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Migros en ligne de mire

Une ancienne vendeuse s'attaque au géant orange pour inégalité salariale

Catherine ne va pas lâcher prise. Comme vendeuse, elle gagnait 300 francs de moins que des collègues masculins, plus jeunes, avec moins d'expérience, et faisant le même travail. Elle met aujourd'hui en demeure son ancien employeur, Migros, pour qu'il reconnaisse cette inégalité de traitement et, surtout, introduise réellement l'égalité salariale en son sein.   

«Si je me bats aujourd'hui, c'est pour faire changer les conditions de travail de mes collègues. La plupart sont sous-payées par rapport aux hommes. Je suis obligée de passer par une procédure individuelle et de réclamer le salaire que je n'ai pas touché, mais l'argent n'est pas essentiel pour moi; ce que je veux, c'est que Migros change ses pratiques en matière salariale, c'est la dernière chose que je peux encore faire.» Catherine est syndicaliste dans l'âme. Même si elle ne travaille plus depuis 2 ans, en raison d'une sclérose en plaques, elle entend poursuivre le combat qu'elle avait entamé au sein de Migros Neuchâtel-Fribourg, où elle était membre de la commission du personnel. Car pour elle, si Migros c'est «le mieux du pire» en matière de conditions de travail dans le commerce de détail helvétique, il reste encore beaucoup à faire. «Migros veut apparaître aux yeux du public comme une entreprise sociale, s'occupant bien de ses employés. Elle prône par exemple l'égalité salariale, principe contenu également dans la convention collective, mais des écrits aux faits, il y a une grande différence. Ce sont les gérants qui fixent les salaires à l'embauche, et le salaire au mérite introduit au début des années 2000 n'arrange pas les choses», poursuit cette ancienne vendeuse, membre active d'Unia, qui a commencé à travailler en 1994 chez Migros, après plusieurs années passées en Angleterre. Au passage, elle fustige la politique antisyndicale du géant orange, qui fait pression sur ses employés afin qu'ils ne se syndiquent pas. «Même lorsque la FCTA était encore partenaire, ils nous faisaient comprendre que se syndiquer, ou même discuter avec les syndicalistes, nous mettrait au ban de la «grande famille Migros», explique Catherine qui a voulu prouver que l'on pouvait être syndiquée sans forcément semer la zizanie.

3500 francs contre 3800 francs...
Son combat actuel, Catherine l'a entamé alors qu'elle était encore en place. C'est à la fin de 2003 qu'elle apprend qu'un collègue effectuant le même travail qu'elle gagnait 300 francs de plus. Une somme importante quand on gagne 3500 francs brut, soit moins de 3000 francs net, pour un plein-temps... Ce collaborateur était en outre plus jeune que Catherine, n'avait pas d'expérience, travaillait chez Migros depuis moins longtemps. De plus, il avait moins de responsabilité, Catherine travaillant occasionnellement à la caisse. Début 2004, Catherine interpelle le président de la commission du personnel pour qu'il se prononce sur cette inégalité. Quelques mois plus tard, elle se retrouve en arrêt maladie en raison de sa sclérose en plaques. Elle n'obtiendra aucune réponse du président.
Aujourd'hui, Catherine a tout en main pour prouver cette inégalité salariale, même si la Loi sur l'égalité ne demande que de la rendre vraisemblable. En l'occurrence, elle dispose des fiches de paie d'un autre collaborateur payé également 300 francs de plus. La procédure judiciaire peut démarrer. Soutenue par Unia et par l'avocat Me Jean-Michel Dolivo, Catherine demande à Migros le paiement de la différence de salaire depuis 2003, prescription de 5 ans oblige, jusqu'à 2006, année où elle doit cesser ses rapports de travail à cause de sa maladie.  

Claire violation de la loi
La semaine dernière, une lettre a été envoyée à Migros Neuchâtel-Fribourg, mettant en demeure la société de restituer le salaire dû et de verser à Catherine une indemnité pour perte de rente. Car dans la foulée, comme Catherine était sous-payée, elle se retrouve avec une rente invalidité de la caisse de pension plus basse que si elle avait cotisé sur un salaire plus élevé. «Il n'y a strictement aucun critère objectif permettant de justifier la différence de salaire. C'est clairement une violation de l'article 3 alinéa 2 de la Loi sur l'égalité qui interdit toute discrimination à la rémunération», souligne Me Dolivo qui ajoute que si Migros ne donne pas de réponse favorable à la fin du délai fixé, soit cette fin de semaine, il saisira l'Office de conciliation cantonal et les tribunaux compétents.
Quant au changement de pratique de Migros en matière d'égalité salariale, «cela dépendra de la publicité faite autour de cette affaire» relève l'avocat.

Sylviane Herranz