Payer plus pour toucher moins? C’est non!
Les syndicats et le Parti socialiste disent leur opposition au projet de LPP 21 tel qu’adopté par le Conseil des Etats la semaine dernière. Un référendum n’est pas exclu
La réforme de la Loi sur la prévoyance vieillesse LPP 21 retourne au Conseil national. La semaine dernière, le Conseil des Etats a adopté sa version du projet, à peine plus généreuse que celle du National votée en décembre 2021. Ce dernier avait déjà largement dénaturé le compromis des partenaires sociaux, repris par le Conseil fédéral, mais des divergences subsistent. La pierre d’achoppement porte sur les suppléments prévus pour compenser la baisse du taux de conversion de 6,8% à 6%, qui représente une diminution des rentes de 11,76%.
Le Conseil fédéral prévoyait une compensation pour tous les assurés, sans limite de temps, allant de 200, 150 et 100 francs par mois pour les nouveaux retraités durant les quinze premières années de la réforme, puis d’un montant défini chaque année. Le National plaide pour un modèle couvrant uniquement 35% à 40% des nouveaux rentiers et les Etats ont remonté légèrement le curseur avec un système prévoyant une compensation dégressive et à vie pour environ 50% des retraités. D’autres désaccords entre les Chambres existent, notamment sur la part du salaire assuré et sur l’abaissement du seuil d’accès au 2e pilier.
Occasion manquée
Après le vote du Conseil des Etats, les syndicats et le Parti socialiste ont dénoncé les détériorations apportées au compromis des partenaires sociaux, ce dernier prévoyant une amélioration rapide pour les femmes et les bas revenus. «Depuis plus de dix ans, les rentes versées par les caisses de pension diminuent, alors qu’elles ont réalisé de somptueux bénéfices sur les marchés boursiers et immobiliers», rappelle l’Union syndicale suisse (USS). Pour elle, la décision du Conseil des Etats revient à payer plus pour toucher moins à la retraite, alors que la situation financière des caisses «s’améliore de jour en jour, avec la reprise des taux d’intérêt». L’USS regrette «l’occasion historique» manquée par le Parlement de privilégier le compromis des partenaires sociaux. Pour la faîtière, cette décision «est un véritable affront fait aux femmes». Après la hausse de l’âge de la retraite, «le Conseil des Etats veut les faire patienter quelques dizaines d’années avant d’obtenir les améliorations de rentes dont elles ont concrètement et urgemment besoin». Selon les calculs de l’USS, moins de la moitié des femmes et un quart de tous les assurés seulement obtiendraient, avec la version des sénateurs, la pleine compensation de la baisse du taux de conversion.
Promesses non tenues
«Pour les femmes qui ont travaillé toute leur vie dans des branches à bas salaires et à temps partiel, la perspective d’une vie digne à la retraite s'éloigne. Les assureurs peuvent se réjouir, ils sont les grands gagnants», abonde Unia, qui constate que «les promesses de la droite de trouver une égalité dans les rentes des femmes n’ont été que des paroles en l’air. Ainsi, écrit le syndicat, durant la campagne sur AVS 21, «les partis bourgeois n'ont cessé de prétendre qu'en cas d'acceptation de l'âge de la retraite des femmes à 65 ans, ils s'engageraient pour une réforme rapide du 2e pilier qui améliorerait leur situation en matière de retraite.» Or, le vote des Etats aura pour effet que les personnes à bas salaires et à temps partiel cotiseront nettement plus pour des rentes qui n’évolueront guère. Unia ajoute que, pour l’ensemble des précaires, «la réforme augmente le risque de pauvreté». Sans compter l’aggravation de leur situation en raison du renchérissement. Le syndicat comme le Parti socialiste suisse annoncent déjà la saisie du référendum si ce projet de démantèlement est maintenu.