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Un autre système de santé est possible

A la suite de l’annonce de l’augmentation des primes d’assurance maladie de 6,6% en moyenne, l’Union syndicale suisse réclame un financement durable et social, fondé sur les revenus

Le couperet est tombé le 27 septembre. Après des mois de rumeurs sur une potentielle énorme hausse des primes, la sentence est confirmée. Le ministre de la Santé Alain Berset a annoncé, lors d’une conférence de presse, une augmentation moyenne nationale de 6,6%, tout canton et tout âge confondus.

Plus en détails, l’élévation des primes vaudoises sera de 6,1% en moyenne, passant de 348,70 à 370 francs. A Genève, la variation moyenne sera de 4,7%, soit 18,70 francs de plus. Le Valais affiche 5,8%, Fribourg 7,3% et le Jura, 7,9%. L’augmentation la plus forte sera pour Neuchâtel et le Tessin, puisqu’elle sera de 9,5% et de 9,2%. A l’inverse, Bâle-Ville est le canton qui s’en sort le mieux, avec une majoration de 3,9%. «Cette hausse est difficile et désagréable, surtout qu'elle fait suite à une période de quatre années de stabilité», a déclaré Alain Berset, qui précise que, depuis 2018, l’évolution se situait en moyenne à +1,5%.

Comment expliquer ce choc? L’explosion des coûts de la santé liée à la pandémie, répond le Conseil fédéral. Mais aussi le rattrapage de tous les soins non urgents qui ont été reportés en 2021.

Hausse insupportable

L’Union syndicale suisse (USS) a tout de suite réagi par voie de presse, déplorant un «nouveau choc pour le pouvoir d’achat» des assurés. «Ils vont donc devoir casquer à eux seuls pour la forte croissance des dépenses de santé. Cette charge supplémentaire dépasse les limites du supportable, et pas seulement dans le contexte tendu que nous vivons actuellement (hausse des prix de l’énergie, etc.).»

Un problème loin d’être nouveau. En effet, depuis des années, les syndicats dénoncent le poids de ces primes sur le budget des ménages à faibles ou moyens revenus. A qui la faute? Aux cantons, principalement, selon l’USS, qui n’auraient pas adapté leur participation aux hausses des coûts. «Au cours des dix dernières années, les subsides ont baissé en termes réels dans 19 cantons sur 26», s’indigne la faîtière.

Solutions

L’USS est claire: il faut (ré)agir! A travers des mesures de maîtrise des coûts comme les prix des médicaments ou les assurances complémentaires, mais il faut être plus ambitieux, aller plus loin. Pour les syndicats, la seule manière d’asseoir le système de santé suisse sur une base de financement durablement sociale serait de se fonder sur des ressources prélevées en fonction des revenus, à l’image de la plupart des pays européens. C’est d’ailleurs ce que demandent l’initiative d’allègement des primes du PS et de l’USS, ainsi que le contre-projet adopté par le Conseil national. «Au Conseil des Etats maintenant d’avancer et de traiter rapidement ces objets importants», commente l’USS.

Trois questions à Reto Wyss, secrétaire central à l’USS

Après cette annonce, qui vient s'ajouter à la hausse généralisée des prix, beaucoup de ménages vont avoir du mal à joindre les deux bouts. La lutte pour une hausse globale des salaires va-t-elle s'intensifier?

L’automne s’annonce effectivement très chaud cette année. Lors de notre conférence de presse annuelle, l’USS avait déjà pris en considération la hausse des primes d’assurance maladie, de l’énergie et des loyers. Mais aujourd’hui, nous en avons la confirmation officielle et cela va renforcer notre position dans les négociations et dans toutes les branches.

Sans surprise, du côté patronal, on répond souvent que des hausses de salaire générales ne sont pas envisageables et qu’il faut regarder au cas par cas, que certaines entreprises ne sont pas profitables et que, elles aussi, sont touchées par l’explosion des prix de l’énergie. Mais avec ces propos, ils se trompent de cible.

Comment peut-on expliquer que la Suisse soit l'un des seuls pays en Europe à avoir un tel système de financement?

Je ne suis pas historien, mais ce système perdure et existait déjà avant l’introduction de la LAMal, et s’inscrit dans un Etat-providence lacunaire.

Revenons sur les chiffres. En Europe, pratiquement partout, environ 80% du financement de l’assurance de base se fait à travers un prélèvement proportionnel sur les revenus, soit via les impôts comme en Angleterre, soit via des cotisations salariales comme en Allemagne. En Suisse, on parle seulement de 30% pris en charge par l’Etat. Sans oublier que, dans notre pays par exemple, les soins dentaires sont complètement oubliés, alors que partout ailleurs, il y a toujours une prise en charge, même mineure. C’est une situation intenable.

A quoi ressemblerait le système de santé idéal pour l'USS?

Pour commencer, une caisse unique résoudrait pas mal de problèmes. Actuellement, une cinquantaine de caisses essaient de tirer leur épingle du jeu, générant entre autres des coûts administratifs et publicitaires énormes.

Ensuite, il y a la question des mesures de maîtrise des coûts sur laquelle nous débattons depuis des décennies. Il ne s’agit évidemment pas de couper dans le personnel soignant, bien au contraire. La loi interdit de faire des profits dans l’assurance de base, mais l’industrie pharmaceutique en fait, tout comme les assureurs et les hôpitaux privés, et il faut que cela change!

Enfin, il faut mettre en place un financement de primes individuelles en fonction du revenu, respectivement élargir les subsides LAMal. Comme le demande notre initiative d’allègement des primes, leur charge ne doit pas dépasser 10% du revenu, et si c’est le cas, cela doit être pris en charge par l’Etat. Ces subsides existent déjà, mais ils sont insuffisants.

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«Dans le domaine hospitalier et dans les soins de longue durée, les cantons vont se désinvestir et reporter les charges sur les caisses maladie. Ainsi, au lieu de favoriser le développement d’un système de santé efficient et de qualité, nous allons au contraire accélérer l’explosion des coûts pour les payeurs de primes, tout en mettant en danger la couverture de base en matière de soins», souligne Véronique Polito, vice-présidente d’Unia, inquiète face à ce report de charge.

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