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Dix ans de prison pour traite d’êtres humains

couloir sombre
© Thierry Porchet / Photo prétexte

L’employeur engageait des travailleurs de Hongrie, de Roumanie, de Moldavie ou encore de Bulgarie, payés entre 4 et 5 francs de l’heure. Ces derniers vivaient dans un climat de peur. Unia a dénoncé ces cas d’esclavage moderne.

Un patron actif dans la plâtrerie employait des travailleurs des pays de l’Est payés quelques francs l’heure. Pour Unia, il est urgent de renforcer les mesures existantes pour lutter contre cette criminalité sur les chantiers

Le Tribunal de district de Zurich a récemment condamné un entrepreneur de la construction dans plusieurs cas de traite d’êtres humains. Reprenons les faits. L’employeur incriminé est suisse et actif dans la plâtrerie, de 2012 à 2017. C’est en 2015 que le syndicat Unia l’épingle pour des cas graves de dumping, social et salarial. «Pendant des années, il engageait des travailleurs venus notamment de Hongrie, de Roumanie, de Moldavie et de Bulgarie, qu’il payait entre 4 et 5 francs l’heure», explique Bruna Campanello, responsable du secteur arts et métiers d’Unia et membre du comité directeur. «Les cotisations sociales n’étaient pas honorées et nous avions découvert qu’une quinzaine de travailleurs logeaient dans un petit appartement aux murs moisis, disposant d’une seule douche et de deux toilettes. Quant aux employés, non seulement ils ne connaissaient pas leurs droits, mais le climat de peur qui régnait à force d’être menacés les empêchait de parler.»

Prison ferme

A l’époque, l’entrepreneur est dénoncé, mais il s’en sort à chaque fois en faisant faillite et en rouvrant une nouvelle société. «Il a procédé à six ou sept faillites en quelques années pour fuir ses obligations, souligne la responsable syndicale. Il a profité du fait que les instances de contrôle ne disposent que de moyens insuffisants pour intervenir immédiatement en cas de manquements manifestes. Même si les manquements ont été découverts, les agissements n’ont pas pu être stoppés...» Et d’ajouter que les organes de contrôle ont alerté l’Etat de Zurich plusieurs fois à son sujet, mais que celui-ci ne les a pas pris au sérieux. Il aura fallu attendre sept ans pour que la justice sévisse. «La peine infligée est de dix ans de prison ferme», confie Bruna Campanello, qui se dit très satisfaite.

Unia rappelle que la traite des êtres humains est une forme d’esclavage moderne, punie par le Code pénal, et demande que les victimes et les témoins soient protégés dès les premiers soupçons et que les autorités poursuivent d’office les auteurs comme le prescrit le droit; ce qui induit notamment la régularisation de leur statut de séjour et la protection de leur identité.

Modèle genevois

Pour le syndicat, ce cas est révélateur des lacunes qui permettent aux systèmes criminels de fonctionner sur les chantiers suisses. La solution se trouve en particulier dans le renforcement des mesures d’accompagnement. «La nouvelle loi fédérale sur la lutte contre les faillites abusives est un premier pas encourageant, mais elle doit encore être améliorée», insiste la syndicaliste. En effet, rien qu’en 2021, 2800 affaires suspectes ont été enregistrées par la Suva: un nouveau record!

Par ailleurs, Unia exige que lors de manquements manifestes, les organes de contrôle puissent ordonner la suspension immédiate du travail afin de protéger les travailleurs. «C’est ce que le Canton de Genève vient de mettre en place, salue Bruna Campanello. Il faudrait généraliser cette base légale au niveau national pour avoir un effet préventif contre les agissements criminels sur les chantiers, car une procédure juridique de nombreuses années plus tard ne protège ni les créanciers ni les travailleurs.» Il est temps que la peur change de camp!

 

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