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La 5G, écologique ou pas?

Antenne à Lausanne.
© Olivier Vogelsang

La 5G au cœur de controverses...

Selon les opérateurs de téléphonie mobile, la 5G et la numérisation contribueraient à une transition durable. Un non-sens pour ses opposants

 

«Maintenant climatiquement neutre». C’est Swisscom qui le dit, depuis le lancement de sa campagne fin février. Mais comment un réseau téléphonique peut-il être aussi écologique, alors que ses serveurs nécessitent tant d’énergie et que son fonctionnement est intrinsèquement lié aux smartphones produits grâce à une centaine de matériaux dont une bonne moitié non renouvelables, ainsi que des terres rares dont l’extraction est extrêmement polluante? Sans compter la construction de nouvelles antennes 5G, les quelque 200 millions d’appareils connectés rien qu’en Suisse, les box internet, les data-centers, les câbles terrestres et sous-marins…

Le numérique n’a rien d’immatériel: rien que la fabrication d’un ordinateur de 2 kg demande 800 kg de matières premières! Et les ouvriers des mines des pays du Sud le savent bien. L’extractivisme pollue, consomme beaucoup d’énergie, engendre la destruction d’écosystèmes, polluent l’air, l’eau et les terres, et est responsable, dans certains pays, de violences et de déplacements forcés de populations.

Monstre énergivore

L’association Stop5G, se référant à l’Agence de transition énergétique française (ADEME), dénonce: «Les technologies de l’information sont en train de devenir un monstre énergivore qui représente 4% des émissions de gaz à effet de serre.» Soit l’équivalent de la flotte mondiale de camion.» «Cent millions de tonnes de CO2 sont rejetées pour le visionnage de films et de séries, soit la consommation annuelle de la Belgique», explique-t-elle. De surcroît «la phase de fabrication s’avère plus énergivore que la phase d’utilisation des objets connectés». Stop5G pointe ainsi le non-sens de prôner la connexion de millions d’objets en même temps que la lutte contre la crise climatique. Swisscom, de son côté, écrit diminuer «autant que possible les émissions de CO2 lors de la production, du transport et de l'exploitation de ses propres produits, comme les routeurs, ou de l'exploitation du réseau grâce à une énergie 100% renouvelable. Partout où il n'est pas possible de réduire suffisamment les émissions de CO2 ou pour les produits achetés comme les téléphones portables ou les accessoires, Swisscom compense ses émissions de CO2 par des projets climatiques.» L’opérateur, par la voix de sa porte-parole, nuance toutefois: «Les produits climatiquement neutres ne résolvent pas tous les défis sociaux ou environnementaux de la chaîne d'approvisionnement. Il est vrai que les TIC (technologies de l’information et de la communication, ndlr) nécessitent des ressources matérielles. C'est pourquoi nous misons sur de vastes programmes d'économie circulaire.»

L’opérateur a également mandaté une étude de l’Université de Zurich et de l’EMPA (Laboratoire fédéral d'essai des matériaux et de recherche) pour comparer les technologies 4G et 5G. Celle-ci conclut que «l’empreinte des réseaux 5G concernant les gaz à effet de serre sera inférieure à celle des réseaux 4G, si ceux-ci sont déployés conformément au trafic de données attendu».

Effets rebonds

Se fondant sur cette même étude, l’Association suisse des télécommunications (asut) souligne: «Pour chaque gigaoctet de données, les émissions climatiques sont environ 85% inférieures à celles des réseaux de téléphonie mobile actuels. Et bien que le volume de données croîtra de 650% d'ici à 2030, les émissions climatiques totales de la 5G n'augmenteront que de 11%. (…). La 5G et la numérisation contribuent donc à la réalisation des objectifs climatiques de la Suisse.» Une hérésie pour Olivier Bodenmann, ingénieur électricien EPFL et expert en électrosmog,  qui souligne la contradiction: «Comment peut-on dire que la 5G va contribuer à la réalisation des objectifs climatiques de la Suisse alors qu'elle va augmenter encore son empreinte carbone?»

Or, la même étude évoque aussi deux risques, et non des moindres: les effets rebonds, soit une très forte hausse de la demande; et le besoin d’outils d’information et de communication supplémentaires tels «des ordinateurs portables pour le travail flexible, des capteurs, des drones ou des robots pour l’agriculture de précision, dont la fabrication et l’exploitation génèrent des émissions supplémentaires de gaz à effet de serre».

Se référant quant à lui au Haut Conseil pour le climat en France, le conseiller national Vert Raphaël Mahaim précise: «Cet organisme a conclu que la 5G entraînerait une augmentation des transferts de données, et donc de la demande énergétique générant un impact néfaste sur l’environnement. Sans compter l’augmentation du nombre d’appareils.» Quant à la nécessité de la 5G pour l’économie et les emplois? «C’est une vision productiviste, consumériste et commerciale que je ne partage pas. Et je ne suis pas un Robinson Crusoé. Je ne crois pas, comme le disait le maire de Grenoble, qu’on ait besoin de visionner une vidéo porno en HD dans l’ascenseur qui mène à son bureau le matin. La 5G est importante pour la médecine de pointe par exemple. Mais c’est un marché de niche qui ne devrait pas être imposé à tout le monde.»

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