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Prévenir les risques psychologiques

Marc Roethlisberger portant une poule.
© DR

En phase avec son engagement. Marc Roethlisberger de passage dans une ferme certifiée bio.

Ancien économiste, psychologue et formateur d’adultes, Marc Roethlisberger vient de publier un livre utile au bon déroulement d’ateliers de sensibilisation à l’écologie

Le 28 septembre 2019 restera gravé dans la mémoire de Marc Roethlisberger. Ce jour-là, plusieurs dizaines de milliers de personnes manifestent à Berne pour le climat. L’ancien économiste – qui a réorienté sa carrière vers le développement durable, la communication non violente et décroché en 2017 un master en psychologie clinique et du travail et des organisations – se joint à la mobilisation. Un événement particulièrement important sur le parcours de ce Fribourgeois de 53 ans qui prend alors pleinement conscience des menaces qui pèsent sur le monde. Et ressent de l’éco-anxiété. «J’ai eu un déclic», commente Marc Roethlisberger qui, à la suite de ce «réveil», décide de se spécialiser sur ces questions, participant, puis animant des ateliers de sensibilisation à l’écologie. Des espaces où la thématique, plus que le partage d’informations scientifiques, est abordée à travers le prisme des émotions et du changement intérieur. Aujourd’hui, cet homme qui a toujours soutenu le parti des Verts, publie Prévention des risques psychologiques lors d’ateliers de sensibilisation à l’écologie. Un manuel qui s’appuie sur la méthode du «travail qui relie» développée par l’écophilosophe américaine Joanna Macy dans les années 1970.


A qui s’adresse votre livre et quels objectifs poursuit-il?

Il est destiné aux facilitateurs déjà actifs ou en devenir ainsi qu’aux participants d’ateliers de sensibilisation à l’écologie. Ce manuel vise à favoriser leur bon déroulement par le biais de conseils et d’outils pratiques propres à assurer et à préserver un sentiment de sécurité et de bien-être psychologique pour tous. Il s’agit d’éviter les écueils qui peuvent survenir, le «travail qui relie» se basant sur l’exploration des émotions, aussi celles qui sont désagréables.

En quoi consiste plus précisément cette méthode?

Il s’agit d’une démarche collective qui comprend quatre étapes tendant à soutenir les personnes dans leur engagement et à les aider à digérer leurs émotions. La première phase se fonde sur la gratitude pour la nature. Les participants la remercient pour ce qu’elle nous offre: nourriture, beauté des paysages, animaux, etc. Ils sont ensuite invités à reconnaître et à exprimer leur tristesse, colère, déception, souffrance, angoisse, frustration, face à la crise climatique, la perte de la biodiversité, l’extinction de masse des espèces, la pollution... La troisième étape propose un changement de regard et la prise de conscience de l’interconnexion entre tous les êtres vivants. Nous sommes tous reliés, au-delà des frontières, aux générations antérieures, actuelles et futures. La coopération et la solidarité sont gages de succès. Contrairement à ce que laisse entendre le capitalisme, cette illusion de l’esprit qui, promouvant concurrence et compétitivité artificielles, veut vous faire croire que vous êtes seuls. Enfin, on procède à la définition d’un plan d’action, individuel ou collectif. Extinction Rebellion propose aussi des ateliers qui relient à ses membres, ces héros de demain.

Quels risques peuvent survenir lors des ateliers?

Ils peuvent être de nature variée: décompensations psychiques, conflits entre les personnes, jugements au détriment de la bienveillance, débordements émotionnels alimentés par des effets de groupe, crises d’angoisse, etc. En travaillant sur des émotions désagréables, il arrive par ailleurs que des personnes confient des détresses sans rapport avec l’environnement. Je me souviens par exemple d’une femme qui a témoigné d’abus sexuels qu’elle avait subis. Or, ce n’est pas vraiment le lieu adapté à ce type de témoignages, l’atelier n’a pas une vocation thérapeutique explicite. Le facilitateur doit dès le départ bien fixer le cadre de sécurité. Il doit apprendre à décoder les débordements émotionnels risqués, rappeler à chacun le droit de dire stop, reconnaître la gravité de certaines situations et, à la fin de l’atelier, inviter au besoin des personnes à s’adresser à un professionnel. Il a aussi plusieurs outils à sa disposition, comme la méditation en pleine conscience, susceptible si nécessaire de calmer le jeu, de permettre un recentrage, d’offrir une plage où les choses exprimées sont digérées.

Qui fréquente ces réunions?

Les participants sont majoritairement jeunes, même s’il y a aussi des quinquagénaires et des sexagénaires, avec un bon niveau d’éducation. La plupart sont des citadins convaincus par l’importance et l’urgence de la situation, avec le cœur plutôt à gauche. Nombre d’entre eux s’engagent déjà dans leur vie: signatures de pétitions, manifestations, etc. Il est difficile d’attirer des personnes de cercles différents. Je rêverais d’organiser des ateliers pour du personnel d’entreprise, des migrants, des banquiers, des cadres. Plusieurs de mes connaissances appartenant à cette dernière catégorie me félicitent pour la démarche, mais ne viennent jamais...

Vous êtes membre d’Unia. Le syndicat a-t-il un rôle à jouer dans la transition écologique?

Oui, en soutenant la formation, la formation continue et la reconversion professionnelle dans des domaines particulièrement polluants. Dans le secteur du bâtiment par exemple, source d’importantes émissions de CO2, il existe un fort potentiel d’amélioration notamment en matière d’isolation.

Vous adhérez à la théorie de l’effondrement?

C’est une réalité, mais je parlerais plutôt de redimensionnement progressif. Il nous faut faire l’apprentissage d’une simplicité volontaire – mon maître mot – sinon elle sera imposée par la situation et l’Etat.

Concrètement, que faites-vous?

Je ne possède pas de voiture. Je ne prends plus l’avion – la dernière fois c’était en 2005. Je consomme très peu de viande et, surtout, j’essaie d’aborder la transition écologique dans la joie et la bonne humeur. J’apprécie en particulier de passer du temps avec des amis, de manger bio, de faire du yoga et de la méditation en pleine conscience, de danser... Je suis un adepte de la sobriété heureuse défendue par Pierre Rabhi. J’ai aussi pour référence Martin Luther King, qui a dit: «Nous devons apprendre à vivre ensemble en tant que frères ou périr ensemble en tant que fous.»

Prévention des risques psychologiques lors d’ateliers de sensibilisation à l’écologie, Editions Le souffle d’or, 2021, 64 pages, disponible en librairie au prix de 14,50 francs.

Davantage d’informations ici.

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