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Pour un réveil de la gauche

Après l'échec des dernières élections fédérales, il est temps de réagir, estime Jean-Claude Rennwald dans son nouveau livre

La gauche s'est endormie. Et elle l'a payé cher. Par une cuisante défaite lors des élections fédérales d'octobre 2007, qui ont vu le Parti socialiste suisse (PSS) passer au-dessous de la barre des 20% des voix, l'un de ses pires scores depuis 1919... Les Verts sont sortis renforcés de ces élections, mais le grand vainqueur est avant tout l'UDC, qui devient le plus grand parti de Suisse. Partant de ce constat, Jean-Claude Rennwald, conseiller national socialiste depuis 1995 et responsable de l'horlogerie à Unia, lance dans son dernier ouvrage un vibrant appel à la remise en question de la politique de certains socialistes et à l'ouverture d'un large débat dans tous les courants de la gauche et dans les syndicats. Le socialiste pose des jalons pour qu'en 2011, date des prochaines élections fédérales, la gauche accède enfin au pouvoir.
Dans son livre, intitulé Quand la gauche s'éveillera. De l'échec à la reconquête, il analyse la montée en puissance de l'UDC qui, par son discours populiste et démagogique, a conquis une bonne partie de l'électorat ouvrier, délaissé par un Parti socialiste plus occupé par la défense des intérêts de la classe moyenne, se détournant même de ses électeurs traditionnels en s'alignant, dans certains cantons, sur une politique sociale-libérale, blairiste, fustigée par Jean-Claude Rennwald. Ce courant a par exemple défendu le libre choix de l'école entre le public et le privé et l'ouverture des commerces le dimanche dans les gares. Un mépris à l'égard des classes populaires qui est aussi l'une des causes de la défaite socialiste, estime le conseiller national. Pour preuve, c'est dans les cantons de Zurich et de Berne où ce courant est majoritaire, que le PS a perdu le plus de sièges alors qu'à Fribourg, Vaud ou dans le Jura, où les liens avec le mouvement syndical sont étroits, le PS a fait de bons résultats. Autre élément de la défaite, la participation des socialistes au Conseil fédéral qui à plusieurs occasions a discrédité la politique du PS. Cette participation, comme la paix du travail absolue, a facilité l'endormissement de la gauche, écrit l'auteur.

Constats et espoirs
Jean-Claude Rennwald replace l'affaiblissement du PSS dans un mouvement plus large de perte d'influence des partis sociaux-démocrates en Europe. Mais il garde l'espoir et se tourne vers des modèles venus tant des pays nordiques que du Sud, de l'Amérique latine et du Venezuela en particulier. Loin des discours théoriques et ennuyeux, c'est au travers d'exemples concrets, issus de voyages, de rencontres, ainsi qu'avec la mise en perspective de chiffres évocateurs, que l'auteur développe ses propos et son analyse.
A partir de ce bilan, il propose dix réformes pour 2012, date à laquelle «la gauche gouvernera». Ces réformes se déclinent en de nombreuses revendications portant sur l'établissement d'une économie basée sur le social, les droits des travailleurs, les droits démocratiques ou encore la nécessité d'une Suisse ouverte sur le monde. A ce titre, l'Européen convaincu qu'est Jean-Claude Rennwald constate une dérive néolibérale de l'Union européenne, avec par exemple la remise en cause de la directive temps de travail ou les arrêts de la Cour européenne de justice qui légitiment le dumping social. Il considère néanmoins que la place de la Suisse est au sein de l'Union et demande que la question de l'adhésion soit réactivée.

Renouer avec la prise de risque
Reste à savoir comment arriver à prendre le pouvoir pour réaliser les réformes proposées. Par «une modification des rapports de force dans notre pays», répond Rennwald qui appelle à ce que le PSS redevienne une force combative, renoue avec la prise de risque, et tranche sur la question de sa participation au Conseil fédéral ou du moins sur les conditions de sa participation. Il faut aussi que les syndicats se renforcent, que les mouvements sociaux et associatifs «se multiplient et cultivent leur imagination», et que «les forces progressistes et populaires, tout en gardant leur identité, tendent à la plus grande et à la plus large unité possible».
«Et si la gauche réessayait? Et si la gauche se réveillait?» conclut l'auteur. Le débat est lancé. A l'heure où la crise économique montre les limites du système, à l'heure où la gauche, lorsqu'elle ne dort pas, est en plein questionnement, il mérite d'être mené!

Sylviane Herranz