En première ligne depuis une année, les employés pourraient maintenant être victimes de réductions d’effectifs en raison de la baisse du taux d’occupation
En première ligne depuis une année, les employés des EMS genevois craignent désormais des licenciements ou des baisses imposées de leur taux d’activité, ont rapporté la semaine dernière des syndicalistes lors d’un point presse par visioconférence. Plus de la moitié des victimes du virus en Suisse sont des résidents de maisons de retraite, de nombreux lits sont aujourd’hui vides et les aînés sont plus réticents que jamais à s’y installer. «Des retours de terrain nous indiquent que la baisse d’activité pourrait provoquer des licenciements. Congédier des personnes qui ont travaillé à flux tendu durant des années par manque d’effectifs est inacceptable», déclare Manuel Nussbaumer, secrétaire syndical d’Unia Genève, en rappelant que ce secteur est largement subventionné. «Nous invitons l’Etat et les faîtières patronales à prendre leurs responsabilités pour garantir l’emploi, empêcher les licenciements et la diminution des prestations.»
Sacs-poubelles et lunettes de chantier
Ces menaces sur l’emploi pointent à l’horizon alors que le personnel n’a toujours pas entièrement récupéré de la crise de l’année dernière. Trois soignantes ont rappelé les difficultés auxquelles elles ont été confrontées durant la première vague. «Au début, nous portions le même masque durant douze heures d’affilée, les sur-blouses jetables étaient lavées trois fois, nous étions équipés de lunettes de chantier et, lorsque nous avons manqué de sur-charlottes, nous avons utilisé des sacs-poubelles. Un jour, nous avons eu besoin de quatre appareils à oxygène et nous n’en disposions que d’un seul… Nous avons dû choisir, ce fut une responsabilité lourde à endosser», témoigne une infirmière syndiquée à Unia. «De notre côté, nous n’avions qu’une sur-blouse par chambre et par jour, il fallait donc enfiler la blouse de la collègue. Nous manquions aussi de masques FFP2 pour soigner les malades, j’ai été amenée à en mettre deux l’un sur l’autre pour essayer d’en améliorer l’efficacité», raconte pour sa part une infirmière adhérente du SSP. «Aux problèmes de matériel s’est ajoutée la surcharge de travail. La fermeture des frontières a été une catastrophe, mes collègues frontaliers mettaient trois heures pour passer la douane, certains se levaient à 4h du matin et finissaient à 20h le soir.»
Comme le souligne Clara Barrelet, secrétaire syndicale du Sit, «la pandémie a révélé et amplifié le sous-effectif chronique, l’absentéisme et l’épuisement des soignants dans les EMS, ce qui impacte la prise en charge des personnes âgées». «Depuis des années, nous courrons toute la journée, effectuant seulement les soins de base», confirme une soignante affiliée au Sit.
Les travailleurs des homes ont payé un lourd tribut au Covid-19, mais combien au juste ont-ils été infectés? «Nous avons demandé à plusieurs reprises à la task force des EMS, qui regroupe l’Etat et les faîtières patronales, de nous communiquer ce chiffre; cela nous a été refusé, c’est bien regrettable», déplore Manuel Nussbaumer.
CCT pas respectée
Les représentants du personnel porteront sans nul doute ces problématiques lors des négociations pour le renouvellement de la Convention collective de travail (CCT) des EMS genevois. «Le principe des négociations est acquis, il nous manque encore un calendrier et nous devons organiser une assemblée générale du personnel, ce qui est un peu compliqué en cette période, indique Sabine Furrer, secrétaire syndicale du SSP. Reste que nous sommes confrontés à un problème tout bête de respect de la CCT, beaucoup d’EMS ne l’observent pas ou en font une interprétation très patronale.» Ce point-là devrait donc aussi être abordé. Unia a élaboré un cahier de revendications avec ses membres, qui sera présenté à l’assemblée intersyndicale.