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Extinction Rebellion s’attaque à l’industrie textile

Action d'Extinction Rebellion dans un magasin H&M à Bienne.
© Thierry Porchet

Torse nu pour dénoncer les dérives du prêt-à-porter. Pour clouer au pilori l’industrie textile, des dizaines d’activistes romands et suisses alémaniques de tous âges du mouvement écologiste Extinction Rebellion ont occupé une succursale de H&M à Bienne.

Samedi 15 août, des militants ont occupé un magasin H&M à Bienne pour dénoncer la pollution et les mauvaises conditions de travail générées par la mode

Pointer du doigt les dérives de l’industrie textile au travers d’une des marques les plus importantes du monde, le géant suédois H&M. Tel était l’objectif d’Extinction Rebellion (XR) qui a dénoncé, lors de son action coup-de-poing à Bienne, l’impact environnemental et social du secteur. Samedi 15 août, vers 13h30, des activistes se sont ainsi enchaînés à l’intérieur du magasin «pour dénoncer l’esclavage moderne», tandis que d’autres militants sensibilisaient les passants en dehors. L’industrie textile est un des secteurs les plus polluants par son usage des pesticides dans la culture de coton, par ailleurs avide en eau (un jean nécessite entre 7000 et 10000 litres), par ses teintures et ses procédés industriels entre autres. Dangereux pour la planète mais aussi pour la santé des travailleurs. Socialement, les ouvrières du Bengladesh, du Cambodge, d’Inde, de Chine et d’ailleurs n’ont pour la grande majorité toujours pas le droit à des salaires équitables. Et pourtant, usant du greenwashing et d’un marketing agressif, le secteur vestimentaire continue de pousser à la surconsommation (la production mondiale de vêtements aurait doublé entre 2000 et 2014).

«Ce secteur est un maillon du système toxique, dont le réchauffement climatique et la 6e extinction de masse sont les symptômes, fustige XR dans un communiqué. Utilisation abusive des ressources de la planète, exploitation des humains et des autres animaux, production massive de déchets, pollution des eaux, incitation à la surconsommation: autant de pratiques mortifères, coloniales, sexistes, antiécologiques et antisociales qui doivent cesser!» Le mouvement écologiste précise que le but de l’action n’est pas de faire culpabiliser les consommateurs ou les employés, mais «de dénoncer une industrie qui exploite le vivant pour le bénéfice d’une poignée de privilégiés».

Pacifistes, comme lors de toutes leurs actions, les militants ont quitté les lieux vers 15 heures après que la police a eu recueilli leur identité. Quelques jours plus tard, Cécile Bessire, membre de XR Bienne revient sur cette action et les objectifs plus globaux du mouvement.


Quelles ont été les réactions des passants lors de votre action?

Le personnel de vente s’est senti dépassé lorsque les bloqueuses et les bloqueurs se sont enchaînés dans le magasin. Et une personne a eu une réaction violente pour des raisons religieuses car des femmes étaient torse nu. Mais beaucoup de passants ont été à l’écoute et d’accord avec nos revendications. Tout s’est passé dans le calme et le respect.

Quel est l’impact de votre sensibilisation auprès de la population depuis que XR existe, soit un an et demi environ?

Il est difficile de le mesurer, car les réactions sont très différenciées selon les actions. A Bienne, c’était la troisième. Auparavant, une marche funèbre avait été organisée – nous avons transporté un cercueil au travers de la ville pour signifier la mort du Vivant –, ainsi qu’une interruption intermittente de trafic durant laquelle les réactions des automobilistes étaient plus violentes. Au niveau politique, à Bienne, nous avons des élus qui nous soutiennent et nous encouragent à continuer à faire pression dans la rue. De manière globale, nous pensons que ce système n’a pas fait ses preuves, et qu’il faut donc en changer, car les mesures prises au niveau politique ne sont pas assez fortes ni proportionnelles à l’ampleur du danger qui nous attend. Notre première revendication chez XR est que le gouvernement dise la vérité sur les dangers du dérèglement climatique et de la perte de la biodiversité. Ensuite, nous revendiquons la mise en place d’assemblées citoyennes, afin de décider rapidement comment atteindre la neutralité carbone d’ici à 2025. Le Covid a freiné nos manifestations, mais a aussi révélé que le temps politique peut être très rapide quand on prend conscience des risques. Beaucoup de personnes sont malheureusement encore dans l’ignorance ou le déni. A mon avis, si elles étaient réellement bien informées, elles deviendraient activistes. La vie sur Terre est menacée et le gouvernement ne remplit pas son devoir de protection. Nous sommes donc légitimés à nous rebeller. Chaque militant a ses moments de découragement. Ce qui me fait personnellement tenir c’est mon devoir moral et éthique: j’aime la vie, les gens, les animaux, les plantes, et je veux me battre pour tout cela.

Comment toucher toutes les couches de la population?

A XR, il y a des gens de toutes les générations mais toutes les classes sociales ne sont pas aussi bien représentées, ni les origines culturelles – car une personne sans nationalité suisse aura plus de difficultés à prendre des risques légaux notamment, même s’il y a toujours la possibilité de contribuer au mouvement autrement. Nous sommes souvent taxés de gauchistes extrémistes ou d’écolo-bobo, certaines personnes interprètent nos propos comme moralisateurs ou culpabilisants, et sont donc sur la défensive. C’est un des plus grands défis des mouvements climatiques: comment faire pour que chaque personne se sente concernée?

La convergence avec la Grève du climat en septembre marque-t-elle un tournant?

Il est essentiel de resserrer les liens avec les autres mouvements de lutte climatique et sociale, car nous nous battons pour une même cause et contre un même système toxique. Nous devons unir nos forces pour avoir un plus grand impact. Face aussi à nos différences culturelles selon les régions de Suisse – les actions sont plus fréquentes et plus perturbatrices en Suisse romande, où les activistes sont plus nombreux –, c’est réjouissant de voir que d’autres mouvements rejoignent notre stratégie de désobéissance civile non violente.

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