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L’initiative d’allègement des primes plus nécessaire que jamais

Dans les couloirs d'un centre médical désert.
© Olivier Vogelsang

La qualité des soins est centrale. Mais son financement est profondément antisocial, avec des primes maladie qui risquent à nouveau de prendre l’ascenseur. Alors que les cantons ont les reins solides sur le plan financier, le Parlement cherche à limiter le plus possible le plafonnement de ces primes pour les bas et petits revenus.

Alors qu’une forte hausse se profile, le traitement de l’initiative du Parti socialiste plafonnant les primes maladie à 10% du revenu est retardé au Conseil des Etats

Alain Berset, le conseiller fédéral en charge de la Santé, s’attend à une hausse «supérieure à la moyenne» des primes maladie pour l’année prochaine, s’est-il récemment confié à la SonntagsZeitung. Ces primes ont pourtant déjà progressé de 6,6% en moyenne cette année. Cette énième augmentation va encore réduire le revenu disponible et mettre en difficulté les individus et les familles qui gagnent juste trop pour ne pas bénéficier des subsides.

En plafonnant ces hausses incessantes, l’initiative populaire d’allègement des primes du Parti socialiste suisse (PSS), déposée en 2020, constituerait une solution. Elle propose que les primes ne s’élèvent qu’à 10% du revenu disponible au maximum. La réduction des primes serait financée à raison de deux tiers au moins par la Confédération et le reste par les cantons pour un coût global de 4,5 milliards de francs. Un tel dispositif existe déjà dans le canton de Vaud depuis 2018, mis en place par le conseiller d’Etat Pierre-Yves Maillard, aujourd’hui président de l’Union syndicale suisse (USS), dans le cadre d’un compromis sur la réforme de l’imposition des entreprises.

Le texte de l’initiative socialiste a été rejeté par le Conseil fédéral, qui lui a opposé un contre-projet. Jugé minimaliste par la gauche et les syndicats, il ne permettrait que de légères améliorations. Les cantons seraient tenus de réglementer la réduction des primes de telle sorte que le montant accordé corresponde à un pourcentage déterminé des coûts de l’assurance obligatoire sur leur territoire. Ils seraient laissés libres de fixer ce pourcentage, le gouvernement imaginant un taux minimal allant de 5% à 7,5% pour un coût de 493 millions de francs. Le Conseil national s’est rallié l’été passé à ce contre-projet, mais a décidé de débloquer 2,2 milliards supplémentaires pour la réduction des primes. Un compromis concocté par la gauche et salué par l’USS.

La balle est maintenant dans le camp du Conseil des Etats. Le 18 avril, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique de la Chambre haute est entrée en matière sur le contre-projet du Conseil national. Une majorité de sénateurs a toutefois décidé de réduire les parts cantonales à un taux minimal de 3,5% à 7,5%. Les cantons n’auraient plus qu’à débourser 356 millions. Pour le PSS, il s’agit d’une décision «incompréhensible au vu de la situation financière globalement très favorable des cantons». L’USS juge, elle, que la majorité de la commission «vit dans un monde parallèle et ignore les vrais problèmes qui préoccupent la population».

A voir si maintenant le Conseil des Etats suit l’avis de sa commission. Des divergences et des allers-retours entre les deux Conseils vont retarder encore l’élaboration d’un contre-projet ou une votation dans les meilleurs délais.

«Stop à la hausse!» à Neuchâtel

C’est à Neuchâtel que l’assurance maladie pèse le plus dans le budget des ménages. D’après les chiffres de l’Office fédéral de la statistique, les primes équivalaient en moyenne à 19% du revenu disponible dans le canton en 2019, contre 14% au niveau national. Et c’est à Neuchâtel que les primes ont le plus augmenté cette année, de 9,5%. Le Parti libéral-radical a annoncé vouloir s’attaquer au problème au travers d’une initiative augmentant le montant déductible des impôts. La mesure bénéficierait surtout aux contribuables aisés et ne résoudra pas le problème pour les salariés modestes. Plus efficace est l’initiative récemment lancée par le Parti socialiste, «Primes maladie: stop à la hausse!», qui transpose au niveau cantonal l’initiative du PSS avec un plafond à 10% du revenu disponible.


EFAS, un cadeau aux assureurs et aux cliniques privées

Les primes maladie pourraient augmenter encore plus fortement au travers du Financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS, acronyme d’Einheitliche Finanzierung ambulant und stationär). Traînant dans les arcanes du Parlement depuis 2009, ce projet qui renforce les intérêts des assurances maladie et des hôpitaux privés a été ressuscité par la Commission de la sécurité sociale et de santé publique du Conseil national. Pour résumer, les quelque 11 milliards de francs que dépensent aujourd’hui les cantons pour les hôpitaux seraient purement transférés aux assurances maladie. Charge à elles de répartir cette manne de manière uniforme sur le plan national. Le pouvoir de pilotage des assureurs privés augmenterait donc considérablement au détriment des cantons. Ceux-ci pourraient certes consulter les factures, mais la commission ne veut pas qu’ils puissent refuser de les prendre en charge à certaines conditions. Les assureurs ne seraient pas les seuls gagnants, les cliniques privées aussi, avec une révision à la hausse de leur indemnisation et un financement plus large de l’assurance de base. Les 75% des frais de traitement des hôpitaux privés pourraient désormais être pris en charge par la LAMaL, contre 45% aujourd’hui. Quant aux assurés, ils devraient voir leurs primes augmenter avec l’évolution des coûts hospitaliers, alors que cette participation est aujourd’hui plafonnée. La commission a toutefois décidé de réexaminer ses décisions lors d’une prochaine séance. L’Union syndicale suisse dénonce un «cadeau incompréhensible aux hôpitaux privés et au lobby des assurances» et appelle la commission à «revoir sérieusement sa copie».

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