Les vacances horlogères ne laissent pas de repos à Unia
Nombre d’entreprises veulent modifier les dates de fermeture, parfois sans consulter les partenaires sociaux
Les vacances, c’est sacré! Surtout dans l’horlogerie et la microtechnique. En vigueur depuis 1937, la Convention collective de travail (CCT) de cette branche fut l’une des premières en Suisse à accorder des congés payés et elle présente pour spécificité de prévoir une fermeture générale des ateliers pendant trois ou quatre semaines fin juillet, début août. A ce moment-là, les rues de La Chaux-de-Fonds, de Bienne ou de Saint-Imier sont désertées. Cette année, ces vacances horlogères ont été fixées du 20 juillet au 7 août. Les entreprises signataires de la CCT ont le choix de fermer deux ou trois semaines, plus une semaine avant ou après cette période, ou alors de ne pas participer à cet arrêt général et d’accorder les vacances de manière individuelle comme dans les autres branches. Les horlogers ont le droit à cinq semaines de vacances par an, six à partir de 50 ans. Mais dans tous les cas, le choix et le calendrier des vacances doivent être arrêtés au 31 décembre de l’année précédente dans chaque société.
Depuis avril, en raison de la situation économique, la Convention patronale de l’industrie horlogère a demandé aux syndicats de déroger à cette règle et d’autoriser les entreprises à modifier leurs dates de vacances. «Nous en avons beaucoup discuté en interne. Nous ne pouvions pas accepter cette demande sans condition et nous avons estimé opportun de demander des garanties sur l’emploi», indique Raphaël Thiémard, le responsable des industries horlogère et microtechnique pour Unia. L’idée était que les entreprises qui modifieraient leurs dates de vacances s’engageraient à ne pas licencier en 2020. «Nous demandions aussi que les entreprises qui s’étaient écartées de la CCT, notamment en vidant les soldes d’heures supplémentaires ou en piochant dans les jours de congé, reviennent en arrière. Ces conditions ont été refusées et il n’y a pas eu d’accord général. Nous sommes restés ouverts à négocier entreprise par entreprise.»
Vacances forcées chez Rolex
Différents cas de figure se présentent: des entreprises avaient annoncé une fermeture générale et n’en veulent plus et d’autres, au contraire, n’en n’avaient pas prévue mais souhaitent désormais en fixer une. Parfois sans consulter les partenaires sociaux. «Certains gros acteurs de la branche pensent qu’ils peuvent modifier les règles du jeu et tordre le bras au syndicat. Rolex, par exemple, qui n’avait pas prévu de vacances fixes, a annoncé par une note de service que la société sera fermée du 27 juillet au 7 août, ce qui obligera les employés à prendre ces deux semaines de vacances même s’ils les avaient placées à un autre moment. Déjà à Pâques, l’entreprise avait pris de force quatre jours sur les vacances de tout le monde, alors qu’en plein confinement les ateliers étaient fermés et les gens bloqués chez eux», s’indigne le responsable syndical. La CCT prévoit des mécanismes de contrôle, ainsi que des peines conventionnelles en cas d’infraction. «Les vacances sont importantes pour les salariés et ce n’est pas parce qu’ils ont été en horaire réduit pendant des semaines qu’ils n’en auront pas besoin cette année, bien au contraire. Mais nous vivons un moment très particulier, certaines directions peuvent être tentées de ne plus appliquer la CCT, particulièrement lorsqu’elles versent 100% du salaire pendant la RHT.»
Raphaël Thiémard explique encore que toutes ces dernières semaines les secrétaires syndicaux de l’horlogerie se sont activés pour informer les travailleurs de leurs droits et faire respecter la loi et la CCT. «Mais Les règles sanitaires compliquent nos contacts avec les salariés, nous empêchant par exemple de débarquer devant les entreprises pour tracter. C’est pourquoi je renouvelle notre appel aux travailleurs de nous signaler ce qui ne fonctionne pas, par exemple avec le respect des règles sanitaires ou s’ils se retrouvent amputés de leur solde de vacances.»