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Le référendum contre l'arnaque RIE III est sous toit

Opposés à la 3ème réforme de l'imposition des entreprises la gauche et les syndicats ont récolté plus de 75000 signatures

La troisième réforme de l'imposition des entreprises RIE III a pour objectif de supprimer dès 2019 les statuts fiscaux spéciaux accordés aux sociétés étrangères. Mais une coalition référendaire dénonce un projet déséquilibré, qui pèsera près de 3 milliards dans les budgets de la Confédération et des cantons, soit le prix des cadeaux fiscaux accordés aux actionnaires des entreprises.

Le référendum contre la troisième réforme de l'imposition des entreprises (RIE III) est sous toit. Une vaste coalition réunissant partis de gauche et syndicats a récolté plus de 75000 signatures et 55000 paraphes authentifiés ont été déposés jeudi dernier à la Chancellerie fédérale. Qualifiée «d'arnaque» par le comité référendaire, la RIE III devrait être soumise en votation le 12 février 2017.

3 milliards de pertes fiscales
Engagée après des pressions de l'Union européenne et de l'OCDE, la RIE III a pour objectif de supprimer à l'horizon 2019 les statuts fiscaux spéciaux accordés par les cantons aux entreprises étrangères installées dans notre pays. Que les multinationales s'acquittent du même taux d'imposition que les sociétés suisses n'est pas une mauvaise chose, c'est dans les modalités que la réforme pèche. Aucun instrument n'est en effet prévu pour limiter la sous-enchère fiscale intercantonale, comme un taux plancher d'imposition. Selon l'Administration fédérale des finances, le taux moyen d'imposition du bénéfice des entreprises devrait passer de plus de 20% à moins de 16%. Sous prétexte d'un possible exode fiscal des multinationales, plusieurs cantons, dont Vaud, Fribourg et Genève, ont déjà annoncé leur intention de le réduire, diminuant d'autant les impôts des entreprises suisses. Des pertes fiscales abyssales en seront la conséquence. L'ancienne conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf, qui a concocté la réforme, a imaginé que la Confédération prenne en charge une partie de ces pertes. Au final, il en coûtera au moins 1,3 milliard à la caisse fédérale et autant, voire plus, aux cantons. Et même à certaines communes qui devront faire face à des reports de charge. «Si l'objectif initial de la RIE III de combler les lacunes fiscales et d'établir un régime fiscal plus équitable est à saluer, le camp bourgeois a abusé de la réforme pour accorder des cadeaux fiscaux aux entreprises et grands actionnaires», juge la présidente d'Unia, Vania Alleva.

Nous devrons tous payer
Pour compenser les pertes fiscales, les collectivités publiques devront s'endetter, réduire les dépenses ou augmenter les taxes et les impôts des personnes physiques. «Nous devrons tous payer pour cette réforme à travers des augmentations d'impôts, plus de taxes ou encore des réductions de prestations», souligne Vania Alleva. «Que nous soyons ouvrier dans l'industrie, infirmière, vendeuse, chauffeur de car postal ou employé municipal, il faut s'attendre à une augmentation de nos impôts. De même que des coupes dans l'aide aux crèches, une hausse du prix d'entrée des piscines ou encore de la taxe au sac. Voilà pourquoi Unia a participé au référendum et va se battre contre cette arnaque.»

Nouveaux privilèges
Cerise sur le gâteau, si la RIE III est censée abolir les privilèges fiscaux, elle va créer dans la réalité de nouvelles possibilités d'échapper à l'impôt pour les grands groupes et les actionnaires. Un système de déclaration des réserves latentes permettra aux sociétés étrangères de passer d'un statut spécial à une imposition ordinaire ou de s'établir en Suisse sans hausse immédiate de leur charge fiscale. De nouvelles patent box offriront une imposition préférentielle sur les revenus provenant des brevets, des licences et des droits d'auteur. Les cantons auront aussi la possibilité de relever les déductions accordées pour les dépenses consacrées à la recherche et au développement, ainsi que de déduire les coûts des emprunts.
Le peuple a maintenant la possibilité de renvoyer à l'expéditeur le paquet RIE III, jugé non sans raison comme une arnaque par les référendaires.

Jérôme Béguin