L’affaire Corela devant le Grand Conseil vaudois
Des députés ont demandé, sans succès pour l’heure, que l’Office AI du canton révise tous les dossiers contenant une expertise Corela et qu’il informe les assurés potentiellement lésés
«Je prends acte avec regret qu’il n’y a aucune volonté de l’Office AI du canton de Vaud de s’autosaisir de son droit de révision et qu’il n’y a aucune volonté d’informer les assurés sur leurs droits.» Pour Nicolas Rochat Fernandez, député au Grand Conseil vaudois et juriste chez Unia, la réponse du Conseil d’Etat reçue le mardi 24 avril dernier à sa question orale concernant la clinique Corela, n’est pas satisfaisante, d’autant plus que les délais donnés aux personnes lésées pour agir sont très courts.
Dans sa question, le député avait rappelé que la clinique genevoise, rebaptisée MedLex SA, a été sanctionnée par le Tribunal fédéral pour des graves manquements et des violations des devoirs professionnels dans la réalisation d’expertises médicales. Il demandait au Conseil d’Etat quelles démarches l’Office AI (OAI) du canton avait entreprises pour les dossiers d’assurés dont le mandat d’expertise avait été confié à Corela et si les assurés avaient été informés de la possibilité de faire réviser les décisions les concernant. Jean-Michel Dolivo, député d’Ensemble à Gauche, avait lui aussi interrogé le Gouvernement et demandé qu’outre une information des assurés, une révision spontanée des cas soit effectuée.
Au moins 155 situations au sein de l’AI vaudoise
Lors de la séance du Grand Conseil du 24 avril, le ministre de la Santé et de l’action sociale, Pierre-Yves Maillard, a répondu aux deux députés. Egalement président du Conseil de surveillance de l’OAI vaudois, le conseiller d’Etat a d’emblée annoncé le peu, voire l’absence de compétence de cet organisme au niveau des décisions concrètes de l’OAI.
Il a indiqué que cet office avait lancé, dès réception de l’arrêt du Tribunal fédéral, une analyse pour déterminer si des actions devaient être entreprises et combien d’assurés vaudois étaient potentiellement concernés. «Il ressort que l’OAI ne mandate plus cette clinique depuis plusieurs années. Mais il reste une dizaine de situations encore en cours d’instruction pour lesquelles une expertise a été réalisée par la clinique Corela», a-t-il précisé, relevant cependant qu’«apparemment ces expertises ne comportent pas de faits analogues à ceux décrits par la justice». Pour les décisions entrées en force, Pierre-Yves Maillard a informé que l’OAI a identifié 155 situations d’assurés «pour lesquelles une expertise de la clinique Corela figure au dossier», un chiffre toutefois non exhaustif, a-t-il souligné, le système de l’OAI ne permettant pas d’identifier les situations où une expertise Corela aurait été réalisée sur mandat d’un autre assureur. Par ailleurs, a ajouté le conseiller d’Etat, «la simple présence dans un dossier d’une expertise de la clinique Corela n’indique pas systématiquement que l’OAI s’est appuyée sur cette pièce pour fonder sa décision. Un document médical étant désigné comme une expertise n’a pas une valeur automatiquement admise.»
Demande prochaine au Conseil de surveillance
«Sans faits nouveaux portés à la connaissance de l’OAI, l’office n’est pas tenu juridiquement de procéder à des recherches systématiques afin d’identifier les situations», a relaté Pierre-Yves Maillard, tout en s’engageant à demander, lors du prochain Conseil de surveillance de l’OAI, «qu’un processus de réexamen de ces situations soit enclenché et que l’office soit particulièrement vigilant dans le cadre de son travail d’instruction si une expertise de la clinique Corela figure au dossier.»
Nicolas Rochat Fernandez salue cette intention, mais rappelle que les délais sont très courts, les assurés ne pouvant déposer une demande de révision que jusqu’au 18 mai au plus tard (une date ultime, le délai de fin avril étant repoussé en raison des vacances de Pâques). Il s’étonne également que l’OAI estime ne pas être tenu de procéder à une instruction automatique de tous les dossiers, alors qu’il existe une obligation légale de le faire pour les assurances sociales. «Cette affirmation est scandaleuse d’autant que l’on n’a pas connaissance de l’ampleur des dommages, et que les personnes concernées sont déjà fragilisées et peu au fait des questions juridiques. Ces 155 cas sont des cas potentiellement litigieux, sans compter tous les autres assurés non identifiés. J’appelle vivement toutes les personnes concernées pensant être lésées à s’annoncer au plus vite, notamment en se rendant à une permanence d’Unia.»