De la fourche à la fourchette, ébranlés par plusieurs scandales alimentaires, les consommateurs s’inquiètent de plus en plus du contenu de leur assiette. Mais aussi des modes de production. De l’impact sur la nature. Du traitement réservé aux animaux de rente. Une préoccupation qui s’exprime dans différentes initiatives populaires. Le 23 septembre, la population sera ainsi appelée à se prononcer sur deux textes relatifs à la thématique. L’un promeut la souveraineté alimentaire, une agriculture de proximité, une rémunération correcte des travailleurs du domaine, une nourriture sans OGM, des droits de douane sur l’importation et une régulation des volumes.
Sur fond de changements climatiques, de disparition de la biodiversité, de surexploitation des sols, l’autre mise sur une production transparente tenant compte de l’environnement, des humains et des bêtes. Et plaide également en faveur d’aliments sains, produits dans des conditions écologiques et équitables, comme du respect de normes de qualité et de durabilité pour les denrées provenant de l’étranger.
Soumis prochainement aux urnes, ces deux objets, aux sensibilités similaires, précèdent encore d’autres projets également à teneur agricole (pesticides, eau potable). Autant dire que l’intérêt pour ces questions, pur bon sens, ne cesse de gagner du terrain. N’en déplaise aux opposants de tous bords dénonçant, concernant les textes soumis aux urnes, un diktat alimentaire, une perte des variétés sur nos étals, des exigences écologiques et sociales exagérées, une soviétisation de l’agriculture ou encore des entraves aux traités de libre-échange. Une fronde qui espère surtout faire mouche en prédisant une augmentation des prix. Jouant sur la peur et l’épaisseur du portemonnaie. Sans tenir compte des coûts sanitaires, sociaux et environnementaux liés à une nourriture industrielle et à l’agriculture intensive. Sans ce soucier des problèmes de pollution et de surproduction. Sans égard pour une qualité qui doit primer sur la quantité alors que, s’il faut envisager des économies, c’est bien contre le gaspillage qu’il faut agir. 30% des denrées terminent dans les poubelles! Bref, un manque de vision parfaitement irresponsable des adversaires de ces initiatives incapables de prendre le pouls d’une population qui pourtant manifeste déjà aujourd’hui sa volonté de changement. Les distributeurs l’ont d’ailleurs bien perçu, eux qui ne cessent de vanter un assortiment local, de mettre en avant des images d’une nature bucolique, de paysans et d’animaux heureux. Beaucoup de poudre aux yeux alors que trois fermes disparaissent chaque jour en Suisse; que des légumes espagnols cultivés par des esclaves ou presque parviennent dans les rayons; que la maltraitance animale reste une triste réalité; que des poulets aux antibiotiques du Brésil figurent sur la carte de certains restaurants; que les traités en négociation visent à ouvrir plus largement le marché à des denrées malsaines comme l’huile de palme... Aux Suisses de savoir s’ils veulent dès lors donner une impulsion supplémentaire en votant oui à des initiatives œuvrant en faveur d’un avenir nettement plus alléchant...