La faîtière des syndicats a réalisé une étude comparative des coûts et des prestations de l’AVS et de ceux de la prévoyance privée. Les résultats sont imparables et appellent à un renforcement du 1er pilier
Haro sur le 3e pilier! Alors que les assureurs et les banques redoublent d’efforts publicitaires pour attirer des souscripteurs à un 3e pilier, soutenus en cela par des élus de droite qui proposent d’augmenter les possibilités de déduction fiscale dans ce pilier (voir encadré), l’Union syndicale suisse a présenté une étude sur les avantages de l’AVS.
Cette recherche montre en quoi notre assurance sociale permet aux jeunes salariés d’aujourd’hui de cotiser beaucoup moins pour toucher la même rente que s’ils disposaient uniquement d’une prévoyance privée telle que celle du 3e pilier. Rappelons que le système des retraites en Suisse repose sur deux piliers obligatoires: l’AVS (1er) et la LPP (prévoyance professionnelle constituant le 2e pilier); et sur un 3e pilier facultatif. Ce dernier est une assurance privée individuelle permettant à ceux qui en ont les moyens d’épargner afin de compléter leur revenu au moment de la retraite.
Hausses de cotisations énormes pour les jeunes actifs
Sur la base des conditions de travail actuelles de jeunes ayant cotisé pour la première fois en 2019 pour les hommes et en 2020 pour les femmes, à l’âge de 21 ans, l’USS a comparé ce que ces salariés devraient payer à l’AVS ou à un 3e pilier durant toute leur vie professionnelle pour obtenir une rente identique. Le résultat est sans appel.
Un vendeur assuré uniquement de manière privée payerait 488 francs de cotisations supplémentaires par mois, ou 257886 francs de plus durant toute sa carrière, pour toucher l’équivalent d’une rente AVS. Une assistante en soins devrait, elle, débourser 571 francs de plus (294580 francs au total). Un constructeur de routes 432 francs supplémentaires tous les mois (228198 francs au total). Même des professionnels au revenu confortable, comme une médecin-cheffe, auraient à payer davantage, soit 475 francs de plus par mois pour cette doctoresse (245000 francs au total).
L’étude montre qu’une femme seule gagnant un revenu médian verse quelque 300000 francs au total à l’AVS pour toucher une rente du 1er pilier. Pour percevoir la même rente selon le seul système de prévoyance privée, elle devrait débourser 250000 francs de plus, soit environ 550000 francs (plus de 80%). Pour les hommes seuls, travaillant un an de plus, ce surcoût serait de 67%.
Trois fois plus cher pour une famille
Ces premiers chiffres concernent des femmes et des hommes seuls et sans enfants. L’étude présente aussi les résultats pour une famille avec deux enfants. Ainsi, un couple formé d’un magasinier et d’une assistante en soins devrait débourser 1006 francs de plus par mois, ce qui représente un supplément de 531116 francs, pour toucher la rente qu’il obtiendrait avec l’AVS. Même topo pour un infirmier et une animatrice qui devraient payer 788 francs de plus par mois (416089 francs au total). Par ailleurs, l’AVS offre des bonifications pour les tâches éducatives permettant de suppléer une diminution ou une interruption de l’activité professionnelle quand la famille s’agrandit. Ce qui n’est pas le cas dans la prévoyance privée. Dès lors, les contributions devraient être plus élevées pour compenser ces périodes. Selon les calculs de l’USS, pour un couple avec deux enfants et un revenu moyen, une rente financée de façon privée serait 350% plus chère qu’avec l’AVS.
Renforcer l’AVS avec une 13e rente
Le point de départ de l’USS pour la réalisation de cette étude est le sombre avenir annoncé dans la prévoyance vieillesse, avec des rentes du 2e pilier «en chute libre depuis plus d’une décennie» et des rentes AVS qui ne suffisent pas pour vivre. «Un problème socioéconomique majeur pour les gens qui travaillent, et qui doit impérativement être résolu», note la faîtière dans son rapport. Forte des résultats de la recherche, l’USS préconise de renforcer l’AVS et de couper court à la volonté des assureurs vie et des banques de proposer aux salariés un 3e pilier, très cher, pour compenser les baisses de rente. Pour cela, la faîtière des syndicats compte sur l’initiative populaire fédérale pour une 13e rente AVS qu’elle a déposée fin mai à la Chancellerie. Cette initiative permettrait d’augmenter la rente annuelle de tous les retraités de 8,3%. Le financement de cette 13e rente coûterait, pour une personne seule ayant un revenu moyen, 45 francs par mois. Si l’équivalent de cette 13e rente était financé par le 3e pilier, il en coûterait 176 francs par mois pour une femme et 144 francs pour un homme. Soit trois à quatre fois plus!