Le Conseil fédéral balaie l’initiative pour une 13e rente
Jugé trop coûteux, le texte est rejeté sans contre-projet. Pour l’USS, le gouvernement refuse de voir le problème de la baisse des rentes. Elle appelle le Parlement à changer de cap
Sans grande surprise, le 25 mai dernier, le Conseil fédéral a confirmé son rejet de l’initiative populaire «Mieux vivre à la retraite» et décidé de ne pas lui opposer de contre-projet. Il a appelé le Parlement à en faire de même. Les auteurs de l’initiative, à savoir l’Union syndicale suisse (USS), des organisations féminines et de retraités, demandent le versement d’une rente de vieillesse supplémentaire du même montant que celle perçue chaque mois. Une 13e rente, en somme, qui correspondrait à une hausse mensuelle de 8,33%.
Trop cher, selon le Conseil fédéral, qui explique dans son communiqué «ne pas voir de marge de manœuvre financière» pour une 13e rente. «Selon les perspectives financières actuelles, l’AVS présentera déjà un déficit de répartition de près de 4,7 milliards de francs dans le régime actuel en 2032.» L’acceptation de l’initiative «aggraverait» encore la situation avec des dépenses supplémentaires de 5 milliards environ.
Il justifie par ailleurs son refus par les inégalités que cela pourrait créer entre les retraités et les bénéficiaires d’une rente invalidité ou de survivants, ces derniers se retrouvant désavantagés. Le gouvernement estime que le système actuel fonctionne très bien: «Les prestations complémentaires permettent au système social suisse de remplir sa mission de couverture des besoins vitaux dans son ensemble.» Pour le reste, il brandit sa réforme AVS 21 comme solution pour financer les prestations du 1er pilier. Circulez, y a rien à voir!
Menaces
Le constat des syndicats suisses est clair: les rentes sont trop basses et celles du 2e pilier s’effondrent alors même que les prix augmentent et qu’un choc des primes maladie menace. «Il y a 50 ans, le peuple suisse a décidé que la rente AVS devait garantir le minimum vital et l'a inscrit dans la Constitution», rappelle Gabriela Medici, première secrétaire adjointe de l’USS. «Cette décision n'a toujours pas été mise en œuvre. En rejetant l'initiative populaire pour une 13e rente AVS, le Conseil fédéral ignore le problème des rentes trop basses. Mais en plus, pour la première fois, il renonce ouvertement à cet engagement selon lequel les rentes AVS doivent garantir le minimum vital!»
Pour la faîtière syndicale, le Conseil fédéral omet de dire que les prévisions financières récentes sont «substantiellement supérieures» à ce qui était prédit il y a encore quelques mois… «Et pourtant, on continue à chercher systématiquement à faire peur à la population sur l’avenir de l’AVS, s’indigne la syndicaliste. Le Conseil fédéral ne se comporte pas de manière responsable en semant ainsi le doute. Il oublie aussi volontairement que l'AVS est et restera la prévoyance vieillesse la moins chère pour 90% de la population.»
Les initiants rappellent que seul le projet de 13e rente pose la question du niveau des rentes et s’oppose au démantèlement de l’AVS. La balle est désormais dans le camp du Parlement, appelé par l’USS à corriger les erreurs du Conseil fédéral. «Ce dernier renvoie les travailleurs qui ont eu une vie professionnelle éprouvante vers les prestations complémentaires au lieu de mettre en œuvre leur droit à une rente de vieillesse digne de ce nom», conclut Gabriela Medici. La votation populaire sur l'initiative aura lieu au plus tôt en 2023.