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Un salaire de 4500 francs au minimum

Manifestation à Genève.
© Olivier Vogelsang

Plus de 12500 personnes avaient participé aux manifestations interprofessionnelles organisées par Unia le 30 octobre 2021, ici à Genève, pour exiger une revalorisation des salaires et des améliorations des conditions de travail. Un an plus tard, l’USS précise les revendications pour toutes ses fédérations avec l’exigence de salaires minimums.

A la suite de son analyse de la répartition des richesses, l’Union syndicale suisse revendique un salaire d’au moins 4500 francs par mois et de 5000 francs pour les titulaires d’un CFC

Entre le renchérissement du coût de la vie, l’explosion des primes maladie et la stagnation des salaires, les travailleurs et les travailleuses ont de moins en moins d’argent pour subvenir à leurs besoins, le pouvoir d’achat s’érode. Ce problème n’est pas nouveau mais empire, a constaté l’Union syndicale suisse (USS), s’appuyant sur les résultats de son analyse de la répartition des richesses présentée la semaine dernière lors d’une conférence de presse à Berne. «Les charges fixes, qui étaient déjà trop hautes pour un bon tiers de la population, augmentent encore avec une brutalité inédite ces dernières années», a commenté Pierre-Yves Maillard appelant, face aux problèmes sociaux qui menacent, employeurs et autorités à se réveiller. «Dans le monde d’en haut de notre petit pays, on se dit que tout ne va pas si mal (...). Mais dans le monde du travail, que ce soit celui des salariés, des petits indépendants ou de certaines entreprises, une grave angoisse monte», a alerté le numéro un de la faîtière syndicale, plaidant pour un salaire qui permette de «vivre correctement» et fustigeant la passivité des élus. Dans ce contexte, l’USS a estimé qu’aucune rémunération ne doit être inférieure à 4500 francs par mois, le minimum absolu étant évalué à 4000 francs fois 13. Quant aux personnes au bénéfice d’un apprentissage, les syndicats ont revendiqué au moins 5000 francs.

1000 francs de primes maladie par mois!

Economiste en chef et premier secrétaire de l’USS, Daniel Lampart a évalué le poids dans les ménages des primes maladie dont les hausses ont englouti une bonne partie des avancées salariales. La charge pour un couple avec deux enfants touchant des rémunérations standards avoisine 14% du revenu net. «Une famille paiera en 2023 plus de 1000 francs de primes par mois.» Une facture de la santé majorée à laquelle s’ajouteront aussi d’autres plus élevées comme celles de l’électricité, de l’énergie et des loyers dont les coûts augmenteront. En réponse au choc annoncé, l’USS a revendiqué une hausse substantielle des subsides aux primes maladie. Et invite le Conseil des Etats, comme le veut la Chambre du peuple, à l’amortir avec un milliard de francs supplémentaires. Daniel Lampart a en outre dénoncé une politique fiscale qui, entre 2000 et 2020, a favorisé les hauts revenus, notamment par le biais de baisses d’impôts. «Les très hauts revenus peuvent bien sûr s’accommoder d’une hausse de primes de plusieurs centaines de francs. Et pourtant, ce sont précisément ces personnes qui bénéficieront d’un allègement financier: comme le pourcentage dit “de solidarité” cessera d’être perçu dans l’assurance chômage sur les salaires dépassant 148200 francs, elles paieront au final moins de cotisations sociales.»

Progression des bas salaires

Les salaires trop bas dans plusieurs professions et branches inquiètent particulièrement les syndicats. Selon eux, un quart des personnes actives au bénéfice d’un apprentissage gagnent moins de 5000 francs par mois pour un emploi à plein temps, comme des boulangers, des vendeurs ou des dessinateurs. «En valeur réelle, les salaires ont même diminué pour ces catégories entre 2016 et 2020.» La faîtière a également constaté une expansion de la part des bas salaires passant, depuis 2014, de 10,2% à 10,5%. «Concrètement près de 500000 personnes professionnellement actives gagnent moins de 4500 francs par mois pour une activité à plein temps. Or, près d’un tiers d’entre elles ont achevé un apprentissage. Autrement dit une formation de trois ou quatre ans ne protège plus face au risque d’un salaire trop bas.»

Au regard de cette situation, les syndicats défendent, lors des négociations salariales, la compensation de la hausse du coût de la vie et des améliorations des salaires réels, arguant «une bonne marche des affaires, sinon excellente dans les entreprises». Avec des résultats à la clé.

Des augmentations de salaires indispensables

«Nous sommes parvenus à obtenir la compensation du renchérissement dans quelques branches et entreprises, parfois davantage. Dans l’hôtellerie-restauration par exemple ou encore dans le domaine du nettoyage en Suisse alémanique, mais aussi dans l’horlogerie», a indiqué Vania Alleva, présidente d’Unia et vice-présidente de l’USS. Des points positifs, mais les pourparlers encore à venir s’annoncent difficiles. Notamment dans le domaine public où de nombreux cantons, a souligné la faîtière, n’entendent pas adapter les rémunérations de leur personnel à l’inflation. Une situation aussi tendue dans le commerce de détail. «Dans ce secteur, de nombreux employés doivent se résoudre à des pertes de salaire. Les négociations avec Coop ont échoué parce que les syndicats refusent d’approuver la réduction du pouvoir d’achat du personnel», a ajouté Vania Alleva, tout en évoquant également au passage les discussions dans le secteur de la construction où les patrons entendent conditionner les augmentations des rémunérations à une détérioration des conditions de travail des maçons. «Nous voulons que, demain encore, il vaille la peine de faire un apprentissage, de suivre une formation, de travailler. Mais pour cela, le salaire doit être juste.»

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