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Pauvre Amérique!

C’est officiel. Depuis le 24 juin dernier, l’avortement n’est plus un droit fédéral aux Etats-Unis. Sans grande surprise, la Cour suprême, à majorité conservatrice, en a décidé ainsi. Les femmes seront donc soumises à la loi de leur Etat, désormais libre d’autoriser, de limiter ou de prohiber l’IVG. Le Missouri, l’Arkansas et l’Oklahoma ont immédiatement sauté sur l’occasion de le bannir, et la moitié des 51 Etats pourraient bien faire de même. Visiblement rien n’est jamais vraiment acquis en matière de droits des femmes. Des années de lutte féministe réduites en poussière par des hommes qui imposent leur contrôle sur le corps des femmes. Cela se passe en 2022, dans la première puissance mondiale. On ne le sait que trop bien: les interruptions de grossesse continueront à exister, au péril de la santé physique et psychologique de ces femmes pour qui devenir mère n’est pas une option.

Ironie du sort, ou pas, la veille, les neuf juges de la Cour suprême confortaient le bon vieux droit de porter une arme en dehors de son domicile en invalidant une loi de l’Etat de New York qui limitait justement le port d’arme. Une décision qui intervient un mois après une horrible fusillade faisant 21 morts dans une école primaire texane, endeuillant le pays tout entier. Sans parler du défilé du 4 juillet près de Chicago pris pour cible par un jeune tireur d’une vingtaine d’années… Faut-il rappeler qu’en 2020, plus de 45000 personnes ont perdu la vie, tuées par balle, aux Etats-Unis d’Amérique? Quelle indécence, et quelle hypocrisie. Geneviève Fraisse, philosophe de la pensée féministe et autrice le dit si bien: «Dans certains Etats, on interdit de tuer un embryon qui n’a ni nom ni histoire et dont il faudrait “sauver la vie”; alors qu’au nom de la liberté du port d’armes, on admet comme un “accident” qu’un forcené tue des dizaines d’enfants qui, eux, ont un nom, une vie, un projet. Ce parallèle me glace.»

Dernière mesure rétrograde en date, la Cour suprême qui a décidé de limiter les moyens de l’Etat fédéral pour lutter contre les gaz à effet de serre, émanant notamment des centrales à charbon. Autrement dit, l’Agence pour la protection de l’environnement, qui était jusque-là missionnée par le Congrès pour répondre au plus urgent problème de notre époque, ne l’est plus. Le réchauffement climatique a encore de belles années devant lui au pays de l’Oncle Sam! Et la Cour n’entend pas en rester là. Les prochains acquis dans le viseur sont l’accès à la contraception et le mariage gay… De nouveaux revirements qui nous ramèneront des années en arrière. Trump doit se frotter les mains en coulisses. En nommant ces juges ultraconservateurs déterminés à détruire toutes les avancées sociétales, c’est sa politique qui perdure, même en son absence. Cette Amérique ne vend plus du rêve, elle inspire la désolation et la pitié.