Ceux qui aident
En choisissant de consacrer leur documentaire Volunteer à des bénévoles œuvrant auprès des réfugiés en Grèce, les réalisateurs suisses Anna Thommen et Lorenz Nufer viennent raconter le drame de la crise migratoire sous un angle inédit. Bouleversant!
Michaël est capitaine dans l’Armée suisse, Sarah et Thomas éleveurs bovins dans les Alpes, Ileana une retraitée huppée vivant au Tessin et Grosi un comédien bien connu de l’autre côté de la Sarine. Ces cinq citoyens helvétiques qu’a priori tout oppose ont décidé pourtant de mettre leur vie entre parenthèses et de se mobiliser pour venir en aide, entre 2015 et 2016, aux milliers de migrants qui débarquent alors chaque jour sur les côtes grecques. C’est leur quotidien sur l’île de Lesbos, ainsi qu’à Idomeni (frontière avec la Macédoine), mais également en Suisse qu’Anna Thommen et Lorenz Nufer se sont attelés à documenter. Quelles sont leurs motivations? Quelles missions leur sont confiées? Comment ont-ils été transformés par cette expérience? Quelle est leur vision de la politique migratoire menée tant en Suisse qu’en Europe? En abordant toutes ces questions, le documentaire apporte un regard frais sur la situation, loin de la langue de bois politicienne et des récits parfois convenus rebattus par les médias.
Le ton est rapidement donné avec une ouverture sur un plan-séquence haletant durant lequel le spectateur se retrouve dans la peau d’un bénévole se précipitant au secours d’un pneumatique. Et dans la foulée, les premiers regards sur ces hommes, femmes et enfants hébétés et affaiblis par une traversée dont on ne peut qu’imaginer l’horreur. «Responsabilité», c’est le premier mot qui ressort des témoignages des uns et des autres. Cette responsabilité dont les gouvernements européens se sont défaits et que les volontaires des ONG ont dû saisir à bras-le-corps à l’insu de leur plein gré. Car qui dit responsabilité dit également pouvoir et obligation de faire preuve de pragmatisme en mettant de côté par moments ses émotions notamment lorsqu’il est question de distribution de nourriture. Des situations qui minent ces bénévoles et les amènent à développer des méthodes alternatives. En glissant, par exemple, dans l’embrasure des tentes des sacs de victuailles à la nuit tombée afin d’éviter les émeutes et l’humiliation que cela peut représenter. Et c’est bien là tout l’intérêt du documentaire: filmer des tâches quotidiennes a priori banales, mais qui viennent refléter des facettes d’une crise dont nous ne pouvons imaginer tous les tenants. A l’image, par exemple de ces plages grecques sur lesquelles se déroulent à perte de vue des milliers de gilets de sauvetage abandonnés par les migrants une fois sur la terre ferme et que les volontaires se sont donné pour mission de récolter.
Redevenir ce qu’on est vraiment
Volunteer se veut également une puissante diatribe à l’encontre des politiques mises en place par les gouvernements européens, mais également suisse. Animés par une colère salutaire, les bénévoles n’hésitent pas à envisager la désobéissance civile pour contrer le manque d’altruisme et surtout les propres entorses aux réglementations menées par les autorités: «On pourrait résoudre le problème si les politiciens pesaient le pour et le contre de façon plus juste en donnant plus de poids au bien-être des gens plutôt qu’à l’application de la législation en matière d’asile ou des accords de Schengen/Dublin. Ceux-ci menant clairement à des violations des droits de l’homme», dénonce Michaël, le militaire.
Dans ce contexte, le retour à la réalité est brutal et ces volontaires doivent affronter un vide énorme et un sentiment d’inutilité face à l’actualité qui continue désormais sans eux. Mais l’expérience permet aussi de revenir à des valeurs élémentaires desquelles nos sociétés occidentales nous ont éloignés, ainsi que l’exprime Sarah, l’éleveuse bovine: «Le besoin fondamental de chacun d’entre nous est en fait que le monde aille bien, que tout soit juste. […] On ne peut donc pas dire qu’on a changé, on redevient ce qu’on est vraiment.» En espérant qu’il en sera de même pour le spectateur…
Volunteer, d’Anna Thommen et Lorenz Nufer, sortie en Suisse romande le 9 septembre.
Avant-premières en présence des réalisateurs:
Bienne, cinéma Rex, vendredi 4 septembre à 18h.
Lausanne, Le Zinéma, lundi 7 septembre à 20h30.
Carouge, cinéma Bio, mardi 8 septembre à 19h.
La Chaux-de-Fonds, cinéma ABC, mercredi 9 septembre à 20h.
Neuchâtel, cinéma Apollo, jeudi 10 septembre à 18h.
Sainte-Croix, cinéma Royal, samedi 12 septembre à 18h.
Bex, cinéma Grain d’Sel, mardi 29 septembre à 20h.
Autres projections spéciales:
Oron-la-Ville, cinéma d’Oron, vendredi 11 septembre à 20h.
Delémont, La Grange, dimanche 13 septembre à 17h.
Vevey, cinéma Rex, jeudi 17 septembre à 18h30.