu'à modifier le règlement du personnel, qui, par exemple, ne contenait aucun dispositif concernant le harcèlement sexuel», se félicite le permanent syndical. «Mais la direction se refuse toujours à appliquer rétroactivement la CCNT pour les cinq dernières années, correspondant au délai de prescription légal. Nous avons donc introduit une procédure devant le Tribunal des prud'hommes. Autre problème, l'établissement retient maintenant les pourboires du personnel, ce que nous contestons.»

Une première suisse
En plus de bénéficier depuis l'été 2014 des conditions de la convention collective, les quelque 90 employés ont élu une commission du personnel à la fin de l'année passée. «C'est une première dans un casino suisse», relève Umberto Bandiera. Et même un événement pour l'ensemble de l'hôtellerie-restauration que l'on qualifie volontiers de «désert syndical». Si l'on peut citer celle du Restaurant de La Perle du Lac, là aussi à Genève et encore avec le soutien d'Unia, les commissions du personnel dans ce secteur ne se comptent même pas sur les doigts d'une main. «C'est rarissime», confirme Mauro Moretto, secrétaire central du syndicat. «70% des 30000 établissements de notre pays emploient moins de 10 collaborateurs; il y a une forte rotation du personnel et peu de tradition syndicale», déplore le responsable national de la branche, qui juge «exemplaire» cette association des salariés du casino.
«Après notre élection, nous avons dû nous battre pour obtenir un local, une boîte aux lettres et un ordinateur», explique Christophe, le président de la commission du personnel. «Nous attendons encore une connexion Internet. Comme le casino est ouvert 23 heures par jour, tous les collègues ne travaillent pas en même temps et la communication par courriel est essentielle», précise celui qui est aussi serveur-barman. «Nous avons commencé à tenir des permanences, de jour comme de nuit. Parmi nos projets figure l'amélioration des horaires. C'est difficile, mais ça avance, doucement, mais sûrement.»


Jérôme Béguin