Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

Travailler pour 2 fr. 50 de l'heure ?

En Valais, Unia mène des actions de sensibilisation auprès des apprentis, dans le cadre de la campagne nationale.

«Je fais le même travail qu'un nouvel employé qui gagne 5000 francs par mois, je dois même le former à son arrivée, et je touche seulement 700 francs mensuellement.» Le cas de François, 19 ans, apprenti électronicien en 4e année à Sion, résume bien la situation de nombreux jeunes formés en entreprise. Les apprentis sont souvent très rentables pour les employeurs, en particulier ceux de 3e et 4e année, mais ne sont de loin pas rémunérés à leur juste valeur.
Tous les jeunes ne sont pas aussi conscients de cette réalité que François. C'est une des raisons qui a poussé Unia Valais à mettre sur pied pendant deux semaines des stands d'information à leur intention. Mercredi dernier, comme les autres jours de la semaine, trois secrétaires syndicaux ont installé leur tente devant le très fréquenté Centre de formation professionnelle de Sion.

Mieux encadrer
Unia Valais fait ainsi écho à la campagne nationale pour la revalorisation des jeunes. Et le syndicat en profite pour aborder les autres difficultés auxquelles les apprentis sont confrontés: «L'encadrement fait parfois défaut. Ils sont alors traités comme de la main-d'œuvre non qualifiée, explique Eric Rausis, responsable du groupe Jeunesse à Unia Sion. Les raisons proviennent souvent des cadences excessives qui sont imposées aux ouvriers, ce qui ne leur donne pas le temps de bien s'occuper des jeunes.» Fabien, automaticien en dernière année lui aussi, témoigne justement d'une situation de ce type: «Mon patron me dit ce qu'il faut faire en arrivant le matin et je ne le revois pas de toute la journée. Il profite de mon travail. Il prend un apprenti au lieu d'engager un employé. Je ne suis engagé que depuis un mois et je pense quitter cette boîte.» Les ruptures de contrat sont d'ailleurs le principal problème que viennent exposer les apprentis au syndicat. Unia les aide parfois à trouver une autre place.

470 francs par mois
Certaines professions sont particulièrement désavantagées au niveau des salaires. Si les apprentis du bâtiment sont couverts par des conventions collectives, ce n'est pas le cas des jeunes des autres secteurs. Les coiffeuses en 2e année ne touchent que 470 francs par mois, expliquent-elles. Mais celles que nous avons rencontrées ne s'en indignent pas: «C'est vrai que comparé aux vendeuses qui sont assises toute la journée c'est une légère injustice, mais je ne m'énerve pas, j'accepte car j'ai envie de faire ce métier», affirme Adrienne, 18 ans.
De nombreux apprentis se disent d'ailleurs satisfaits de leurs conditions de travail. L'acceptation est la règle: «6 francs de l'heure, ça va tip-top. Ça ne me dérange pas de travailler des fois le samedi», déclare dans un premier temps Romain, 17 ans, en 3e année. Puis l'apprenti en sanitaire nuance: «Bon, c'est vrai que quand on fait tout le sale boulot et qu'à côté des ouvriers qui touchent 20 francs se foulent pas, c'est rageant.» Les inégalités sont aussi parfois flagrantes entre apprentis: un jeune automaticien, engagé par le canton de Vaud, touche 1400 francs alors que son collègue du privé gagne la moitié.

Eveiller les consciences
Peu conscients et mal informés, les apprentis rencontrés ne s'en montrent pas moins réceptifs. La plupart se disent d'ailleurs prêts à contacter Unia en cas de coup dur. Aline, 16 ans, n'avait aucune idée de ce que faisait un syndicat avant de s'attarder un bon moment sur le stand, poussée par la curiosité. Apprentie en peinture sur carrosserie, son salaire de 2 fr. 50 de l'heure, en 1re année, lui paraît «correct en comparaison d'autres professions». Il faut dire qu'elle touchait 300 francs de moins par mois lorsqu'elle avait commencé sa première formation de coiffeuse. Se syndiquer? «Peut-être. Pour l'instant, il n'y a pas de problème dans l'entreprise. Et de toute façon, plus tard, je veux devenir femme au foyer. Je reprendrai le travail quand mes enfants seront grands.»
Il reste donc du pain sur la planche pour Unia. Fin septembre, les secrétaires syndicaux valaisans emmèneront leurs tracts, brochures et conventions collectives devant l'Ecole professionnelle de Martigny, où d'autres consciences seront éveillées aux droits des travailleurs...

Christophe Koessler