Victoire d'étape pour les vendeuses?
Le 4 mars, le Conseil des Etats rejetait la proposition d’autoriser les ouvertures des magasins douze dimanches par année. Lundi, à l’heure où nous mettions sous presse, l’objet passait devant le Conseil national
Les pressions ont payé. Jeudi dernier, le Conseil des Etats a décidé de ne pas suivre sa Commission de l’économie en rejetant la proposition d’autoriser l’ouverture des commerces douze dimanches par année au lieu des quatre possibles aujourd’hui. Une libéralisation que des élus bourgeois entendaient introduire dans la Loi Covid-19 pour les années 2021 et 2022. Lundi après-midi, l’objet était porté devant le Conseil national. A l’heure où nous mettions sous presse, les débats avaient encore lieu. En cas d’acceptation, la proposition devait être rediscutée ce mercredi devant la Chambre des cantons. En cas de rejet, c’est à une grande victoire que le personnel de vente pouvait prétendre, cela grâce aux pressions sur les élus.
«Unia et des vendeuses et des vendeurs se sont mobilisés jeudi passé devant le Palais fédéral pour distribuer aux parlementaires un tract les enjoignant de rejeter cette attaque contre la Loi sur le travail. Nous avons agi de concert avec l’Union syndicale suisse et l’Alliance pour les dimanches qui comprend aussi les Eglises. Nos diverses actions ont permis de faire pencher la balance au Conseil des Etats, avec une avance confortable de 23 voix contre 18», rapportait Véronique Polito, membre du Comité directeur d’Unia, en fin de semaine dernière. Elle s’insurgeait contre ce projet introduisant un précédent qui pourrait être utilisé plus tard pour généraliser les ouvertures dominicales: «La responsable de l’association patronale Swiss Retail l’a clairement exprimé sur les ondes de la radio alémanique: pour elle, le dimanche n’est plus un jour sacré et il serait temps de discuter sur la généralisation du travail dominical. Il apparaît clairement qu’il ne s’agit pas de rattraper les jours de fermeture des magasins en raison de la pandémie, mais que l’objectif est une libéralisation totale des horaires, avec les implications sur les autres services que cela aura immanquablement. Ils profitent de la situation pour imposer une déréglementation et attaquer la Loi sur le travail.» Pour Véronique Polito, qui espérait que les élus du Conseil national se rallieraient à la position des Etats, cette proposition est d’autant plus inacceptable qu’elle a été lancée moins d’une semaine avant la session parlementaire. «Nous n’avons jamais vu ça. Il n’y a pas eu de processus législatif, pas de consultation, pas de discussion sur l’impact social d’une telle mesure!»
Respect et améliorations nécessaires
Un impact social mis en avant dès la proposition connue par Unia qui avait appelé à rejeter cette grave remise en cause de la protection des salariés de la vente. Des personnes, essentiellement des femmes, souffrant déjà de la hausse des heures supplémentaires due à la pandémie, d’une flexibilité maximale avec des horaires irréguliers et, pour la plupart, des semaines de six jours rendant déjà la conciliation entre vie privée et vie familiale extrêmement difficile. Des salariées saluées hier, attaquées aujourd’hui, touchant de petits salaires, n’ayant jamais obtenu de véritable reconnaissance pour le travail effectué. «En lieu et place du respect et de la solidarité, les partis bourgeois leur imposent leur agenda libéral et se mettent du côté des profiteurs de la crise», soulignait Unia la semaine passée. Le syndicat réfutait aussi l’argument avancé par le promoteur de cette libéralisation, le conseiller aux Etats PLR zurichois Ruedi Noser, qui prétendait une perte de vitesse de la branche. «C’est le contraire qui est vrai: les chiffres d’affaires ont atteint des sommets en 2020. Particulièrement chez les gros distributeurs, ceux-là même qui plaident pour une libéralisation des ouvertures dominicales», indique Unia, qui exige une amélioration de toute urgence des conditions de travail du personnel de la vente. «Cela doit se traduire par des salaires plus élevés, qui permettent de vivre et d’avoir une vie sociale, ainsi que par des horaires qui ne rendent pas malade.»