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Front syndical et solidaire contre la crise

Ce thème était au coeur de la conférence de la branche de l'industrie des machines d'Unia la semaine dernière à Berne

Eviter les licenciements collectifs, renforcer les droits syndicaux et garantir aux salariés touchés par le chômage partiel l'entier de leur salaire: telles sont les exigences majeures formulées par les quelque 130 délégués de la conférence de branche d'Unia de l'industrie des machines le 15 avril dernier à Berne. Une conférence axée sur la crise et les moyens de la combattre.

Personne ne s'étonnera que la crise ait été au cœur des préoccupations des quelque 130 délégués de la conférence de l'industrie des machines (MEM), animée par Fabienne Blanc-Kühn, du comité directeur d'Unia. Et pour cause: 10000 emplois ont passé à la trappe dans l'industrie suisse ces derniers mois et les perspectives s'annoncent plutôt sombres. «Il faut s'attaquer aux causes. On ne peut pas faire du rafistolage, comme s'il ne s'était rien passé. A chaque crise, on dit qu'on va en tirer les leçons pour que cela ne se reproduise plus et au final, les bonnes intentions fondent comme neige au soleil» a déploré Renzo Ambrosetti, coprésident d'Unia. «Nous attendons de la Confédération un plan beaucoup plus ambitieux, qui soit à la mesure de la gravité de la crise. C'est au moins 7 milliards de francs qui sont nécessaires pour un plan efficace. Mais le Seco reste sous l'influence d'une bande de néolibéraux qui ne veulent pas admettre que le système qu'ils continuent à défendre a fait faillite et qu'il est temps d'apporter de profonds changements.»

Méthodes dictatoriales
La crise peut également servir de prétexte aux transgressions des règles portant sur les relations de travail. A preuve le cri d'alarme lancé par le syndicaliste Ernst Gabathuler: «Dans notre région, en Suisse orientale, on voit de plus en plus de patrons qui imposent des nouveaux contrats de travail revus à la baisse. Les salariés sont obligés d'accepter des salaires réduits, des conditions de travail inadmissibles et de renoncer à certains acquis, sans quoi on les jette à la porte. La situation est terrible. J'ai vu des gens en larmes, des gens craquer, des gens qui n'en peuvent plus. C'est la fin du dialogue social, une véritable dictature.» Le moyen de s'en prémunir? «Ne pas rester isolés, discuter entre collègues dans l'entreprise et agir ensemble, avec le syndicat», a rappelé Max Chopard, d'Unia Aarau et Zurich. Angelo Petraccaro, délégué de l'entreprise bernoise Wifag, a avoué que ce comportement dictatorial le faisait «trembler» de colère: «Nous devons nous opposer de toutes nos forces à de telles méthodes, au besoin avec des manifestations syndicales dures devant et à l'intérieur des entreprises.» Beda Moor, membre de la direction du secteur MEM d'Unia, a rappelé que le syndicat avait aussi des moyens d'intervention centraux: «Hier, je suis allé dans une entreprise de 180 personnes qui voulait licencier la moitié de son personnel. Au bout de trois heures et demie de discussion, nous avons obtenu qu'il n'y ait plus que 47 licenciements ainsi qu'un plan social. Evidemment, nous aurions souhaité encore mieux, mais sans notre intervention, la situation aurait été bien pire.» Fabienne Blanc-Kühn a pour sa part précisé qu'il n'y a pas primauté d'un moyen de lutte sur un autre: «Selon la situation, il peut y avoir besoin d'une mobilisation syndicale ou alors d'un simple dialogue ouvert, dans d'autres cas, les moyens doivent être combinés. Mais dans toutes les circonstances, si l'on veut être efficace, il faut qu'il y ait une pression du personnel dans l'entreprise.»
Dans le débat autour de la résolution, le secrétaire syndical d'Yverdon Pierre-André Charrière a fait l'unanimité des délégués sur sa proposition d'exiger des employeurs qu'ils compensent pleinement la perte de salaire liée au chômage partiel et de poser des conditions aux patrons qui recourent à la réduction de l'horaire de travail (RHT). «Certains employeurs jurent qu'ils ne peuvent pas appliquer la RHT. Ils licencient et se permettent ensuite de demander la RHT. Les travailleurs se voient ainsi doublement pénalisés», a-t-il souligné.

Pierre Noverraz



Renforcer les droits des travailleurs

Les délégués à la conférence ont adopté la résolution suivante à l'unanimité:

·    En lieu et place de licenciements, les employeurs doivent mettre en place d'abord des réductions d'horaire de travail. Il ne devra y avoir aucun licenciement avant ou pendant le recours au chômage partiel. Il faut au contraire prévoir des mesures de perfectionnement du personnel pendant de telles périodes. Le Seco est invité à lancer au plus vite une offensive ciblée de formation continue. En outre, les entreprises sont invitées à combler elles-mêmes les pertes de salaire non compensées par l'assurance chômage.

·    Afin d'éviter le chômage des jeunes, il faut garantir par des allocations d'initiation au travail qu'ils puissent rester employés, au-delà du certificat de fin d'apprentissage, dans les entreprises de l'industrie suisse des machines.

·    Swissmem doit veiller à écarter autant que possible, comme le prévoit la CCT de branche, tout licenciement précipité par un travail d'information mené à temps et avec la participation des syndicats. Il incombe ainsi aux employeurs d'accorder des délais de consultation suffisants afin de permettre l'examen des alternatives existantes.

·    Il faut interdire les licenciements collectifs sans plan social. En outre, les plans sociaux doivent impérativement être négociés avec les partenaires sociaux.

·    Il n'est pas autorisé de licencier les membres de représentations des travailleurs, qui assument une tâche particulièrement lourde de responsabilités lors de telles crises économiques. Au contraire, il faut leur accorder une protection absolue contre le licenciement afin qu'ils puissent exercer pleinement leur fonction.

La conférence de branche exige en outre du Conseil fédéral qu'il réponde aux revendications politiques transmises à la conseillère fédérale Leuthard lors de la manifestation de l'industrie du 9 mars à Berne. Les 600 délégués et déléguées de l'industrie d'Unia ont invité ce jour-là le Conseil fédéral à prendre enfin les mesures qui s'imposent pour combattre la crise économique, ainsi qu'à adopter sans tarder un troisième train de mesures conjoncturelles d'un montant d'au moins 5 milliards de francs.