«Je ne peux pas respirer. J’ai mal au ventre. J’ai mal au cou. J’ai mal partout. Je ne peux pas respirer. Ils vont me tuer.» Voici les dernières paroles prononcées par George Floyd le 25 mai, un Afro-Américain de 46 ans, interpellé par la police de Minneapolis. La scène, filmée par une passante pendant une dizaine de minutes, et diffusée via les réseaux sociaux, a fait le tour du monde. George Floyd est plaqué au sol sur le ventre, menotté, par un policier blanc qui l’immobilise avec un genou sur le cou, mains dans les poches… Le suspect, appréhendé pour avoir utilisé un faux billet de 20 dollars, ne montre aucune menace, il demande juste le droit de pouvoir respirer. A côté, les autres policiers, impassibles, se contentent de repousser les passants. «Il ne bouge plus, prenez son pouls», crie l’un d’entre eux, mais personne ne réagit. Le policier en question a toujours son genou sur la tête de cet homme, fier comme un coq, avec l’approbation de ses collègues. Une ambulance arrivera quelques minutes plus tard, mais le mal était déjà fait. George Floyd décédera à l’hôpital.
Les quatre agents de police impliqués ont été mis à la porte dans la foulée, mais cela ne ramènera pas George Floyd. Il semblerait qu’il aurait résisté à son interpellation. Peut-être. Est-ce que cela justifie une immobilisation par étranglement – technique d’ailleurs strictement interdite – et sa mise à mort? Non. Cette affaire a ému, mais elle a aussi provoqué la colère, dans le monde entier. Les jours suivant la mort de celui que l’on surnommait Big Floyd, des milliers de gens se sont rassemblés pour réclamer que justice soit faite. Des émeutes ont éclaté, mettant le pays à feu et à sang. Des personnes se sont aussi mobilisées en Europe, notamment à Paris et Zurich.
Le sujet est vif aux Etats-Unis et, hélas, récurrent. George Floyd s’ajoute à la longue liste des victimes de bavures policières injustifiées à l’encontre des personnes non blanches. Elle met en lumière, une fois de plus, la discrimination raciale envers les Afro-Américains au quotidien. L’affaire rappelle tristement celle d’Eric Garner, mort par strangulation en 2014 à New York lors d’un contrôle de police pour vente illégale de cigarettes. Ou encore celle de Philando Castile, abattu dans sa voiture sous les yeux de sa petite amie lors d’un banal contrôle policier. Ou plus récemment Ahmaud Arbery, 25 ans, tué par balle par un flic à la retraite alors qu’il faisait son jogging dans un quartier résidentiel de Brunswick, en Géorgie: il l’avait pris pour un cambrioleur… La liste est loin d’être exhaustive mais montre à quel point la haine raciale est encore présente dans ce pays, plus de cinquante ans après la fin du régime de ségrégation. Encore en 2020, les hommes noirs sont vus comme des cibles. «Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots», disait Martin Luther King. Le combat n’est pas terminé.