Voilà des années que l’on nous le sert. Et plus on répète cet argument, plus on le croit vrai: les prix sont plus importants en Suisse que partout ailleurs, parce que nos salaires sont plus hauts que dans les pays qui nous entourent. Or, selon une étude commandée par le lobby du commerce de détail restée cachée, mais révélée par le numéro 119 de Mieux choisir, le magazine de la Fédération romande des consommateurs (FRC), c’est le contraire qu’il faudrait affirmer. Les Suisses contribuent à faire baisser les coûts par rapport à leurs voisins parce que le coût unitaire du travail moyen est plus bas chez nous que dans les pays comparés. Cela provient de la productivité plus élevée, des journées de travail plus longues, des cotisations plus faibles, etc.
Pour les appareils électroniques, il est possible de les obtenir à meilleur marché chez nous. Par contre pour les cosmétiques, ils sont, en mai 2019, entre 50 et 65% plus chers chez nous qu’en Allemagne, de 21,4 à 31,8% plus chers qu’en France. Conclusion de la FRC: ce dernier coup de sonde confirme que nos salaires ne sont pas responsables du coût des produits importés. Au Parlement d’agir, en traitant l’initiative contre l’îlot de cherté.
Et puis, répéter à toutes les occasions que nos salaires sont plus hauts que partout ailleurs, sans tenir compte de ce que le travailleur a encore à payer après avoir reçu son salaire, sans faire la comparaison du pouvoir d’achat, permet de démobiliser ceux qui seraient tentés d’en demander plus… Et à qui l’on dit: «Ne vous plaignez pas puisque vous êtes déjà trop payés.»
Pierre Aguet, Vevey