Les temporaires bénéficient peu du chômage partiel
Des conditions trop difficiles et le manque d’engagement des employeurs ont limité les possibilités de réduire l’horaire de travail. L’exemple dans le Jura
La Suisse dénombrait quelque 400000 travailleurs temporaires lorsque le coronavirus a débarqué. Dès le début de la crise, Unia a demandé et obtenu que ces salariés puissent bénéficier de la réduction d’horaire de travail (RHT). «La décision du Conseil fédéral n’est tombée que le 20 mars alors qu’une partie des travailleurs intérimaires étaient déjà licenciés», explique Véronique Polito, membre du comité directeur d’Unia et responsable pour le syndicat de la Convention collective sur la location de services. «La mise en œuvre de cette disposition s’est révélée, en outre, problématique. Le Secrétariat d’Etat à l’économie a fixé des exigences trop élevées et les patrons d’agences d’intérim n’ont pas véritablement joué le jeu, ils n’ont pas déposé en masse des demandes, ils ont posé des conditions souvent impossibles en demandant, par exemple, l’accord des entreprises de mission et le financement des coûts annexes, le chômage partiel ne couvrant qu’une partie seulement des charges sociales. Ils n’étaient pas prêts à payer ces coûts.» Au final, selon Véronique Polito, peu de temporaires ont pu profiter du chômage partiel: «A côté de cela, il y a tous ceux qui n’ont pas de mission fixe, par exemple dans l’événementiel, ils étaient 700 rien que pour le Salon de l’auto à Genève qui a été annulé. Beaucoup n’ont pas droit au chômage et se retrouvent à l’aide sociale, voire à faire la queue pour récupérer un sac de commissions aux côtés d’employées de l’économie domestique. Cela montre que cette forme d’emploi est très précaire. Lorsqu’il y a une crise, le risque d’entreprise est malheureusement reporté sur les intérimaires.»
Succès dans le Jura
Dans le Jura, comme ailleurs, les temporaires traversent une mauvaise passe et Unia a eu maille à partir avec des agences de placement. L’une d’elles en particulier n’avait pas déposé de demande de RHT pour les collaborateurs des entreprises ayant fermé durant la seconde partie du mois de mars et entendait compenser ce manque à gagner sur le dos des travailleurs. «Elle proposait aux intérimaires de faire passer ces deux semaines comme un congé sans solde ou des vacances payées, mais forcées, ou encore de payer effectivement le salaire mais en le déduisant du treizième, relate la secrétaire régionale d’Unia Transjurane, Rébecca Lena. Nous avons indiqué à cette société que ces propositions n’étaient pas correctes et que le salaire était dû aux travailleurs, s’est ensuivi des échanges de courrier, de téléphones et, après deux semaines et demie de négociations, la direction nous a confirmé que tous les travailleurs touchés par une fermeture en mars recevraient leurs salaires dus. Entre 50 et 100 personnes sont concernées. C’est un beau succès.» Le syndicat est, par contre, toujours en discussion avec d’autres agences de travail temporaire. «Elles ont mis un terme à des missions de travailleurs alors que les entreprises voulaient les mettre en RHT», indique la secrétaire régionale, qui, elle aussi, déplore: «Les temporaires sont les premiers à faire les frais de cette crise.»