Pas d’économies sur le dos des femmes!
Entrée ce début d’été des partisans et des adversaires d’AVS 21 dans l’arène médiatique. Une réforme qui entend repousser l’âge de la retraite des travailleuses à 65 ans. Ce projet inique est promis à une rude bataille, avec des munitions inégales en termes de moyens qui seront investis dans la campagne par ses adhérents, et ses opposants rassemblant les syndicats, la gauche et les collectifs féministes. Le 27 juin, le conseiller fédéral Alain Berset a ouvert les feux défendant, droit dans ses bottes et contre son parti, sa révision combattue par une large alliance référendaire. Une coalition de femmes des partis bourgeois s’est exprimée quelques jours plus tard pour dire tout le bien qu’elle pensait de la nouvelle mouture qui sera tranchée le 25 septembre dans les urnes. Non sans y ajouter quelques bémols, insuffisants toutefois pour ébranler ses convictions. Mais ce serait évidemment dommage de se couper d’électrices sensibles à la sororité... Les organisations de travailleurs sont elles aussi montées au front. Et ont rappelé les raisons motivant le rejet d’AVS 21. Pas question pour ses opposants d’exiger des femmes qu’elles triment une année de plus. Que 10 milliards de francs soient économisés sur leurs dos. Une proposition jugée injuste à maints égards en dépit des compensations supposées en atténuer l’impact pour les travailleuses proches de la retraite. A raison. Et ce quand bien même les défenseurs de la révision brandissent l’étendard de l’égalité. Mais de quelle égalité parle-t-on? Les femmes touchent en moyenne des rentes globalement inférieures d’un tiers à celles perçues par les hommes. Cet écart s’explique par des inégalités salariales toujours de l’ordre de 20% – qui, non sans ironie, influe également négativement sur les cotisations au 1er pilier – mais aussi par les discriminations subies tout au long de leur parcours professionnel. Assumant toujours la plus large partie du travail non rémunéré entre tâches domestiques, garde des enfants, aide aux proches, les femmes sont le plus souvent contraintes de travailler à temps partiel. Quatre mères sur cinq n’occupent pas de poste à 100%. Cette situation, liée encore au manque de structures d’accueil et à leur prix, se répercute évidemment à la retraite. Les femmes se trouvent en outre majoritaires dans les emplois mal rémunérés comme dans les nettoyages, la vente, la santé et les soins. Des activités particulièrement pénibles qu’elles devraient poursuivre un an de plus à des tarifs ingrats. Pilule pour le moins amère.
AVS 21 ne constitue par ailleurs qu’une première étape sur le chemin du démantèlement de la prévoyance vieillesse. Acceptée, la révision ouvrira la porte à un rehaussement de l’âge de la retraite pour tous à 67 ans. Une aberration totale qui ne tient absolument pas compte des réalités du marché du travail. Le groupe des 60-64 ans accuse le taux de chômage le plus élevé. Indépendamment de leurs qualifications ou de leurs prétentions salariales, les sexagénaires sans emploi peinent à retrouver un job alors que les employeurs se plaignent de la pénurie de main-d’œuvre dans différents domaines. Mais quel patron leur redonnera une chance en fin de carrière? Un report sur l’aide sociale semble bien plus probable pour cette catégorie de personnes.
Un oui à AVS 21 signifiera encore une augmentation des prix, puisque le projet prévoit aussi un relèvement de 0,4% de la TVA. Une mauvaise nouvelle supplémentaire avec un taux d’inflation attendu cette année à 2,7%. Sans oublier l’explosion d’ores et déjà annoncée des primes maladie. En bref, AVS 21 se traduira par davantage de travail, moins de rentes et une vie plus chère. Un prix que personne ne devrait accepter de payer...