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La Suisse a mal à sa nature

Carte postale trompeuse: la beauté des paysages helvétiques occulte la situation dramatique de la biodiversité dans notre pays. La réduction de zones vertes essentielles comme la diminution de la faune sauvage qui, par définition, se dérobe généralement au regard, ne sautent pas aux yeux, à l’inverse du dérèglement climatique aux épisodes manifestes. Pourtant, le problème devient de plus en plus aigu. Selon le dernier rapport de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) publié le 22 mai à l’occasion de la Journée internationale de la diversité biologique, 17% de toutes les espèces se trouvent au bord de l’extinction ou en danger; 16% se révèlent vulnérables. Des oiseaux comme le vanneau huppé, des amphibiens à l’image de la grenouille alpine ou des plantes dont le bleuet foncé ont disparu de nos contrées ou sont en voie de l’être. Le hérisson et nombre d’autres animaux risquent à terme d’appartenir à l’histoire. Même diagnostic pour des milieux importants sur le plan écologique: près de la moitié des marais, des forêts et des prairies dites sèches connaissent de graves détériorations. La faute à notre mode de vie, à un empiètement toujours plus étendu sur l’habitat de communautés, aux pollutions en tous genres de l’eau, de la terre, des sols, à l’augmentation de variétés végétales et d’animaux exotiques envahissants et, bien sûr, aux effets du changement climatique. Et puis quoi? diront peut-être certains peu sensibles à la question. Cette perte, au-delà d’un appauvrissement inestimable du patrimoine naturel, a des conséquences vitales sur notre survie. Notre existence même dépend d’une nature préservée et variée. Il ne s’agit donc pas seulement de défendre la richesse du décor et de ses hôtes, mais bien d’assurer sur la durée nos moyens de subsistance.

Comme le rappelle l’OFEV, plantes, animaux, champignons et micro-organismes participent à la régulation du climat, purifient air et eau, se révèlent bénéfiques pour notre santé et contribuent considérablement à garantir la sécurité alimentaire. Les vers de terre rendent fertiles nos sols. Les insectivores limitent la présence des ravageurs dans les cultures. La crise de la biodiversité menace des services indispensables tels que la pollinisation des arbres fruitiers ou le stockage de CO2.

Les organisations actives dans la préservation de l’environnement comme BirdLife ou Pro Natura tirent la sonnette d’alarme depuis longtemps. La première, peu avant la parution du rapport de l’OFEV, a dénoncé l’abandon discret, il y a trois années, de l’objectif fixé en 1998 de réduire chaque an de 1% le nombre d’espèces figurant sur la liste rouge. Une décision pour le moins irresponsable. La seconde a illustré la problématique par une action emblématique sur la place Fédérale. Elle a installé des dominos géants imprimés d’images de végétaux et d’animaux indigènes s’écroulant dans une réaction en chaîne dévastatrice avec la chute de la dernière pièce symbolisant un être humain. Les deux associations réclament des actes politiques forts. Comme une augmentation des surfaces protégées. La Suisse, dénonce encore BirdLife, n’a consacré que 10,8% de son territoire à cet effet, figurant ainsi à la dernière place dans le classement européen. Un pourcentage bien loin du but de 30% visé à l’horizon 2030 vers lequel se rapprochent la plupart des Etats de l’UE. En comparaison avec les nations industrialisées, notre pays connaît une des plus longues listes rouges des espèces et des habitats en péril. Autant de faits qui exigent un changement impératif de paradigme. Un premier geste est à portée: il passe par un Oui à la Loi sur le climat le 18 juin. La crise de la biodiversité et la hausse des températures sont en effet intimement liées. Et résultent toutes deux de nos modes de vie destructeurs entre consommation effrénée, surexploitation et gaspillage des ressources, et mépris du vivant.