Graziano Pestoni, La privatisation de la Poste suisse. Origine, raisons, conséquences, Syndicom 2018, 15 francs, commande auprès d’info [at] syndicom.ch (info[at]syndicom[dot]ch) ou au 058 817 18 18.
Scénarios sur l’avenir de la Poste
Le dernier ouvrage du syndicaliste tessinois Graziano Pestoni plaide pour la renationalisation de l’ancienne régie publique
Graziano Pestoni poursuit son combat pour la renationalisation des anciennes régies publiques. Le président de l’Union syndicale tessinoise a publié récemment La privatisation de la Poste suisse. Avec le géant jaune, le secrétaire de l’Association pour la défense du service public approfondit son analyse commencée dans Privatisations (Editions d’En Bas, 2016). Il montre comment, en Suisse et dans plusieurs pays européens, la privatisation des postes nationales a détérioré les conditions de travail et la qualité du service postal, qui ne peut plus être considéré, selon lui, comme un service public digne de ce nom. «Pour occulter l’absence d’objectif concernant la qualité des prestations offertes à la population, la Poste a inventé le concept de service universel. C’est un service minimum, qui devient de plus en plus minimaliste», écrit-il.
D’accord. Mais que peut-il se passer maintenant? Graziano Pestoni évoque trois scénarios. Dans le premier, les conceptions néolibérales vont continuer de prévaloir, les offices postaux à fermer et, à force de se réduire en peau de chagrin, la Poste ne ressemblera plus à rien. Dans le second, les résistances de la population, de la gauche, des syndicats, des cantons et des communes freinent ce processus. C’est le scénario en cours. Ces mouvements contre la fermeture de postes sont importants politiquement, mais ils ne permettent toutefois que de limiter les dommages. Une troisième solution est cependant possible, celle de la renationalisation, qui a les faveurs, on l’aura compris, de ce socialiste, qui y voit la seule possibilité d’éviter à terme la destruction complète du service public: «Il faut réintroduire les prestations pour la population, rouvrir les offices de poste fermés de façon abusive, revaloriser le rôle et le professionnalisme du personnel de la Poste, réduire les salaires des dirigeants et supprimer les bonus.» Cela nécessite tout de même d’arriver à faire monter une pression maximale sur les autorités, d’articuler à la mobilisation politique et citoyenne la lutte syndicale pour les conditions de travail. Y a du boulot!
Présence locale indispensable
Signe positif, ce livre est édité par Syndicom, le syndicat des médias et de la communication, qui organise le personnel du géant jaune, et son président, Daniel Münger, en signe la préface. Rappelons que l’Union PTT avait accepté en 1996 la séparation de la poste des télécommunications et que le Syndicat de la communication et Syndicom, les organisations qui lui ont succédé, ne se sont pas opposées à la transformation de la Poste en société anonyme en 2010 et à ses nouvelles orientations mercantiles. Même l’initiative «Pour une poste forte» était finalement retirée à la demande de la direction du syndicat en 2012. Il faut dire que les modernistes font depuis longtemps passer les régies publiques pour ringardes. Daniel Münger les prend à contre-pied en soutenant que la révolution technologique en cours exige une «propriété commune largement développée» afin d’éviter que la numérisation se transforme en un «puissant instrument de discrimination et ne serve de levier à une nouvelle forme d’esclavage» et que, sous l’effet de la concentration économique, des dizaines de milliers de PME mettent la clé sous la porte. Si les futures missions de la Poste restent encore peu claires, une chose est sûre pour ce responsable syndical: «Une présence locale est indispensable, le service public ne fonctionne que s’il est présent sur place.»