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La Suisse avait été clouée au pilori il y a deux ans par l’Organisation internationale du travail (OIT) qui l’avait placée sur une liste noire de 40 pays violant les normes internationales de protection des travailleurs. Elle n’avait finalement pas été retenue dans une seconde liste de 25 pays examinés par l’instance de contrôle. Un accord in extremis avait été passé entre le Conseil fédéral et les partenaires sociaux: une médiation entre syndicats et patronat, sous l’égide du ministre de l’Economie Guy Parmelin, devait trouver une solution à l’absence de protection des délégués syndicaux dans un délai d’une année, soit pour juin 2020.

Auparavant, l’OIT avait exigé à plusieurs reprises que la Suisse se mette en conformité avec les conventions 87 et 98 portant sur la liberté syndicale et sur le droit d’organisation et de négociation collective. Cela après que l’Union syndicale suisse (USS) et d’autres syndicats aient déposé plainte auprès de l’institution internationale du travail, à la suite de licenciements abusifs de militants syndicaux ou de représentants du personnel. Concrètement, l’OIT avait demandé, en 2006 déjà, au gouvernement helvétique d’accorder le même type de protection à un délégué syndical que celui accordé aux femmes engageant une démarche d’égalité salariale. Soit la nullité d’un licenciement prononcé à leur encontre et la possibilité d’une réintégration.

Deux ans après le sursis obtenu par la Suisse, force est de constater que les engagement pris par Guy Parmelin en 2019 devant l’OIT pour que notre pays sorte la tête haute de la liste noire n’ont pas été tenus. La médiation n’a pour l’heure donné aucun résultat.

Qu’à cela ne tienne. C’est un tapis rouge qui a été déroulé sous les pieds du président de la Confédération le 7 juin dernier, lors de la 109e Conférence internationale du travail, assemblée générale de l’OIT. Oubliées les violations des droits syndicaux en Suisse. Oubliée l’incurie du gouvernement face à ses obligations internationales. Ce jour-là, Guy Parmelin était invité à prononcer le discours d’ouverture de la Conférence. La main sur le cœur, le président a déclaré son engagement «personnel» en faveur de l’action de l’OIT et celui de la Suisse pour que l'économie et le travail «demeurent» au service de l’humain…

On croit rêver lorsque l’on connaît le nombre d’êtres humains licenciés dans notre pays après s’être engagés pour défendre les droits de leurs collègues. Des travailleuses et des travailleurs ont tout perdu et se sont retrouvés face à l’arbitraire patronal et à une justice fondée sur la liberté d’entreprise et le laisser-faire économique.

A l’heure où les médias tressent des lauriers au président de la Confédération, qui aurait fait un sans-faute lors de l’accueil de ses homologues russe et américain, les salariés de ce pays sont en droit de savoir s’il compte aussi être à la hauteur de ses déclarations «humanistes» faites devant la Conférence internationale du travail. Selon l’USS, le Conseil fédéral se serait engagé à proposer, au plus tard en 2022, une révision de la loi conforme au droit international afin de protéger les délégués syndicaux. Faudra-t-il attendre encore des lustres pour que cette protection voie le jour? Ou devrons-nous, comme pour l’égalité salariale, nous mobiliser fortement pour que nos droits deviennent effectifs?