«La majorité des entreprises ne respectent pas les prescriptions»
Unia a organisé des tournées de chantiers afin de prévenir les ouvriers des risques liés à la canicule et s’assurer du respect des mesures à prendre. Bilan dans le canton de Vaud
Distribution de crèmes solaires et de tracts: la semaine dernière des syndicalistes d’Unia Vaud ont entrepris, à l’image d’autres régions, une tournée des chantiers du canton. Buts de l’action: agir préventivement et s’assurer que les patrons ont pris les dispositions nécessaires pour préserver la santé et la sécurité des travailleurs en ces temps de canicule. «Nous avons fait le point, chantier par chantier, sans oublier nombre d’échanges téléphoniques avec les entreprises», précise Sébastien Genton, coresponsable de la construction à Unia Vaud. Cette démarche a mis en lumière des bonnes pratiques mais surtout révélé de graves lacunes pouvant avoir des conséquences dramatiques sur la vie des travailleurs. Si la distribution d’eau est majoritairement bien respectée, peu de sociétés ont en revanche aménagé les horaires, les pauses et la nature des travaux alors que le thermomètre a dépassé les 34 °C. Cette situation a nécessité l’intervention d’Unia et des mises en conformité. «Nous avons par exemple visité le chantier du tram dans la capitale vaudoise où œuvrent quelque 80 ouvriers. Une entreprise avait adapté le temps de travail de 6h à 13h, mais pas les nombreuses autres actives sur ce site. Après discussion avec la Ville de Lausanne, le maître d’ouvrage, toutes ont dû s’aligner.»
Arrêter au besoin les chantiers
Certains chantiers ont donné du fil à retordre aux syndicalistes. Sur une route cantonale en restauration par exemple, l’équipe du génie civil travaillait jusqu’à 13h, mais non celle chargée du goudronnage. «La société ne voulait pas modifier l’horaire de ces travailleurs sous prétexte de devoir maintenir des délais. Un scandale! La pose d’enrobés présente d’importants risques en période de canicule, la température s’élevant, à la sortie de la machine, à plus de 120 °C.» Après une intervention auprès du responsable des travaux, les parties sont parvenues à un arrangement et l’horaire a été adapté en conséquence. Le collaborateur d’Unia souligne encore qu’il a fallu passer nombre de coups de fil à différentes entreprises pour que les consignes en matière de pause soient appliquées. Et cela alors qu’elles avaient reçu un avis de canicule une semaine plus tôt pour leur permettre de s’organiser. «Avec les fortes chaleurs, il est impératif de prévoir, l’après-midi, des activités plus légères. Si c’est impossible, les ouvriers doivent pouvoir s’arrêter chaque heure, à l’ombre, durant dix minutes. Cette prescription ne peut être suivie? Les travaux doivent alors être interrompus, car il y a un réel danger de mort pour les ouvriers. La majorité des chantiers ne respectent pourtant pas ces exigences!» Dans tous les cas, Sébastien Genton insiste sur un arrêt des chantiers dès que les 34 °C sont dépassés et sans possibilités de prendre les mesures adéquates. «Que l’on bétonne ou goudronne, quelle que soit la tâche effectuée, il faut un stop.»
Des jours «joker»...
Dans ce contexte, Unia rappelle qu’une des revendications principales dans le cadre du renouvellement de la Convention nationale de la construction porte sur les intempéries. «Il est nécessaire d’établir des règles claires, de définir des critères pour arrêter les chantiers et protéger la santé et la sécurité du personnel. D’autant plus que le réchauffement climatique va accentuer le problème ces prochaines années.» Le syndicaliste estime encore qu’il faudrait modifier la Loi sur le chômage et supprimer les deux jours de carence de paiement en cas d’interruption des travaux liés à la météo. A noter que, dans le canton de Vaud, les partenaires sociaux ont créé un Fonds santé et sécurité auquel peuvent recourir les entreprises sous réserve de remplir les conditions requises. Sébastien Genton plaide encore pour un système de planification des travaux qui comprendrait une quinzaine de jours «joker». En d’autres termes, les entreprises devraient pouvoir bénéficier d’une certaine marge afin de pallier d’éventuels retards dans les délais occasionnés par les intempéries.