Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

Des milliers de salariés comptent sur Unia

Plus de 250 délégués se sont rassemblés pour la 4e journée du Congrès 2016 d'Unia

Fin octobre à Genève, le 4e Congrès d'Unia avait débattu de la Stratégie d'organisation du syndicat pour les quatre années à venir et adopté plusieurs résolutions sur des thèmes d'actualité. Faute de temps et en raison d'un nombre important de propositions à débattre, la discussion sur les grandes orientations syndicales a été repoussée à samedi dernier. 250 délégués ont participé à cette dernière journée du Congrès à Bienne.

Samedi passé, plus de 250 délégués d'Unia se sont retrouvés à Bienne, capitale mondiale de l'horlogerie comme l'a rappelé Jesus Fernandez, responsable de la région Bienne-Soleure, pour tenir leur quatrième journée du Congrès 2016. Les trois premiers jours s'étant déroulés du 27 au 29 octobre à Genève n'avaient pas permis d'épuiser les nombreux points à débattre. Forte de 120 propositions d'amendement, c'est la discussion sur les textes d'orientation du syndicat qui était à l'ordre du jour ce 3 décembre.
Avant d'entamer les débats, une assemblée des délégués ordinaire s'est brièvement réunie. Elle a adopté le budget 2017 d'Unia, et informé de la démission de la présidente militante de l'assemblée, Ursula Mattmann, qui terminera son mandat en juin prochain. L'assemblée a également fixé les objectifs 2017 du syndicat. Ces derniers sont la mise en pratique pour l'année qui vient de la Stratégie d'organisation 2020 d'Unia, décidée à Genève. Cette stratégie porte notamment sur la croissance des membres, le renforcement du rôle des militants, leur encadrement, le développement des CCT ou encore sur l'influence politique du syndicat. Sur ce point, pour 2017, les délégués ont précisé les objectifs en lien avec l'actualité. D'abord sur la réforme de la Prévoyance vieillesse 2020, où il a été ajouté qu'Unia combattra non seulement une réduction des rentes mais également la hausse de l'âge de la retraite des femmes à 65 ans. Ensuite, sur la mise en œuvre de l'initiative sur l'immigration de masse. Il a été prévu qu'Unia ferait campagne contre le dumping, pour une meilleure protection des conditions de salaire et de travail, pour des relations réglementées avec l'UE, mais aussi contre la réintégration de mesures discriminatoires et précaires et contre la préférence nationale. Un référendum pourrait être lancé dans ce cas.

Le choc Trump
«Après notre Congrès de Genève, il s'est passé des choses inquiétantes», a relevé Vania Alleva, présidente d'Unia, en ouverture des débats. «Nous avons été choqué par les élections aux Etats-Unis. Trump n'est pas seulement un type odieux, mais ce qui se passe là-bas nous concerne directement. Il y a eu la votation sur l'initiative de l'UDC le 9 février 2014, le Brexit, la montée de l'extrême droite en Allemagne, Le Pen en France. Que se passe-t-il? Le néolibéralisme est dans une situation de crise, il a échoué, créé des perdants, trop de perdants. La société est en perte de vitesse.» Vania Alleva a rappelé que les électeurs américains n'avaient guère le choix: «Clinton représentait encore une fois le néolibéralisme, et Trump s'est engagé pour les oubliés du système, des gens opposés au néolibéralisme...», a-t-elle souligné, rappelant que seule une alternative de gauche forte et solidaire pourra s'opposer à cette dérive vers la droite et à la montée des inégalités. «Nous devons trouver une autre réponse aux injustices du système néolibéral, basée sur la solidarité, et nous n'y arriverons qu'en créant un mouvement solidaire de tous les salariés. Voilà notre réponse. Cela s'accompagne de notre travail pour l'amélioration des conditions de travail et des salaires.»
«Il n'y a qu'une Unia forte qui peut s'opposer à la lutte des classes d'en haut et à la droite du Parlement», a ajouté Jesus Fernandez, appelant à des débats engagés, durables et multiples. «Plus que jamais nous avons besoin d'un syndicat fort. Il y a des milliers de salariés qui comptent sur Unia! Vive Unia, ensemble nous sommes forts!»

L'Internationale en prélude du Congrès
Le Congrès s'est ouvert avec la visualisation du film de l'action «coup de poing» menée lors du Congrès de Genève*. Les délégués ont ensuite entonné l'Internationale, sur une version italienne entraînante, annonçant le rythme avec lequel les 120 amendements aux textes d'orientation seraient passés en revue!
Ces quatre textes (voir encadrés) définissent les positions que défendra Unia d'ici à son prochain Congrès sur les questions de sécurité et de justice sociales, de la protection et de l'égalité des droits, de la conciliation travail et vie de famille, et enfin sur une alternative économique. La majorité des propositions venues des régions, secteurs ou groupes d'intérêts ont passé la rampe. Quelques-unes ont donné lieu à des discussions. Comme l'introduction d'un indice des prix d'Unia tenant compte de la hausse des primes maladie qui grève les revenus, afin que cette hausse puisse être intégrée aux négociations salariales. Cette proposition a été acceptée. Une autre, demandant de remplacer la notion de «salaires équitables» par «politique salariale», n'a pas passé la rampe. «Nous voulons rehausser les bas salaires. Les salaires équitables n'existent pas, ils ne correspondent pas au mouvement ouvrier, tout au plus au catholicisme social!» a tenté de défendre le Bernois Rolf Leisi. Un autre sujet a fait lui aussi débat, celui concernant la protection des salaires. Les Tessinois, face à la situation vécue dans leur canton, souhaitaient que les choses soient clairement dites au sujet de la corrélation entre l'accord de libre circulation des personnes et les pressions sur le marché du travail. «La situation actuelle ne nous laisse pas le choix, nous devons contrer cette politique. Il ne s'agit pas de refuser l'accord de libre circulation mais de dire ce qui est. Nous ne pouvons pas accepter que notre dignité soit piétinée ainsi», a lancé une déléguée tessinoise, n'obtenant le soutien que d'un tiers des délégués. Autre sujet débattu, celui de la protection contre les licenciements. Contrairement à l'avis du comité central, les délégués ont soutenu l'exigence d'obtenir la possibilité de réintégrer un travailleur licencié en raison de son activité syndicale dans toute modification du droit suisse à ce sujet.
Après un débat mené au pas de charge, les délégués ont adopté les quatre textes à l'immense majorité moins quelques rares abstentions.

Groupe de travail sur les retraites
Les congressistes se sont encore prononcés sur quelques autres propositions non traitées à Genève. Parmi elles, ils ont accepté la mise en place d'un groupe de travail «Prévoyance et assurances sociales» chargé d'examiner le modèle des trois piliers et de préparer des propositions d'amélioration. Une analyse distincte sera également effectuée sur la possibilité d'une fusion de l'AVS et du 2e pilier et sur les conséquences de la digitalisation sur le financement des assurances sociales. Le Congrès a aussi accepté de créer un service de coordination spécialisé dans le travail du Care, le travail d'assistance et de soins aux personnes. «Tout travail doit être reconnu à sa juste valeur», a appuyé Sylvia Segala d'Unia Valais. Sur proposition du secteur industrie, les délégués ont donné leur feu vert à la création d'un «département Economie» d'Unia. Il devrait permettre de soutenir les luttes du syndicat dans les différentes branches ou encore de développer des compétences dans le domaine de l'économie numérique. Le Congrès a également accepté de créer une «Application» Unia pour téléphones mobiles, complémentaire aux moyens de communication actuels et permettant de signaler immédiatement aux membres tous les succès, petits ou grands, du syndicat et les activités en cours. La question de la progressivité des cotisations sera aussi étudiée. Enfin, à l'avenir, les congressistes ne pourront plus adopter de proposition «pour examen». «Soit on accepte, soit on refuse. Punk-Schluss!», a résumé Alain Pesse d'Unia Vaud qui défendait la proposition.
Malgré l'avancée des travaux, les congressistes ont remis à une assemblée des délégués extraordinaire, en mars 2017, le choix de plusieurs idées phares pour l'avenir d'Unia.

Sylviane Herranz

*A voir sous: www.unia.ch/fr puis Congrès 2016, photos, films & infos.


Recommandations de vote pour le 12 février 2017
L'assemblée des délégués a adopté les recommandations de vote d'Unia pour les élections fédérales du 12 février 2017. Il s'agit de:
OUI à la naturalisation facilitée des étrangers de la 3e génération.
NON à la loi sur la 3e réforme de l'imposition des entreprises (RIE III).
OUI à l'initiative Forta (fonds pour les routes nationales et le trafic d'agglomération).


Les textes d'orientation

1.. Sécurité sociale et justice sociale

Le texte d'orientation n°1 rappelle les valeurs essentielles du mouvement syndical, soit le droit de mener une existence digne, des chances égales de réussite dans une société démocratique, et une solidarité envers ses semblables. Des valeurs inspirant la lutte pour la justice sociale et la sécurité pour toutes et tous.
Le texte fait le constat de l'accroissement des inégalités ces trois dernières décennies, dont leur ampleur rappelle la période précédant la Première Guerre mondiale, et rappelle qu'en Suisse, 1% des contribuables détient 40% de la fortune privée. Une évolution menaçant ainsi la démocratie et la promesse des mêmes chances pour tous. «Cette évolution néfaste est due aux relais politiques du capital financier qui ont instauré, sur le dos de la grande majorité de la population, une "compétition des places économiques" entre les Etats», avec comme conséquence une forte concentration des richesses aux mains de quelques-uns. La Suisse n'est pas en reste. Les entreprises baissent les salaires et licencient pour augmenter les profits des actionnaires, la concurrence fiscale entre cantons est ruineuse et ne profite qu'aux riches alors que tout un pan de services sont privatisés et que les attaques se succèdent contre les assurances sociales.
Le texte précise les engagements d'Unia en faveur de la sécurité et de l'équilibre social et liste ses revendications prioritaires: pour des salaires équitables, contre la détérioration des rentes de vieillesse et de survivants et pour un renforcement du système de répartition, développement des retraites anticipées, couverture des risques santé et maladie professionnels, formation professionnelle en cas de chômage et d'invalidité, prise en compte dans les assurances sociales des conditions de travail et de vie modernes, encouragement à la construction de logements abordables, défense du service public, des impôts équitables et un minimum vital garanti.
SH


2.. Davantage de protection et égalité des droits

Le texte d'orientation n°2 part du principe qu'indépendamment de son origine, tout travailleur et toute travailleuse a droit à des conditions de travail équitables, à un traitement digne et au respect. La lutte solidaire pour l'égalité des droits, contre l'exploitation et la discrimination est au cœur du mouvement syndical, rappelle-t-il.
Ce texte constate l'accroissement des pressions sur les salaires et les conditions de travail. Partant des avantages accordés par la libre circulation à des milliers de concitoyens dépourvus de passeport suisse, il évoque le revers de la médaille de ce traité qui permet aux employeurs de profiter sans scrupule de l'ouverture du marché du travail pour exploiter une main-d'œuvre devant trimer pour quelques francs de l'heure, dormir dans des baraques insalubres, voire rétrocéder une partie de son salaire. Le texte dénonce ces pratiques mafieuses. Les pressions s'accroissent aussi sur les jeunes et les plus de 55 ans. Et la Suisse reste la lanterne rouge en Europe en matière de protection des salariés. Le texte précise que les pressions sur les salaires et la crainte de perdre son emploi ne sont pas dues aux collègues sans passeport suisse mais à la «main invisible» du marché et aux employeurs cherchant à accroître leurs profits. Employeurs dont certains critiquent les CCT, profitent de la main-d'œuvre abondante tout en se cachant derrière la campagne antisyndicale et xénophobe de l'UDC.
Le texte rappelle les engagements d'Unia et liste les revendications: égalité des droits, procédures de naturalisation facilitées ou automatiques, protection et droits pour les réfugiés, encouragement des CCT, accroissement des contrôles et des sanctions plus dures, tenue d'un registre professionnel, limitation du travail intérimaire et de la sous-traitance, protection contre les licenciements et protection des militants, droit d'accès aux entreprises, garantie d'emploi des plus de 50 ans et lutte contre le discours attisant la haine entre les catégories sociales.
SH

3.. Un bon travail pour une vie meilleure.

Le texte d'orientation n°3 affirme que «nous travaillons pour vivre, et non l'inverse» et ajoute que de bonnes conditions d'emploi, une répartition équitable du travail et des conditions sociales permettant de concilier travail et vie privée sont au cœur de la politique des syndicats.
Le texte évoque les différentes problématiques actuelles: de plus en plus de personnes travaillent dans des conditions précaires, la flexibilisation gagne du terrain, le travail en équipe, celui du samedi et du dimanche, du soir, de nuit, se banalise. Le stress augmente et la santé des travailleurs paie un lourd tribut au décloisonnement du temps de travail. Le patronat veut assouplir les réglementations du travail, le travail à temps partiel «forcé» explose. Quelque 310000 personnes à temps partiel souhaiteraient augmenter leur activité. Les femmes, dont la moitié travaille à temps partiel et à des conditions précaires, sont les plus touchées. L'insuffisance de places d'accueil pour les enfants complique la conciliation travail et vie privée. Les soins aux proches sont assurés pour deux tiers par les femmes, et le nombre d'heures effectuées dépasse celui des heures rémunérées. Les femmes gagnent toujours en moyenne 15,1% de moins que les hommes, les charges de famille en sont d'autant plus lourdes et elles en pâtiront aussi à la retraite.
Unia s'engage en faveur d'une répartition équitable du travail et de bonnes conditions de travail. Au chapitre des revendications figurent: des garde-fous à la flexibilisation et à la fragmentation du travail, le refus de la journée de 24 heures, l'aménagement du temps de travail pour le concilier avec la vie privée, la réduction du temps de travail sans baisse de salaire, un congé parental, la prise en charge des enfants, l'égalité salariale avec une amélioration de la loi intégrant des contrôles et des sanctions, la reconnaissance du travail non rémunéré, la protection de la santé et le droit à la formation.
SH

4.. Une autre économie est possible!

Le texte d'orientation n°4 souligne que la solidarité syndicale ne s'arrête pas aux frontières nationales et ajoute: «Par notre engagement pour une économie équitable et un progrès technologique au service du bien-être des individus, nous voulons permettre à tout le monde sur terre d'accéder à une vie meilleure.»
Le texte rappelle que les inégalités sociales ont pris une ampleur insoupçonnée ces 30 dernières années: aujourd'hui, les 62 individus les plus riches possèdent une fortune privée équivalente aux 3,6 milliards de personnes les plus démunies, soit la moitié de la population mondiale. Des inégalités extrêmes causant famine, pauvreté, guerres et conduisant à la fuite de millions de personnes. «L'économie mondiale a déraillé» constate le texte. Les marchés financiers sont déconnectés de l'économie réelle et détruisent l'économie productive. Les Etats sauvent les banques avec l'argent du contribuable et la collectivité assume les risques. «Les forces déchaînées du capital» détruisent aussi les ressources naturelles et le climat. Cette évolution n'est pas inéluctable, mais le résultat de décisions politiques. La place financière suisse joue un rôle de premier plan dans ce pillage mondial en gérant un quart de la fortune placée à l'étranger. Les nouvelles évolutions numériques ouvrent aussi de nouveaux défis aux travailleurs et aux syndicats, avec les plateformes d'échanges telles que Uber ou Airbnb, l'intelligence artificielle, ou la robotisation.
Unia s'engage pour réguler et contrôler les marchés financiers, notamment avec une taxe Tobin, pour un commerce mondial plus juste, pour combler les niches fiscales et taxer les gains en capitaux en Suisse, pour que la BNS protège l'activité industrielle et l'emploi, pour une reconversion écologique et la mise en place d'un Fonds pour la production alimenté par les caisses de pension. Unia veut aussi réglementer la numérisation du monde du travail et soumettre cette nouvelle économie de partage aux CCT.
SH