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Un congé parental, oui, mais pas celui-là!

Un enfant et sa poupée.
© Neil Labrador/archives

A première vue, l’objet de la votation du 18 juin à Genève sur le congé parental peut paraître séduisant pour les familles. Mais en creusant un peu, on constate qu’il comporte des pièges…

La gauche et les syndicats genevois appellent les électeurs à voter contre l’initiative cantonale 184 des Vert’libéraux, jugée mal conçue et trompeuse. Arguments

Le 18 juin, les Genevois devront se prononcer sur l’initiative 184 «Pour un congé parental maintenant!» lancée par les Vert’libéraux. Le texte prévoit l’instauration d’un congé parental d’un minimum de 24 semaines, soit 16 semaines pour la mère et 8 pour l’autre parent, en sachant que deux de ces semaines pourront être transférées de manière flexible de l’un ou de l’une à l’autre.

Un comité unitaire composé de la gauche, des Verts, de la Grève féministe et des syndicats genevois, dont Unia, s’est constitué pour appeler à voter NON. «Cette initiative est à première vue intéressante, et il peut paraître contre-intuitif que nos organisations s’y opposent», admet Valérie Buchs, du syndicat Sit, lors d’une conférence de presse convoquée le 16 mai. «Nous sommes évidemment pour un congé parental, mais pas comme ça. Il s’agit là d’une initiative aventureuse et mal conçue.»

Pour ses opposants, l’initiative gomme les besoins spécifiques des mères qui ont vécu une grossesse, un accouchement, un potentiel allaitement et un post-partum plus ou moins lourd. «Le congé parental doit venir compléter le congé maternité déjà existant et être partagé entre les deux parents, souligne la syndicaliste. Avec la possibilité de transférer deux semaines à l’autre parent, le risque est de voir le congé des mères réduit à 14 semaines. Or, ce droit à un congé maternité de 16 semaines, pour lequel les femmes se sont durement battues à Genève, doit être incompressible!»

Vices de forme

Sur la forme, l’initiative pose aussi problème, selon Jocelyne Haller, d’Ensemble à gauche, qui dénonce des «failles et des impostures». «Ce texte comporte toute une série d’imperfections juridiques, c’est-à-dire que, même si l’initiative est acceptée par le peuple, ce n’est pas certain qu’elle soit validée par la Confédération.» Concrètement, les cantons n’ayant pas la compétence d’étendre le congé paternité ou d’introduire un congé parental, une nouvelle assurance serait créée à laquelle les employés seraient obligés de cotiser, mais à l’inverse, les employeurs n’auraient pas l’obligation d’accorder ce congé parental. Le comité unitaire alerte sur les négociations que les employés vont devoir mener avec leur patron pour exercer leur droit et des éventuelles tensions que cela pourrait générer, sans parler du risque de perdre son emploi au retour du congé parental, une réalité bien connue par les jeunes mères…

Autre injustice dénoncée par Badia Luthi du Parti socialiste, l’exclusion dans le texte des indépendants qui ne cotiseront plus à cette assurance… et seront donc privés du congé parental, mais aussi de congé maternité et d’adoption. «C’est tout simplement de la discrimination», constate-t-elle.

42 semaines de congé

Pour Pablo Cruchon, de la Liste d’Union populaire, voter en faveur de cette initiative entraverait la possibilité de mettre en place un vrai congé parental, juste et équitable. «On nous vend un congé parental, mais en réalité, il bénéficiera surtout aux pères.» Il rappelle que le but d’un congé parental, au-delà de l’accueil de l’enfant et de la création du lien, est de répartir les tâches domestiques et d’éducation de manière égalitaire au sein du couple afin de trouver un équilibre. «Pour que cela fonctionne, il faut que la durée de ce congé soit assez longue, qu’il y ait un caractère obligatoire et des garanties en matière de compensation financière et de maintien de la place de travail. A l’heure actuelle, l’initiative 184 ne contient aucun de ces éléments. On peut faire beaucoup mieux!»

Les opposants ont un projet, qu’ils ont soumis en 2019, gelé, puis repoussé aux calendes grecques. Celui-ci propose l’extension des congés maternité et paternité à 18 semaines ainsi que l’introduction d’un congé parental de 24 semaines à se répartir au sein du couple.

En fonction du résultat de la votation le mois prochain, le projet pourrait refaire surface. Mais avant cela, le comité unitaire devra redoubler d’efforts sur le terrain. «La campagne est lancée et elle va être difficile, car l’initiative des Vert’libéraux est présentée comme une avancée, explique Pablo Cruchon. Ce sera à nous de convaincre la population du contraire.»

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