Dans la peau... de Zoltan
Mardi 23 octobre 2007
Caricaturiste pour L'Evénement syndical, Zoltan Horvath est aussi réalisateur. Son dernier court métrage a été nominé à Venise
Casquette de marin vissée sur la tête et pantalon orange, Zoltan Horvath, l'un des caricaturistes de L'Evénement syndical, se raconte: «Je ne me considère pas comme un artiste engagé, même si je suis de gauche.» Le dessinateur se bat en revanche au quotidien pour développer un art exigeant, échappant aux sirènes commerciales, et surtout, qui ait du sens. Le festival du film de la Mostra de Venise ne s'y est pas trompé en nominant, le mois passé, son dernier court-métrage, «Dans la peau», œuvre d'une rare beauté et dérangeante, à mi-chemin entre le cinéma et le film d'animation*.
Symbolique du tatouage
L'auteur y réalise des prouesses. Il parvient à mettre en scène les ébats amoureux d'un couple en 11 minutes, sans faire un film érotique, ni obscène. Son joker: le dessin, qui agit comme un filtre. En fait, il s'agit plus exactement de tatouages. Zoltan les fait évoluer sur le corps des acteurs. Il les a choisis en fonction de leur symbolique et de leur portée sensuelle. Il y a d'abord une petite sirène, fil rouge de l'histoire: «J'ai voulu revisiter à ma manière le mythe de la sirène et du marin, de façon décalée.» Y figurent aussi un dragon et son crachat ardent, une pieuvre, un lézard ou encore un sagittaire, qui décochera sa flèche au paroxysme du plaisir. La performance du film tient aussi à la technique utilisée qui marie images réelles et animation, composé de dessins animés et de personnages virtuels en 3 D. «Ce court-métrage aurait été inimaginable il y a encore cinq ans», précise le réalisateur d'une quarantaine d'années.
L'art exploiteur
Au final, c'est aussi à une modification de l'imaginaire que Zoltan travaille: «Si cela peut faire réfléchir sur la manière de représenter l'acte sexuel au cinéma...», espère-t-il secrètement. «Je fais partie de ces gens qui résistent aux courants dominants. Il m'importe plus de changer le regard de dix personnes que de conforter celui d'une centaine.»
Sensible aux questions syndicales, le réalisateur confie un seul regret: ne pas avoir pu rémunérer convenablement l'ensemble des collaborateurs du film: «Dans le métier, on nous donne jamais les moyens de nos projets. On dispose d'un budget très serré, on doit faire avec...» Et d'estimer à environ le double les montants dont il aurait eu besoin pour tourner son court-métrage dans les règles de l'art... syndical. Lui-même a perdu de l'argent pour réaliser «Dans la peau», même si celui-ci a déjà reçu une reconnaissance internationale, à l'instar de son avant-dernier court-métrage «Nosferatus Tango», couronné d'une vingtaine de prix. Rien d'étonnant, dans ce contexte, que Zoltan ne puisse vivre du cinéma. Aussi, en parallèle, il enseigne et vend des illustrations.
Aujourd'hui, Zoltan Horvath souhaite tourner un long-métrage. Mais pas à n'importe quelle condition. Il s'interroge sur la politique de l'Office fédéral de la culture, et sur son concept de «films populaires de qualité»: «Est-ce que cela signifie qu'avant on faisait du cinéma élitiste de m...?», s'indigne Zoltan qui craint que l'on impose des objectifs commerciaux aux auteurs. Cela ne l'empêche toutefois pas de rêver. Porter sur grand écran le livre «La vie des insectes», de Victor Pelevine, fait partie de ses ambitions.
Dérision hongroise
Et la caricature dans tout ça? «J'aime donner mon avis sous forme imagée.» Dans un style qui insiste davantage sur le dessin que le texte, contrairement à d'autres dessinateurs de presse comme Hermann ou Mix et Remix, relève-t-il. «Ma patte, c'est la création d'univers complexes, et je joue beaucoup sur l'humour noir», explique Zoltan Horvath. Un malin plaisir que notre caricaturiste attribue à ses origines hongroises: «Cette approche au vitriol est très répandue en Europe de l'Est.» Art que Zoltan aimerait pratiquer davantage, le rythme, mensuel, de sa collaboration à L'Evénement syndical ne lui permettant pas de rester toujours en phase avec l'actualité. Il est vrai que le dessinateur était habitué à produire trois caricatures par semaine à l'époque où il travaillait pour la Tribune de Genève. Alors, sans forcer le trait, avis aux intéressés...
Christophe Koessler
"La prochaine projection de «Dans la peau» aura lieu le soir du 29 octobre en avant programme du film d'ouverture du festival de cinéma Tout écran à Genève, à 20h30. Informations: www.cinema-tout-ecran.ch Teléphone: 022 800 15 54
Symbolique du tatouage
L'auteur y réalise des prouesses. Il parvient à mettre en scène les ébats amoureux d'un couple en 11 minutes, sans faire un film érotique, ni obscène. Son joker: le dessin, qui agit comme un filtre. En fait, il s'agit plus exactement de tatouages. Zoltan les fait évoluer sur le corps des acteurs. Il les a choisis en fonction de leur symbolique et de leur portée sensuelle. Il y a d'abord une petite sirène, fil rouge de l'histoire: «J'ai voulu revisiter à ma manière le mythe de la sirène et du marin, de façon décalée.» Y figurent aussi un dragon et son crachat ardent, une pieuvre, un lézard ou encore un sagittaire, qui décochera sa flèche au paroxysme du plaisir. La performance du film tient aussi à la technique utilisée qui marie images réelles et animation, composé de dessins animés et de personnages virtuels en 3 D. «Ce court-métrage aurait été inimaginable il y a encore cinq ans», précise le réalisateur d'une quarantaine d'années.
L'art exploiteur
Au final, c'est aussi à une modification de l'imaginaire que Zoltan travaille: «Si cela peut faire réfléchir sur la manière de représenter l'acte sexuel au cinéma...», espère-t-il secrètement. «Je fais partie de ces gens qui résistent aux courants dominants. Il m'importe plus de changer le regard de dix personnes que de conforter celui d'une centaine.»
Sensible aux questions syndicales, le réalisateur confie un seul regret: ne pas avoir pu rémunérer convenablement l'ensemble des collaborateurs du film: «Dans le métier, on nous donne jamais les moyens de nos projets. On dispose d'un budget très serré, on doit faire avec...» Et d'estimer à environ le double les montants dont il aurait eu besoin pour tourner son court-métrage dans les règles de l'art... syndical. Lui-même a perdu de l'argent pour réaliser «Dans la peau», même si celui-ci a déjà reçu une reconnaissance internationale, à l'instar de son avant-dernier court-métrage «Nosferatus Tango», couronné d'une vingtaine de prix. Rien d'étonnant, dans ce contexte, que Zoltan ne puisse vivre du cinéma. Aussi, en parallèle, il enseigne et vend des illustrations.
Aujourd'hui, Zoltan Horvath souhaite tourner un long-métrage. Mais pas à n'importe quelle condition. Il s'interroge sur la politique de l'Office fédéral de la culture, et sur son concept de «films populaires de qualité»: «Est-ce que cela signifie qu'avant on faisait du cinéma élitiste de m...?», s'indigne Zoltan qui craint que l'on impose des objectifs commerciaux aux auteurs. Cela ne l'empêche toutefois pas de rêver. Porter sur grand écran le livre «La vie des insectes», de Victor Pelevine, fait partie de ses ambitions.
Dérision hongroise
Et la caricature dans tout ça? «J'aime donner mon avis sous forme imagée.» Dans un style qui insiste davantage sur le dessin que le texte, contrairement à d'autres dessinateurs de presse comme Hermann ou Mix et Remix, relève-t-il. «Ma patte, c'est la création d'univers complexes, et je joue beaucoup sur l'humour noir», explique Zoltan Horvath. Un malin plaisir que notre caricaturiste attribue à ses origines hongroises: «Cette approche au vitriol est très répandue en Europe de l'Est.» Art que Zoltan aimerait pratiquer davantage, le rythme, mensuel, de sa collaboration à L'Evénement syndical ne lui permettant pas de rester toujours en phase avec l'actualité. Il est vrai que le dessinateur était habitué à produire trois caricatures par semaine à l'époque où il travaillait pour la Tribune de Genève. Alors, sans forcer le trait, avis aux intéressés...
Christophe Koessler
"La prochaine projection de «Dans la peau» aura lieu le soir du 29 octobre en avant programme du film d'ouverture du festival de cinéma Tout écran à Genève, à 20h30. Informations: www.cinema-tout-ecran.ch Teléphone: 022 800 15 54