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Le monde à l’envers…

Dans quel monde vivons-nous? En mars 2020, le Covid-19 semait la pagaille en Suisse comme ailleurs dans le monde. Durant de longues semaines, puis de longs mois, le personnel de santé a été fortement sollicité pour faire face aux urgences et à l’engorgement des hôpitaux. Tous les soirs, la population confinée se massait aux fenêtres, sur les balcons, pour applaudir ces infirmières et ces infirmiers, ces aides-soignants, ces médecins et tous les employés du secteur appelés à sauver des vies.

L’année suivante, en novembre 2021, ces gestes de solidarité et de reconnaissance se sont traduits par un véritable plébiscite dans les urnes: 60,98% du peuple suisse acceptait l’initiative populaire «Pour des soins infirmiers forts», contre l’avis du Conseil fédéral. Après le vote, ce dernier a rapidement communiqué qu’il serait difficile de mettre en œuvre la partie portant sur les conditions de travail et la dotation en personnel… Ce volet est pourtant d’une cuisante actualité. Le taux d’absentéisme dans les hôpitaux et les institutions de santé, couplé à une surcharge de travail, pousse le personnel à bout.

La semaine dernière, l’Hôpital fribourgeois (HFR) adoptait son budget pour 2022, annonçant un déficit de 15,7 millions, à combler par… la suppression de 60 postes de travail! On croit rêver. La pandémie est-elle terminée? Les soins intensifs inoccupés? Le personnel miraculeusement au top de sa forme? Rien de tout cela. Seule une logique implacable. Celle de la financiarisation du système de santé. Avec des hôpitaux mis en concurrence les uns par rapport aux autres, les institutions publiques contre les privées, et des objectifs qui n’ont rien à voir avec la santé de la population. La preuve? Alors que tout est mis en œuvre pour l’accueil des malades du Covid, qui occupent plus longuement les lits, des opérations «électives» sont repoussées. Ce qui provoque un trou dans les budgets, faute de rentrées dues à ces interventions. Le patient devient client, acheteur de prestations. C’est le monde à l’envers! On croyait le service public hospitalier chargé de soigner la population. Or ce sont uniquement les coûts qui président aujourd’hui aux décisions politiques. Avec comme conséquence la suppression d’emplois pourtant plus nécessaires que jamais.

C’est la logique implacable d’un système de santé soumis à la loi du marché. La restructuration à venir à Fribourg est également le résultat d’une cure d’austérité, le Canton n’ayant pas adapté ses contributions à l’hôpital ces dernières années, malgré des besoins accrus. Les caisses de l’Etat sont vides? C’est le résultat de ces millions et même milliards de francs de cadeaux fiscaux offerts aux entreprises et à leurs actionnaires durant les décennies passées. Des actionnaires qui par ailleurs n’ont aucune honte à profiter de la pandémie pour s’enrichir alors que la pauvreté s’accroît.

Pour remettre la santé des patients et de la population au cœur du système, il est nécessaire de changer cette logique financière. Et de stopper l’hémorragie des caisses de l’Etat provoquée par une fiscalité allégée pour les plus riches. Le 13 février prochain, il sera possible de dire Non à la suppression du droit de timbre, ce nouveau cadeau qui viderait les caisses de la Confédération de 250 millions par année, sans compter les répercussions cantonales. S’y opposer c’est aussi bloquer d’autres privilèges annoncés pour près de 2 milliards de francs. Autant d’argent qui doit revenir au système de santé, à la majorité de la population, plutôt que de finir dans les coffres de quelques millionnaires!