La loi révisée est entrée en vigueur le 1er juillet. Même si elle ne touche qu’une partie des salariés et ne prévoit aucune sanction, les syndicats espèrent de réels changements
L’inégalité salariale va-t-elle marquer le pas ces prochaines années? La patience des femmes est de nouveau sollicitée… Il faudra attendre de longs mois, voire des années, pour connaître l’impact des nouvelles dispositions de la Loi sur l’égalité entrées en vigueur ce 1er juillet 2020. Une révision décriée, lors de son acceptation par le Parlement, car jugée minimaliste et qui, sans la forte mobilisation de quelque 20000 personnes en septembre 2018, aurait pu passer à la trappe. Si cette révision ne concerne que 1% des entreprises, mais néanmoins 45% des salariés, elle n’impose aucune sanction aux employeurs ne procédant pas à l’analyse obligatoire des salaires, ni à ceux qui ne corrigeront pas les inégalités révélées. Des discriminations criantes, comme le rappelle Unia: les femmes gagnent toujours en moyenne 20% de moins que les hommes, ce qui représente 657 francs par mois pour une personne. C’est aussi 10 milliards de francs économisés chaque année par les employeurs. «La discrimination salariale n’est pas un problème individuel, mais collectif. Toutes les femmes sont concernées, dans tous les métiers, à tous les postes et à tout âge», indique Unia dans un communiqué. Pour le syndicat, la loi modifiée est certes importante, mais reste insuffisante au niveau du nombre de personnes touchées, de l’absence de sanctions et du fait qu’elle s’éteindra automatiquement après douze ans.
Suivi des syndicats
Unia exige des entreprises l’association des commissions du personnel ou des représentations des salariés dans le processus de contrôle de l’égalité. Il appelle également toutes les sociétés de moins de 100 employés à entreprendre, elles aussi, l’analyse des salaires et à procéder aux corrections nécessaires. Il en va du respect d’une obligation constitutionnelle, adoptée en 1981, il y a bientôt 40 ans. Et de celle de la Loi sur l’égalité interdisant toute discrimination salariale entre hommes et femmes. Il en va aussi du respect de la volonté des femmes et des 500000 personnes s’étant engagées dans la grève du 14 juin 2019 en Suisse.
Pour sa part, bien que remarquant également le «gros point faible» de l’absence de sanctions, l’Union syndicale suisse (USS) se réjouit qu’enfin, les entreprises soient amenées à prendre leurs responsabilités pour le respect de l’égalité salariale. Elle estime que cette révision apportera un peu plus de transparence. Comme Unia, l’USS considère qu’il est incompréhensible que les organisations syndicales et les commissions du personnel ne soient pas impliquées dans les procédures. «Les syndicats se préparent donc à suivre de très près la mise en œuvre de cette révision et s’engageront dans leurs branches pour que les analyses de salaires se fassent avec les partenaires sociaux», note la faîtière dans un communiqué. Elle informe à ce sujet que ses fédérations ont lancé «une offensive de formation pour les représentants du personnel, afin de leur permettre de contrôler la mise en œuvre de la loi».
Autre nécessité, celle d’améliorer les salaires dans les professions majoritairement féminines où, même s’il n’existe pas de discrimination explicite, les femmes sont en général payées beaucoup moins que les hommes. «Pas parce que leur travail vaut moins – la crise du coronavirus a bien démontré le contraire –, mais parce que l’économie et la société en général n’investissent pas assez dans les métiers de l’approvisionnement, des soins et de l’assistance», souligne l’USS. Et la faîtière syndicale de conclure: «La Suisse est au défi d’améliorer sans délai les salaires des femmes. La Loi révisée sur l’égalité est un petit pas dans cette direction.»