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«La priorité doit être la santé des travailleurs, pas les délais!»

Les syndicalistes d’Unia se sont rendus sur le chantier de l’aéroport de Cointrin à plusieurs reprises pour soutenir les ouvriers et ont constaté le non-respect des mesures d’hygiène.
© Unia

Les syndicalistes d’Unia se sont rendus sur le chantier de l’aéroport de Cointrin à plusieurs reprises pour soutenir les ouvriers et ont constaté le non-respect des mesures d’hygiène. Parmi les travailleurs, cinq étaient suspectés d’être contaminés par le virus.

Refusant de travailler à la suite de suspicions de cas de Covid-19 sur le chantier de l’aéroport, des ouvriers ont vu la police intervenir. Les chantiers genevois ont finalement fermé le 20 mars

Le mardi 17 mars, alors que les chantiers tournaient toujours à plein régime en Suisse, parfois dans des conditions d’hygiène déplorables et sans qu’aucune mesure de sécurité soit prise contre la propagation du coronavirus, la situation a dégénéré au bout du lac.

Sur le chantier semi-public de l’aéroport de Cointrin, qui compte environ 130 travailleurs, certains d’entre eux ont simplement refusé de bosser alors que cinq de leurs collègues étaient suspectés d’être contaminés, dont deux étaient en quarantaine. «Ils étaient paniqués et ont manifesté leur inquiétude, à juste titre, les défend José Sebastiao, responsable de la construction à Unia Genève. La police est intervenue pour que les travailleurs se dispersent, on n’a jamais vu ça, c’est inadmissible!»

Le syndicat, qui s’est rendu sur le chantier en question à plusieurs reprises, déplore le non-respect des mesures d’hygiène. «Ils sont au minimum sept travailleurs en pause par baraque, et le même nombre par vestiaire, s’indigne le syndicaliste. Quant au nettoyage, les surfaces ne sont pas désinfectées régulièrement. Jusque-là, ils avaient seulement trois toilettes chimiques et un bac pour se laver les mains, sans savon et sans gel hydroalcoolique.» Entre-temps, trois bidons de savon et trois WC supplémentaires auraient été acheminés... pour 130 ouvriers.

Santé menacée

Pour Unia, la seule solution pour protéger ces travailleurs est de fermer les chantiers. «Quand il y a des suspicions de contamination, des mesures doivent être prises immédiatement. Surtout sur un chantier où il est difficile de respecter les consignes de sécurité sachant que les gars doivent souvent travailler ensemble et sont amenés à s’échanger les outils, souligne José Sebastiao. Nous avons donc demandé à l’entreprise générale de stopper le chantier dès le 17 mars. Dans le doute, on ne peut pas jouer avec la vie des travailleurs!»

Le lendemain, le syndicat est revenu à la charge, le chantier étant toujours actif. «Nous avons demandé à la direction locale de prendre ses responsabilités et d’arrêter le chantier des dizaines de fois, rapporte le responsable syndical. On nous a répondu que la direction nationale était en discussion avec celle de l’aéroport.»

Chantiers fermés dès le 20 mars

Dans l’après-midi du 18 mars, le Conseil d’Etat genevois a ordonné, lors d’un point de presse en ligne, l’arrêt de tous les chantiers du canton à partir du vendredi 20 mars à midi, et l’obligation de mettre en place entre-temps les mesures de sécurité adéquates sur les lieux de travail. Les contrevenants seront passibles d’une amende pouvant aller jusqu’à 300000 francs. Des demandes de dérogation pourront être accordées au cas par cas après jugement d’un organe tripartite (employeurs, syndicats et Etat), pour des raisons de sécurité ou d’intérêt public prépondérant seulement.

«Nous félicitons cette décision, réagissait José Sebastiao peu après cette annonce, mais nous continuons à demander aux entreprises de mettre fin à leurs chantiers dès ce soir.» Certaines l’auraient fait, mais pas toutes. «Il est extrêmement regrettable que les entreprises du bâtiment fassent passer les délais avant la sécurité et la santé de leur personnel.»

Et la suite?

L’arrêt des chantiers et le confinement des travailleurs chez eux est un premier soulagement pour Unia, qui ne baisse pas la garde. «A présent, notre travail sera de nous assurer que les ouvriers soient payés correctement, surtout les centaines de temporaires que compte le secteur, explique le secrétaire syndical. Il est hors de question que les travailleurs paient la facture du coronavirus!»

Feu vert du Conseil fédéral pour continuer les chantiers...

La semaine passée, toutes les régions romandes d’Unia ont réclamé la fermeture des chantiers, jugés non vitaux en cette période de coronavirus. Les innombrables téléphones de salariés ont pu démontrer que beaucoup d’entreprises encore en activité, tant dans le gros œuvre que dans le second œuvre et l’artisanat, ne respectaient absolument pas les règles de protection édictées par le Conseil fédéral et l’OFSP, mettant en danger la santé des travailleurs. «Aucune entité n’est, en l’état actuel, légitimée et/ou en mesure, de procéder à des contrôles du respect des règles de sécurité», ajoutait Unia dans un communiqué de presse.

Alors que le Conseil d’Etat genevois a ordonné la fermeture des chantiers à partir du 20 mars, dans le canton de Vaud, tous les chantiers de construction pour lesquels les mesures de l’OFSP ne peuvent pas être assurées devaient être arrêtés avec effet immédiat et ce jusqu’au 19 avril.

Vendredi dernier, au moment des nouvelles annonces du Conseil fédéral, les autres cantons romands n’avaient, à notre connaissance, pas encore mis en place de mesures semblables.

Depuis le 21 mars, selon les dernières décisions du Conseil fédéral communiquées vendredi, les chantiers devront donc être fermés, si et seulement si les consignes de l’OFSP et du Seco ne sont pas respectées sur le lieu de travail et que l’entreprise ne s’y est pas conformée. Mais qui sera présent sur tous les chantiers de Suisse pour s’assurer que les travailleurs de la construction tiennent leurs distances et sont limités à cinq dans les baraques de chantier? La question reste ouverte. De son côté, Unia continue à demander la fermeture totale de toutes les entreprises socialement non indispensables.

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