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Quand le consentement passe à la trappe

Une femme sur cinq subit des actes sexuels contre son gré en Suisse. Et pourtant, seules 8% d’entre elles portent plainte par peur de ne pas être crues ou par honte. Des chiffres choquants qui mettent en lumière les lacunes du système judiciaire helvétique. Récemment, la Commission des affaires juridiques (CAJ) du Conseil des Etats a mis en consultation un projet de loi visant à redéfinir le viol au niveau pénal. Et le consentement ne semble pas être à l’ordre du jour. D’après la CAJ, sans violences ou menaces, l’absence de ce dernier ne serait pas suffisant pour retenir les infractions sexuelles les plus graves. Qui se trouveraient alors réduites à la catégorie d’«atteintes sexuelles», prévoyant des peines moindres. Cette révision du Code pénal est sidérante car elle place, une fois de plus, le curseur sur la victime et non sur l’agresseur. Une façon de culpabiliser la personne lésée et de la rendre, en quelque sorte, responsable de l’acte.

Droits humains laissés de côté. La Convention d’Istanbul, ratifiée par la Suisse en 2018, exige que tout rapport non consenti soit criminalisé. Mais Berne ne s’offusque pas de la contradiction avec ses engagements. A titre d’exemple, la Suède a observé, après l’adoption du consentement sexuel en 2018, une hausse de 75% des condamnations pour viol. En Suisse, la définition du viol dans le Code pénal décrit ce dernier comme le fait de contraindre, par la menace, la violence physique ou psychique, une personne de sexe féminin à subir l’acte sexuel. Une vision lacunaire qui discrimine la communauté LGBTQ+ et les personnes victimes d’autres violences de ce type. Et donne une définition bien éloignée de la réalité. Car la violence exigée par la jurisprudence n’est souvent pas nécessaire. La personne agressée étant souvent incapable d’agir, il s’opère un phénomène médicalement établi: l’état de sidération. De plus, le projet de loi ne prend pas en compte que la majorité des violences sexuelles ont lieu dans la sphère privée. En d’autres termes, la menace ou la violence ne sont pas forcément nécessaires lorsque l’agresseur est une personne de confiance… Comme le conjoint!

Le vol oui, mais pas le viol! En Suisse, on considère automatiquement le vol comme une infraction – évidemment sans poser de questions sur le comportement du propriétaire. En revanche, lorsqu’il s’agit d’un délit sexuel, on interroge la victime sur sa réaction. Alors qu’on devrait juger l’auteur sur ses actes. En intégrant la question du consentement, nombre de femmes qui n’osaient pas porter plainte par manque de preuves de contraintes, pourraient désormais réagir. Et ainsi contribuer à faire évoluer les mentalités sur le fait que tout acte sexuel sans consentement doit être considéré comme une agression.