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Assez joué avec l'argent des assurés

La baisse du taux de conversion n'est pas nécessaire. Une étude le prouve

A mi-parcours de la récolte de signatures sur le référendum contre la baisse du taux de conversion du 2e pilier, 35'000 signatures sur les 50'000 nécessaires ont d'ores et déjà été réunies par Unia. De nombreuses autres organisations se sont jointes à la campagne, mais il n'est pas temps de baisser la garde, car l'enjeu est de taille. La baisse du taux de conversion à 6,4%, couplée aux autres mesures attaquant le 2e pilier, conduira à une baisse de plus de 10% des rentes. Vendredi dernier à Berne, Unia a apporté des éléments nouveaux à la campagne et présenté ses nouvelles exigences.
«La prévoyance professionnelle est une assurance sociale. Elle ne saurait constituer en même temps un business lucratif pour les assureurs vie et les sociétés financières», a relevé Rita Schiavi, membre du comité directeur d'Unia, après avoir dénoncé les «bénéfices éhontés» engrangés par ces assureurs sur le dos de leurs assurés. Des assureurs qui gèrent les avoirs de la moitié des 3,5 millions de travailleurs et retraités de Suisse, et le cinquième des 600 milliards de la prévoyance professionnelle totale, le solde étant géré par des institutions de prévoyance autonomes ou publiques. «En 2007, les compagnies d'assurance ont encaissé près de 20 milliards de francs de cotisations et ont empoché 2 milliards sous forme de bénéfices et de frais», a fustigé la syndicaliste dénonçant aussi les rendements énormes promis par les assureurs à leurs actionnaires - jusqu'à 16%! Non contents de s'enrichir, les assureurs vie se plaignent de ne pas pouvoir garantir à leurs assurés un taux de rémunération de 4%. Ils ont obtenu du Conseil fédéral son abaissement à 2%. Puis la baisse du taux de conversion par le Parlement...  

En 24 ans, une performance de plus de 4,5%
Or cette baisse du taux de conversion ne repose sur aucune hypothèse sérieuse et vérifiable. C'est en substance la conclusion à laquelle arrive Jacques Grivel, ingénieur et spécialiste en prévoyance professionnelle. Patron de Fundo à Morges, société de gestion et de conseil pour les institutions de prévoyance, Jacques Grivel a présenté une étude basée sur les 24 ans d'existence de la LPP, une dimension sur le long terme indispensable à toute prévision en la matière. Selon cette étude, «les caisses de pension ont réalisé, ces 24 dernières années, une performance médiane supérieure à 4,5%, 2008,  année de crise, y compris. Si le taux de conversion était abaissé à 6,4%, cela reviendrait à projeter une performance moyenne de 2,8%, ce qui n'est pas réaliste au regard des 24 dernières années», a-t-il relevé. «Même si l'on se basait sur des projections pessimistes à long terme, avec des rendements à 3,6%, les rentes actuelles pourraient continuer à être garanties avec le taux de conversion de 6,8%» (taux qui sera en vigueur dès 2014, ndlr). Pour Jacques Grivel, un taux de 6,4% conduira directement à une paupérisation de la population. Face aux assureurs qui réclament un abaissement des risques, il défend au contraire une prise de risques mesurée, rentable sur le long terme.  

Interdiction des hedge funds!
Aldo Ferrari, secrétaire régional d'Unia Vaud, a tiré la sonnette d'alarme sur les mesures d'assainissement prises par de nombreuses caisses, avec par exemple un taux de rémunération des avoirs ramené à 0%, la hausse des cotisations ou la baisse des rentes en cours. «La Confédération garantit les produits toxiques de la plus grande banque de Suisse alors que les caisses de pension vont faire payer aux assurés les pertes dues à ces mêmes produits. C'est un scandale!» s'est exclamé le syndicaliste. Il a annoncé qu'Unia exigeait du Conseil fédéral un moratoire sur l'assainissement des caisses jusqu'en 2011, et qu'à partir de 2012, si les caisses sont toujours en possession de ces produits toxiques, le syndicat demanderait à la Confédération de les prendre en charge comme pour l'UBS. Une «task force» avec des experts indépendants désignés par les partenaires sociaux doit aussi être mise en place, estime le syndicat qui réclame encore un retour en arrière sur la révision de l'Ordonnance sur la prévoyance professionnelle. Cette dernière autorise désormais les caisses à investir jusqu'à 15% de leurs avoirs dans des hedge funds et autres produits toxiques et abaisse de 50% à 30% la part destinée à l'immobilier. Unia demande encore l'interdiction dans la prévoyance professionnelle du prêt de titres à des banques et celle des hedge funds. «Ce n'est pas aux retraités, aux travailleurs, aux employeurs, de payer le prix de ces placements criminels», a tonné Aldo Ferrari.

Sylviane Herranz

Davantage d'informations: www.unia.ch