Unia et Syna organisent la défense du site de Boncourt
Le personnel de British American Tobacco a mandaté les syndicats pour rechercher des alternatives permettant de sauvegarder les 220 emplois menacés dans le Jura
Les syndicats Unia et Syna mettent tout en œuvre pour empêcher que les 220 emplois de British American Tobacco (BAT) à Boncourt ne partent en fumée. La multinationale du tabac a annoncé il y a deux semaines sa volonté de délocaliser la production de son usine jurassienne sur d’autres sites en Europe. Une procédure de consultation pour licenciement collectif d’une durée de quatre semaines a été ouverte. Jeudi dernier, une assemblée a réuni 90% des employés demandant à Unia et Syna de les représenter durant ce processus.
«L’assemblée générale a mandaté à la quasi-unanimité la création d’une délégation indivisible composée des syndicats et des représentants du personnel, soit une trentaine de personnes», indique la secrétaire régionale d’Unia Transjurane, Rébecca Lena. «Nous allons travailler à rédiger un rapport visant à maintenir les emplois sur ce site, qui n’est pas déficitaire, et à convaincre la direction de BAT qu’il présente du potentiel. Après de premières discussions avec la direction, nous sommes parvenus à un accord afin que la délégation puisse travailler sur ses propositions dans des conditions acceptables.»
Des pistes se dessinent
«Comme toujours, cela s’annonce difficile, mais, avec les salariés, nous allons mettre toute l’énergie nécessaire pour présenter un rapport avec des alternatives crédibles. Nous ne partons pas de rien, il y a déjà des pistes qui se dessinent», souligne Yves Defferrard, membre du comité directeur d’Unia et responsable de l’industrie. Le syndicaliste, qui a participé à plusieurs consultations ayant permis d’annuler ou, du moins, de limiter l’ampleur de délocalisations, note que «le personnel est extrêmement motivé et le soutien dans le canton énorme».
Dans un communiqué commun, les partis politiques jurassiens ont indiqué qu’un départ de BAT aurait des effets «catastrophiques». Ils ont appelé les autorités cantonales et fédérales à «la plus grande combativité pour que le site de Boncourt soit maintenu». Les syndicats ont pu rencontrer une délégation des partis et le ministre de l’Economie, Jacques Gerber. «Nous l’avons rendu attentif à ce que notre rapport ne serve pas d’alibi, il faut que la direction de BAT à Londres nous réponde point par point», explique Yves Defferrard.
Fleuron industriel lucratif
L’usine de Boncourt est un fleuron industriel jurassien, c’est ici que sont produites les «Parisiennes». Fondée en 1814 par Martin Burrus, la fabrique s’est lancée dans les cigarettes à partir de 1886. En 1996, l’entreprise Burrus a été rachetée par le groupe Rothmans, qui a fusionné trois ans plus tard avec BAT. Selon l’institut d’études privé Xerfi, la multinationale se taille 12,2% du marché mondial du tabac, qui pesait en 2020 environ 1000 milliards de dollars (en incluant les taxes). Son bénéfice net s’est élevé à 6,8 milliards de livres sterling en 2021, soit 7,7 milliards de francs au taux d’aujourd’hui. Ce n’est pas négligeable, mais le capital de BAT est détenu à 75% par des gestionnaires d'actifs, comme le fonds Blackrock, et ceux-ci sont connus pour exiger d’augmenter toujours plus les marges d’exploitation.