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Stop aux privilèges fiscaux des gros actionnaires

Les Genevois sont appelés à se prononcer sur une initiative qui demande que les revenus des gros actionnaires soient imposés comme ceux de tout un chacun. Entretien avec Anna Gabriel Sabaté, secrétaire régionale d’Unia Genève

Aujourd’hui, les gros actionnaires genevois ne sont taxés que sur 60% ou 70% de leurs gains. Et ce sont les seuls à recevoir ce traitement. Un «privilège choquant» auquel la «Plateforme pour la justice fiscale» s’attaque. Composée des syndicats, dont Unia, et de partis de gauche, elle a lancé l’initiative 179 «Contre le Virus des inégalités… Résistons! Supprimons les privilèges fiscaux des gros actionnaires». Les électeurs sont appelés à voter sur ce sujet le 12 mars prochain. En bref, l’initiative propose que l’intégralité des dividendes touchés par une personne physique possédant au moins 10% des actions d’une société soient taxés, à l’image des revenus de Monsieur et Madame Tout-le-monde, et ce à des fins de justice élémentaire. Une mesure qui rapporterait des dizaines de millions de francs supplémentaires chaque année à la collectivité publique, et qui permettrait de financer les services à la population et les prestations sociales.

Anna Gabriel Sabaté, secrétaire régionale d’Unia Genève, en dit plus.


Pourquoi est-ce important pour Unia de soutenir une telle initiative?

Cette initiative est importante, car elle permet d’augmenter la part des richesses qui revient aux salariés. En effet, si la richesse est créée par le travail, les actionnaires en captent une part croissante. A la fin des années 1990, «seulement» 30% des bénéfices nets d’une entreprise étaient redistribués en dividendes aux actionnaires et 70% étaient investis. Aujourd’hui, les proportions se sont inversées: 70% des bénéfices sont captés par les actionnaires et seulement 30% sont investis dans l’entreprise. C’est d’autant plus grave depuis que la RFFA (Réforme fiscale et financement de l’AVS) a engendré une baisse massive de l’imposition des bénéfices des entreprises, ce qui a entraîné une explosion des bénéfices nets, donc de la masse des dividendes. En imposant les dividendes sur un pied d’égalité avec les salaires ou les retraites, les collectivités publiques pourraient récupérer 150 millions de francs par année afin de financer les services publics et les prestations à la population.

Que répondre aux arguments de la droite patronale contre cette initiative?

La droite patronale se cache derrière les PME pour défendre les gros actionnaires, mais ce n’est pas honnête. A Genève, les «gros actionnaires» représentent 1600 personnes qui se partagent environ un milliard de francs par an! En moyenne, cela représente des revenus annuels de 625000 francs. A cela, il faut encore ajouter les revenus du travail ou de la propriété. En réalité, les dividendes alimentent surtout les grosses fortunes et la spéculation. On est donc très loin des petits patrons de PME, dont la majorité ne déclare aucun bénéfice.

Quelles chances a cette initiative d’être acceptée?

Il existe de vraies chances de gagner cette votation le 12 mars. D’abord, parce que ce cadeau fiscal en faveur des gros actionnaires est une injustice flagrante et souvent méconnue. Mais aussi parce que nous avons gagné les derniers scrutins sur les questions de fiscalité, en particulier contre la suppression du droit de timbre ou de l’impôt anticipé. Cela signifie qu’une majorité de la population est sensible aux inégalités sociales qui se sont encore creusées sous l’effet de la crise du Covid-19. Si beaucoup de salariés ont vu leur revenu stagner, voire diminuer, ces dernières années, les grosses fortunes ont continué à croître à une vitesse folle: elles ont triplé durant les sept dernières années!

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