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Inquiétudes dans l’horlogerie jurassienne

travailleuse de l'horlogerie
© Thierry Porchet

De nombreuses entreprises horlogères du Jura auront recours à la réduction de l'horaire de travail (RHT) dès le mois d'août.

Plusieurs entreprises auront recours au chômage partiel au retour des vacances horlogères pour faire face à la mauvaise conjoncture économique. Unia Transjurane se montre préoccupé.

Les vacances horlogères battent leur plein, mais les travailleuses et les travailleurs du Jura ne sont pas aussi détendus qu’ils le devraient. En effet, pour certains d’entre eux, les vacances seront prolongées par du chômage partiel. Ce recours à la réduction de l’horaire de travail (RHT) – indemnité versée aux entreprises afin de maintenir les emplois lors d’une baisse d’activité – se justifie par une mauvaise conjoncture économique en ce début d’année 2024. 

«On a déjà senti le vent tourner ce printemps lorsque les entreprises ont massivement mis fin aux missions des employés temporaires, souvent frontaliers», constate Rébecca Lena, secrétaire régionale d’Unia Transjurane. «C’est un fait, les entreprises du secteur fonctionnent de plus en plus avec des intérimaires qui n’ont pas les mêmes conditions de travail et qui servent de variable d’ajustement: la mission peut être arrêtée du jour au lendemain. La mesure suivante est le recours à la RHT. Notre crainte, c’est que cela se poursuive. Nous sommes face à une grande incertitude.»

2000 employés touchés

Le Service de l’économie et de l’emploi du canton du Jura confirme la recrudescence de demandes de RHT. «Il est encore trop tôt pour donner des chiffres clairs mais une quarantaine d’entreprises, représentant environ 2000 employés, ont fait une demande de chômage partiel», informe Gilles Coullery, responsable du dossier. «Cela ne veut pas dire que toutes les entreprises vont y recourir ni chômer tous les jours.» Si ce dernier concède que cela représente une part importante des travailleurs du secteur, il ajoute que le Jura a aussi connu pire. «Nous sommes habitués à ces fluctuations dans l’horlogerie. En 2009-2010, après la crise des subprimes, on avait plus de 5000 employés au chômage partiel.» Gilles Coullery ajoute que cela ne concerne pas toutes les sociétés, mais plutôt le moyen de gamme alors que l’horlogerie de luxe se porte bien. «Il s’agit uniquement de sous-traitants, les marques ne sont pas concernées. Mais on peut dire que des entreprises assez importantes en terme de nombre d’employés sont touchées.»

Problème de sur-stock

Rébecca Lena explique brièvement comment on en est arrivés là. «Après la pandémie de Covid-19 et les pénuries d’énergies qui avaient été annoncées, les entreprises ont paniqué car elles n’avaient plus de réserves. Les stocks ont été refaits, et maintenant ce sont les commandes qui sont à la peine, donc on se retrouve dans une situation compliquée.» Le Jura suisse accueillant beaucoup de sous-traitants – en première ligne car ils dépendent des commandes des manufactures horlogères – il est toujours le premier à être touché par les vagues de crise. «Une fois les stocks écoulés, ça repartira, mais il faut que les ventes repartent à la hausse : le deuxième semestre 2024 jouera un rôle clé», souligne Gilles Coullery.

Est-ce que les autres cantons romands seront touchés par cette nouvelle vague de crise dans l’industrie horlogère? Nous en saurons plus à la rentrée d’août...

Temps partiel encouragé dans le Tessin

Il y a quelques jours, Swatch Group annonçait une baisse de 70,5% de son bénéfice net au premier semestre à cause de la diminution de la demande en produits de luxe en Chine, et plus largement en Asie. Contacté, Swatch Group dit avoir «sciemment renoncé de procéder à des licenciements pour atténuer à court terme l’impact financier», préférant adopter une autre stratégie, à savoir «conserver les capacités de production et ne pas se séparer du personnel qualifié» afin de pouvoir «rebondir plus rapidement et profiter plus fortement de la prochaine reprise». 
Dans le Tessin, canton où Swatch Group est le plus grand employeur dans le secteur conventionné, trois mesures ont permis d’éviter la RHT. «Le groupe, actif dans l’assemblage de pièces, a favorisé le temps partiel sur la base du volontariat», explique Matteo Poretti, secrétaire syndical d’Unia Tessin. «Entre 80 et 100 travailleurs et travailleuses en bénéficient aujourd’hui.» Par ailleurs, il explique que les entreprises horlogères romandes qui ont mis fin aux contrats de leurs intérimaires ont recours à des employés fixes du Tessin, appelés ponctuellement pour renforcer les équipes locales. «Enfin, il est maintenant possible pour les employeurs tessinois de baisser le temps de travail à 20 heures par semaine au lieu de 40 heures, tout en maintenant le salaire à 100 %. Les heures négatives ne peuvent pas dépasser le nombre de 100, et devront être rattrapées avant avril 2026», explique Matteo Poretti. «C’est le compromis que nous avons trouvé pour éviter les licenciements et le chômage partiel. Nous n’avons pas trop d’inquiétude à ce jour mais si la mauvaise conjoncture économique devait perdurer en 2025, ce sera une autre paire de manches!» 

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