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Pour une agriculture au service de l'humain et de la nature

Affiche exposition sur la souveraineté alimentaire

Le 23 septembre, deux initiatives sur le contenu de nos assiettes et sur l’avenir de la paysannerie seront soumises au vote. Essentiel

Une alimentation saine, diversifiée, sans OGM, durable et locale. Des salaires et des conditions de travail justes pour les paysans et les ouvriers agricoles. Et un commerce international équitable. Voici en quelques mots ce que représente la souveraineté alimentaire défendue par le syndicat paysan Uniterre – membre de l’organisation internationale La Via Campesina –, auteur de l’initiative «Pour la souveraineté alimentaire. L’agriculture nous concerne toutes et tous». Celle-ci est soutenue par plus d’une septantaine d’organisations dont les Verts, le Parti socialiste, SolidaritéS, PoP, Chrétiens au travail, Solidarité sans frontières, l’Alliance suisse pour une agriculture sans génie génétique, la Plateforme pour une agriculture socialement durable, Swissaid, Longo Maï, Attac, Magasins du Monde, Marche mondiale des femmes, Mouvement populaire des familles… et des syndicats, dont Unia. C’est donc bien sur un changement de paradigme que les citoyens sont appelés à se prononcer le 23 septembre prochain. Uniterre souhaite ainsi promouvoir une agriculture durable qui privilégie la production locale. L’Etat serait chargé de prélever des droits de douane sur les importations et d’en réguler leur volume. Et, en écho, n’accorderait plus de subvention à l’exportation.

Hasard du calendrier politique, l’initiative des Verts «Pour des denrées alimentaires saines et produites dans des conditions équitables et écologiques» sera elle aussi soumise au vote ce même jour (voir encadré). Un texte qui va moins loin que le premier, mais dans le même sens. Unia appelle ainsi à accepter les deux textes.

Si les sondages sont pour l’heure positifs pour les deux initiatives, les opposants, à droite de l’échiquier politique, ont lancé leur campagne la semaine passée en brandissant le spectre d’une hausse des prix (et conséquemment du tourisme d’achat), de la baisse de la diversité de l’offre et d’une trop grande influence étatique. Autant d’arguments balayés par Michelle Zufferey, secrétaire d’Uniterre.

Questions/Réponses

Quelle est votre réaction face à vos opposants, notamment le conseiller fédéral Johann Schneider-Ammann qui prétend qu’il y aura une augmentation des prix pour les consommateurs?

Je suis révoltée, car on nous ment. Aucune étude ne confirme ces allégations. Et c’est la porte-parole de l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires qui le dit, alors que le prix est un élément central pour elle. Tout dépendra de la façon dont le Parlement mettra en œuvre l'initiative.

Nos opposants veulent faire peur aux gens et continuer de mettre la pression sur l’agriculteur. C’est très décevant de la part de politiques dont on pourrait espérer une vision à long terme. Ceux-ci ne prennent même pas en compte le coût social, environnemental et médical de la nourriture industrielle et de l’agriculture intensive. Des ouvriers agricoles sont traités comme des esclaves, la terre et les animaux comme des choses. De surcroît, la matière première représente un pourcentage minime du prix payé par le consommateur. Un exemple: une rémunération du kilo de blé passant de 50 à 90 centimes n’aurait qu’un impact de 25 francs par année sur le pain acheté par le consommateur. Ce sont les marges de la grande distribution qui pèsent. C’est pourquoi nous voulons de la transparence de sa part. Qu’on s’entende bien, on ne demande pas d’éliminer les grands distributeurs, mais que ceux-ci répondent mieux aux besoins de la population.

Trois fermes et six postes de travail agricoles disparaissent chaque jour en Suisse. Au cours des trente dernières années, le revenu agricole a diminué de 30% et 100000 emplois ont été perdus dites-vous. Comment inverser la tendance?

Il s’agit de favoriser la création de nouvelles exploitations en soutenant l’acquisition des terres par de jeunes agriculteurs et de nouvelles formes de collaborations afin d’assurer la souveraineté alimentaire et une réelle sécurité alimentaire. Cette dernière qui a été plébiscitée dans les urnes l’automne dernier a été foulée aux pieds quelques semaines plus tard par Johann Schneider-Ammann qui a signé des contrats pour ouvrir les marchés. On ne peut pas continuer à utiliser l’agriculture comme une monnaie d’échange. Au contraire, il s’agit d’encourager des circuits courts et la vente directe, ce qui permet aussi de diminuer les coûts. Quand nos opposants estiment que le consommateur aura moins de choix, ils se trompent. Au contraire, la diversité ne passe pas seulement par des lignées de yoghourts industriels, mais surtout par une variété de goûts et la fraîcheur des produits, par la variété des modèles de production.

Cette initiative propose un changement de valeurs…

Elle va en effet à l’encontre de la chosification, de la sous-estimation de l’intelligence de tous les vivants, végétaux compris. Inscrire la souveraineté alimentaire dans la Constitution représente une chance de sauver la petite paysannerie et contrer les lobbies de l’agro-business. Sans paysannerie, on va manger quoi? Avec les changements climatiques, des zones entières ne pourront plus produire ce que nous importons aujourd’hui. C’est faire preuve d’inconscience que de continuer à foncer dans le mur.

Dans le monde entier, ça bouge. La souveraineté alimentaire est au cœur de la Déclaration sur les droits des paysans qui sera discutée par le Conseil des droits de l’homme encore en septembre à Genève. Cette notion inclut le droit à la terre, à l’eau et aux semences. C’est le droit de chaque population de définir sa propre politique agricole et alimentaire, sans le faire au détriment d’une autre région. Il s’agit aussi de mettre un terme à l’accaparement des terres par les multinationales dans les pays du Sud qui génère des migrations des campagnes vers les bidonvilles. Le système agricole actuel est dévastateur. Les paysans ont droit à des moyens et à des salaires décents et leurs employés aussi.

Les sondages vous sont favorables, avec plus de 70% de oui, de quoi espérer une victoire?

Malgré les très bons résultats des sondages, il faut une véritable mobilisation dans les urnes, car nos moyens financiers pour mener campagne sont infimes par rapport à ceux de nos opposants. Et ils vont vouloir faire peur…

Plus d’informations: www.uniterre.ch

www.initiative-souverainete-alimentaire.ch

La souveraineté alimentaire s’expose

Depuis ce printemps, l’exposition «La souveraineté alimentaire, agir aujourd’hui pour bien manger demain» sillonne la Suisse romande. Portée par une coalition large d’ONG et d’organisations paysannes (les fédérations genevoise et vaudoise de coopération – FGC et Fedevaco – Uniterre, Echanger, Plateforme souveraineté alimentaire), elle explique au travers de panneaux didactiques les enjeux de l’agriculture et de l’alimentation, en Suisse et dans les pays du Sud. Des regards croisés sur des exemples concrets. «La Suisse importe du fourrage de soja ou de maïs d’Amérique latine pour nourrir ses vaches. Ensuite, elle exporte ses produits laitiers comme le lait en poudre qui est vendu à bas prix dans le monde entier, concurrençant ainsi la production locale des pays du Sud. En plus de la pollution générée par les transports, ces exportations détruisent l’économie régionale des pays les plus pauvres», peut-on lire sur l’un des panneaux.

Les onze thématiques de cette exposition explorent ainsi les liens entre nutrition, santé, autonomie, proximité, biodiversité, accès à la terre, aux ressources... Des conférences et des jeux, en collaboration avec Terre des Hommes Suisse, sont également organisés.

Plus d’informations et dates d’exposition: www.souverainetealimentaire.org

 

Pour un commerce équitable

Face aux changements climatiques, à la disparition de la biodiversité, à l’élevage industriel, à la surexploitation des sols, l’initiative des Verts «pour des aliments équitables» demande de développer une agriculture respectueuse de la nature, des animaux et des humains. Favoriser le commerce équitable est l’un des axes. Lutter contre la maltraitance animale, un autre. L’initiative demande que les importations (représentant 50% environ de la consommation suisse) respectent des normes de qualité et de durabilité, que les aliments produits de manière écologique bénéficient d’un avantage concurrentiel sur ceux issus d’une agriculture industrielle et polluante. Elle tend aussi à combattre le gaspillage. Un tiers de la nourriture finit encore à la poubelle. Les initiants soulignent que la moitié de ces denrées est perdue avant même d’arriver chez le consommateur du fait de la surproduction ou du calibrage des fruits et des légumes exigé par la grande distribution.

Plus d’informations: www.aliments-equitables.ch

 

En savoir plus

«Pour notre avenir, celui de la planète et notre santé, oui à la Souveraineté alimentaire!» Paysan engagé à Uniterre et homme politique Vert, Fernand Cuche, accompagné de Corinne Fankhauser du mouvement Femmes pour la défense de la terre, se positionnent en faveur de l’initiative sur la Souveraineté alimentaire qui sera soumise en votation le 23 septembre. Ils défendront leur point de vue le 31 août prochain à 20h à la Maison du peuple, rue de Crissier 6, à Renens.  L’ES

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